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Femmes musulmanes dans l'histoire Portraits

Malahayati, première femme amirale

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[Publié initialement le 21 mai 2019]
Après 15 jours passés à vous présenter des femmes musulmanes du monde entier, il n’est plus à prouver que l’histoire de l’islam regorge de femmes musulmanes inspirantes, fascinantes, conquérantes et profondément intelligentes. Elles, si nombreuses à avoir accompli un travail remarquable, un travail inoubliable, un travail mémorable au cours des siècles, nous rappellent l’importance de s’engager pour avancer, l’importance de célébrer pour ne jamais oublier.
De la science aux beaux-arts en passant par les sciences islamiques, chaque discipline devrait nous dévoiler ses héroïnes oubliées. Celle que nous allons rencontrer ce soir fut la première de son temps, la première des premières !
C’est le titre d’amirale que Malahayati fut la première femme au monde à porter. Son histoire et ses réalisations sont plus qu’impressionnantes : courage, audace, réussite et passion les résumeront.
Celle qui deviendra la terreur du Golfe de Bengale est en somme une inspiration pour les femmes musulmanes mais également pour le monde tout entier.

Keumalahayati, également connue sous le nom de Malahayati, naquit au XVIème siècle dans le sultanat d’Aceh, royaume musulman ayant pris la succession de Pasai, plus ancien royaume musulman attesté du monde insulindien. Aceh, appelé aussi « le porche de Makkah », en raison de son positionnement stratégique permettant la propagation de l’islam en Asie du Sud-Est, devint très vite un centre politique et religieux. En effet, l’un des plus grands centres d’études religieuses de la région s’y trouvait. Le sultanat d’Aceh contrôlait le stratégique détroit de Malacca, détroit où transitait le commerce entre l’Extrême-Orient et le reste du monde. Déjà à cette époque, le détroit de Malacca suscitait la convoitise des royaumes frontaliers ou plus lointains.

Malahayati, fille de l’amiral Machmud Syah, était également l’arrière-petite-fille du fondateur du sultanat, Ibrahim Ali Mughayat Syah. Son père comme son grand-père étaient tous deux des amiraux très respectés. Admirative et fascinée par les actions qu’ils menaient, Malahayati s’y intéressa très tôt.

Après avoir obtenu son diplôme d’études islamiques à Pesantren, un pensionnat islamique, elle décida de s’inscrire à l’Académie militaire Ma’had Baitul Maqdis. L’Académie lui offrit un enseignement dans les départements de la Marine et des forces terrestres. Son diplôme en poche et éperdument amoureuse, elle épousa l’un des commandants de la marine royale. Mais Malahayati ne pouvait s’imaginer que dans les années qui suivraient son destin basculerait.

L’époque était marquée par de rudes affrontements entre les armées du sultanat d’Aceh et celles des Portugais. Alors que les Portugais s’étaient infiltrés dans le détroit de Malacca et en avaient profité pour le détruire, ils tentèrent par la suite d’envahir Aceh. C’était sans compter sur la ferveur des troupes d’Aceh qui, au détriment de nombreuses vies, les repoussèrent lors de la bataille de la baie de Haru. Lors de cette bataille, des milliers de soldats et marins du sultanat tombèrent. Le mari de Malahayati en faisait partie.

C’est ainsi que Malahayati se promit de venger la mort de son mari, et de combattre aussi longtemps que son Créateur ne l’aurait pas rappelée auprès de lui.

Déterminée à continuer le combat porté jusqu’alors par son époux, elle demanda au sultan de lui octroyer la permission de créer sa propre armada composée des veuves de l’armée d’Aceh. Après approbation, Malahayati bénéficia d’une base navale, d’une forteresse et d’une flotte de plusieurs navires. Ainsi, elle créa son armada et la baptisa «Inong Bale Armada». Le sultan lui-même la nomma amirale, elle devint ainsi la première amirale de l’histoire.

Accompagnée par son armée, durant de longues années, Malahayati se donna pour mission de protéger les frontières et les routes commerciales du sultanat sans relâche. Elle lutta quotidiennement contre les visées coloniales des Portugais et des Hollandais.

En 1599, dans l’optique d’établir des relations commerciales plus stables et plus durables, Cornelis de Houtman et son frère Frederik, tous deux commandants hollandais se rendirent auprès du sultan qui les accueillit pacifiquement. Cela ne dura qu’un court instant. En effet, Cornelis, en choisissant un traducteur portugais, commit une grave erreur diplomatique. Son choix fut considéré par le sultan comme un affront et un réel manque de considération. Furieux, ce dernier ordonna alors l’assaut. S’ensuivit une série de batailles navales opposant les deux camps. C’est l’amirale Malahayati qui parvint alors à tuer le commandant hollandais Cornelis de Houtman et à emprisonner son frère.

Cette victoire et son exploit lui valurent d’être respectée par l’ensemble des armées et ce au-delà des frontières de Aceh. Elle fut alors nommée Commandante de la Garde Royale du palais et Ministre des affaires étrangères du sultanat, négociant notamment à présent des traités commerciaux. Ce nouveau poste lui valut en 1600, lorsque l’Angleterre entra dans le détroit de Malacca, de négocier directement avec la reine Elizabeth Ière. Cette dernière demanda alors à discuter directement avec Malahayati pour qui elle éprouvait un profond respect. Ensemble, elles trouvèrent un accord pacifique. L’accord ouvrit la voie anglaise vers Java et permit rapidement de construire des bureaux de commerce à Banten.

Cependant, comme une prophétie, Malahayati décéda quelques années plus tard lors d’un nouvel assaut contre les Portugais et ce, dans la baie du détroit de Malacca.

Quelle fascinante histoire que celle de Malahayati, pourtant encore trop méconnue ! Cette première femme amirale est sans conteste l’une des grandes figures féminines ayant marquée l’histoire islamique. Reconnue et célébrée en Asie, l’on peut notamment trouver aujourd’hui à Sumatra, des universités, hôpitaux, routes et villes portant son nom. Il ne fait aucun doute que le nom de Malahayati est à retenir et à diffuser.

Crédit image à la une : Sist’art. Les 3 soeurs du collectif Sist’art nous font une fois de plus l’honneur de collaborer ! Pour découvrir leur univers, rendez vous sur instagram : @taekanddoart et @sistart.comics

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Femmes musulmanes dans l'histoire Portraits

Sitt Al Mulk : femme de pouvoir

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[Publié initialement le 20 mai 2019]
L’histoire de ce soir est une histoire de pouvoir, une histoire faite de tolérance et de coexistence. Cette histoire, c’est l’histoire d’une femme que rien ne destinait à gouverner, c’est l’histoire d’une fille de calife fatimide que le sort amena à gouverner malgré une politique à l’égard des femmes faites de difficultés.
Sitt al Mulk dont nous allons parler n’était certes pas désignée pour régner mais une fois qu’elle fut nommée, fit bien mieux que ceux l’ayant précédée. L’histoire de Sitt al Mulk, c’est l’histoire d’une femme passionnée, d’une femme convaincue de ses idées qui milita pour les faire accepter.
En route, ensemble marchons sur les pas de la grande Sitt al-Mulk !

Si après cette lecture, vous souhaitez en découvrir davantage à son sujet, c’est auprès de la fabuleuse Fatima Mernissi qu’il faudra se tourner. Elle consacre à Sitt al-Mulk un chapitre entier dans son ouvrage Sultanes oubliées. Un récit complet et finement argumenté !

C’est en septembre 970 que la princesse Sitt al-Mulk naquit près de Kairouan. Son père était le célèbre prince Nizâr qui deviendra le calife fatimide al-Azîz et sa mère, une chrétienne d’origine byzantine fière de ce qu’elle était et décidée à le rester ; elle était surnommée Sayyida Al Aziziyya.

Les parents de Sitt al-Mulk étaient follement amoureux, si bien que cela fut parfois mal interprété. Sitt al-Mulk quant à elle défendait sa double identité et l’érigea durant sa vie comme un idéal.

Lorsque le calife fatimide quitta Ifriquiya pour s’installer à Al Qâhira, sa famille plia bagage et vint s’installer en Egypte. Sitt al Mulk avait alors 3 ans. Deux années plus tard, son père fut nommé calife. Il fit construire pour sa famille, et plus spécifiquement pour sa fille, un palais en bord de mer. C’est ainsi que Sitt al Mulk passa une enfance heureuse dans l’un des plus beaux palais d’Orient, le Palais de la Mer.

Alors qu’elle entamait sa quinzième année, son demi-frère al-Mansûr, qui deviendra par la suite le futur calife al-Hâkim naquit, en 985. La relation avec son demi-frère rendit la cohabitation quelque peu compliquée. Cela devint encore plus difficile lorsque Sitt al-Mulk perdit sa mère en 995.

Sitt grandissait et s’approchait de l’adolescence, elle devenait une femme, une femme d’une grande beauté et d’une intelligence hautement développée. Adulée par son père, les rôles qui lui furent confiés dépassèrent son rôle de princesse fatimide. Il la fit entrer dans le cercle politique du palais, jusqu’à ce qu’elle puisse avoir une influence sur les décisions et actions. Conscient de ses capacités, très tôt son père l’associa au pouvoir en lui demandant son opinion et en l’encourageant à l’exprimer.

Au sein de la cour, Sitt était très appréciée. Elle reflétait le luxe et l’influence des années de gloire du califat. Elle était toujours parfumée, ornée de bijoux et apprêtée des plus belles tuniques. Sous le règne de son père, elle contribua notamment à ce que les non musulman.e.s, chrétien.ne.s et juif.ve.s puissent bénéficier de privilèges qu’ils n’eurent jamais auparavant. De son père, elle hérita de qualités en matière d’ouverture et de tolérance.

Le 13 octobre 996, son père mourut subitement. Sitt était alors âgée de 26 ans.

Bardjawân, l’eunuque du palais, fit alors proclamer calife le jeune prince al-Mansûr, demi-frère de Sitt al-Mulk, qui n’avait que onze ans. Le jeune calife Al Hakim fut donc sous la tutelle des puissants de la cour fatimide. Il prit officiellement le pouvoir en l’an 1000. Personne ne s’était douté que la folie et la peur s’abattrait sur la ville lors de son règne. Il terrorisa le Caire par ses excès et sa sœur par sa jalousie débordante.

En 1009, al-Hakim ordonna la destruction de l’église du Saint-Sépulcre à Jérusalem et imposa des restrictions au comportement des juif.ve.s et des chrétien.nes, détruisant leurs églises et leurs monastères. L’entêtement et le comportement de son demi-frère Al-Hakim contribua à la dégradation des rapports que tous deux entretenaient. Sitt fit alors le choix de s’éloigner et quitta le palais royal pour s’installer dans l’une de ses nombreuses propriétés.

En 1021, Al-Hakim disparut lors d’une de ses promenades nocturnes habituelles dans la ville. Après quarante jours de disparition, il fut déclaré mort. Après la mort d’Al-Hakim, son fils, âgé de 16 ans, al-Zahir fut déclaré calife. Al-Zahir avait grandi et avait été éduquée auprès de sa tante Sitt Al Mulk en raison des violences physiques que son père lui infligeait à lui et sa mère. Il la choisit dont comme régente pour l’accompagner durant les premières années de son règne. Malgré les soupçons qui pesaient sur elle et en raison de sa popularité, Sitt pu occuper le poste de régente de l’empire. Très vite, elle reprit les choses en main et tâcha de se démarquer de la politique menée jusqu’alors par Al-Hakim.

Ainsi dès sa première année de régence, elle encouragea la reconstruction d’églises à Alexandrie que son demi-frère avait ordonné de détruire. Elle rétablit également le système de taxation commerciale qu’il avait aboli et permit de nouveau aux femmes de sortir de chez elles à leur guise, les autorisant notamment à porter à nouveau des bijoux. Elle inversa les interdictions au sujet des pratiques musicales et des cultes chrétien et juif.

Parmi l’une de ses entreprises politiques les plus importantes, elle tenta de réduire les tensions entre les empires fatimides et byzantins en essayant de trouver une solution au territoire litigieux d’Alep.

Le traitement plus équitable des habitants, sa politique de tolérance, d’ouverture ainsi que la rénovation des infrastructures firent d’elle une princesse très appréciée et très populaire.

Mais alors que les décisions qu’elle prenait laissaient espérer un rapprochement entre les différentes puissances impériales, Sitt al Mulk mourut après seulement deux ans de service en tant que régente.

Bien que Sitt n’ait jamais été officiellement érigée en calife, – il s’agissait d’un titre réservé aux homme sous le califat fatimide – Sitt al-Mulk dirigea dans les faits l’un des empires les plus importants du Moyen Âge. La paix qu’elle instaura, et l’héritage qu’elle laissa dépassèrent de loin la période de son bref règne.

Ses profondes convictions accompagnées d’un leadership naturel firent d’elle une princesse appréciée et respectée dans l’ensemble de l’Egypte. Femme de terrain, elle sut montrer son efficacité et faire oublier durant un temps les interdits politiques de gouvernance intrinsèquement liés au genre.

Crédit image à la une : Charlotte. Charlotte est une illustratrice passionnée de dessin et notamment par l’univers de la mode. Je vous laisse découvrir son univers :
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Zaynab Bint Ahmed : professeure émérite

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[Publié initialement le 16 mai 2019]
Lorsque j’ai entrepris ce projet, j’avais pour objectif d’apporter à mes lecteur.rice.s une bonne dose d’inspiration, ainsi qu’une pincée de savoir, le tout pour les faire se questionner sur les notions d’égalité et d’équité en islam.
Cependant, je n’avais pas prévu d’y ajouter de mon côté, une poignée de frustrations. Lorsque j’ai commencé le projet, mon premier travail fut d’effectuer une sélection de femmes musulmanes inspirantes, puissantes, fascinantes ayant marqué leur temps. De toutes les découvrir fut pour moi une révélation. Une fois cette première sélection réalisée, j’ai rédigé mes mini biographies avec la volonté de multiplier les recherches et données à leur sujet.
Mes frustrations virent le jour lorsque j’ai commencé à rédiger et lorsque j’ai pris conscience de la difficulté que c’était de trouver de l’information de qualité à leur sujet. La femme dont je vais vous parler faisait partie de celles qui me semblaient essentielles. Pourtant, lorsqu’il s’est agi de développer mes recherches à son sujet, les sources furent extrêmement limitées. Difficile, voire presque impossible, de retracer et conter sa vie et son parcours avec des sources essentiellement francophones et anglophones.
Ma plus grande frustration fut d’être confrontée à un nombre important de données au sujet des hommes qu’elle a formés. Son nom y est constamment cité mais elle n’est en réalité que vaguement racontée.
Face au manque de données à son sujet, j’aurais pu choisir de ne pas vous en parler mais j’ai malgré tout décider de conserver son histoire et de vous la présenter dans une version plus limitée.
Aujourd’hui, je vous emmène dans le Damas du XIVème siècle découvrir Zaynab bint Ahmed, professeure émérite.

C’est au début du XIVème siècle que naquit Zaynab bint Ahmed dans la ville de Damas.

La période durant laquelle elle vécut ne fut pas des plus aisées. En effet, durant ce temps, une série de raids et de tentatives d’invasions fut portée par les Mongols contre la Syrie. En 1260, la ville d’Alep tomba, puis en 1300 il en fut autant pour la ville de Damas.

Malgré cela, Zaynab, mariée à l’homme d’Etat de Balbeek, Nasir Ad Din ibn Qarnin, répartit son temps entre l’enseignement et l’aide aux plus démuni.e.s.

Appartenant à l’école de jurisprudence hanbalite, elle avait acquis grâce au travail de lecture et d’apprentissage, qu’elle avait très tôt réalisé, un certain nombre d’ijazas dans des domaines divers.

Ces ijazas équivalent à des diplômes qui lui conféraient le droit d’enseigner les sciences islamiques. C’est ainsi que très vite, elle devint l’une des érudit.e.s musulman.e.s les plus éminent.e.s du XIVème siècle.

Au sein des mosquées ou durant des cours privés, elle enseignait à ses élèves l’apprentissage du Coran et l’analyse d’ouvrages perçus comme étant essentiels en islam. Elle maîtrisait et enseignait notamment des ouvrages tels que le Sahih Bukhari et le Sahih Muslim, deux des six grands recueils de hadiths. Ces recueils comprenaient l’ensemble des traditions relatives aux actes et aux paroles de Muhammad et de ses compagnons, le Muwatta de Malik, l’une des premières rédactions de la loi musulmane, compilée et éditée par l’Imam Malik, le Sharh Ma’ani al Athar d’Al Tahawi ou encore le Shaha’il du savant Al Tirmidhi.

Son grand savoir lui valut d’être profondément respectée et d’être souvent questionnée. Ainsi de grand.e.s savant.e.s l’approchaient dans l’optique de lui commander des relectures de leurs ouvrages.

Les personnes qui souhaitaient la côtoyer et l’écouter parcouraient parfois plusieurs milliers de kilomètres pour venir se former auprès d’elle. Parmi ses élèves figuraient des hommes et femmes ayant aujourd’hui acquis une certaine notoriété. On peut notamment citer le célèbre voyageur nord-africain Ibn Battuta, l’historien al Dhahabi, le théologien et juriste Hajar Al Asqalani ou encore l’expert du hadith et du fiqh Tal Al Din Subki.

En constant accord avec ses enseignements, Zaynab était également une femme juste et généreuse. De son vivant, elle fit construire en son nom plusieurs hospices afin d’accueillir les personnes dans le besoin, et en fin de vie, elle fit le choix de léguer ce qu’elle possédait sous forme de dotations religieuses afin de contribuer au développement de l’enseignement religieux. En 1300, alors que les attaques mongoles s’intensifiaient à Damas, Zaynab s’en alla.

En finissant de rédiger la biographie de Zaynab, j’étais quelque peu désolée et attristée. Désolée de ne pas en avoir dit assez et attristée de finalement n’en savoir que si peu à son sujet.

Lorsque l’on sait l’ampleur des enseignements qu’elle a pourtant donnés, lorsque l’on voit les grands noms qu’elle eut la capacité de former, lorsque l’on sait le rôle qu’elle a occupé dans sa ville, on ne peut qu’être chagriné.e !

Lorsque je sais que les livres des étudiant.e.s qu’elle a formé.e.s sont lus quasi quotidiennement un peu partout dans le monde, je ne peux m’empêcher de penser que si elle avait été un homme, alors son nom serait certainement placardé partout.

J’aurais tant aimé avoir la capacité de faire un bond dans le passé pour m’asseoir à ses côtés et précieusement collecter et noter les informations à son sujet.

J’ose encore espérer que mes recherches ne furent pas assez poussées et qu’un jour je parviendrai à rendre à Zaynab un petit peu de ce qu’elle a donné.

Alors si l’un.e d’entre vous en sait plus sur son histoire, je serais ravie de le savoir pour rectifier cette biographie et lui rendre un hommage un petit peu plus marqué.

Crédit image à la une : nihad.me
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Lettre ouverte à Toi qui te demandes pourquoi je prie

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[Publié initialement le 22 juin 2017]

Le mois de Ramadan nous quitte peu à peu. Il me reste peu de temps pour te partager un des trésors de ce mois. Aujourd’hui, je vais me permettre de te tutoyer. Je voudrais que l’on puisse se comprendre vraiment, que l’on se parle à cœur ouvert. Ce trésor est trop précieux pour y mettre des barrières. Je ne sais pas qui tu es, ce que tu sais, ce que tu fais, si tu crois ou non en notre Dieu qui a tout créé. Je sais juste que ce titre t’a parlé, que tu as eu envie d’en savoir plus. Alors ne m’en veux pas si tu connais déjà ce que j’écris. Fais-toi confiance, laisse les mots te porter. Si tu me lis, c’est que tu es prêt·e à embarquer… Que Dieu me pardonne si quelques erreurs se glissent.
Tu le sais peut-être, l’Islam est composé de cinq piliers qui forment les fondements de notre religion. Cinq piliers sur lesquels s’appuyer de toutes ses forces pour construire, si Dieu le veut, les bases d’un édifice solide. Ils sont comme les fondations d’une maison. Lorsque les fondations sont friables, tout s’effondre. Le Ramadan est le 4ème pilier de la religion. Un pilier au sein duquel nous augmentons tou·te·s nos actes d’adoration. Et c’est du 2ème pilier que j’aimerais te parler : la Prière.

 

La prière reste pour les non-croyant·e·s un mystère. Quand mon père ose enfin me poser des questions, il me demande : cinq fois par jour ? Vraiment ? Et tu pries comme les hommes ? Comme on voit dans les films ? Oui Papa, comme les garçons et 5 fois par jour. Il est vrai que dans d’autres religions, les femmes ne prient pas autant que les hommes et parfois pas de la même façon. Pour nous, c’est un cadeau auquel nous avons tou·te·s droit équitablement. Femmes et hommes.

Je t’écris à toi qui, peut-être, ne connais pas encore la saveur d’une prière. J’aimerais t’aider, si Dieu le veut, à imaginer, à goûter les délices de ce moment si particulier. Et peut-être auras-tu envie, qui sait, d’essayer toi aussi.

Qu’est-ce qu’une prière ? Je vais tenter de la décrire comme je la ressens et comme je suis presque sûre que chacun·e d’entre nous l’a déjà vécue. Oui, même les non-croyant·e·s. Alors, joue le jeu et laisse-toi guider.

La vie est une alternance perpétuelle d’événements riches en émotions : joie, tristesse, bonheur, colère… Des émotions que nous avons parfois un besoin insoutenable de partager avec nos proches.
&nbsp:

Souviens-toi d’un moment empreint d’une émotion forte : une joie immense (comme la naissance d’un enfant) ou une tristesse profonde (comme la perte d’un être cher). Ce moment où l’on sent que personne ne peut nous aider ou ne peut nous comprendre. Et en même temps, c’est justement le moment où l’on aime avoir la bonne oreille pour nous écouter, la bonne épaule pour se reposer.

Pense alors à la personne à qui tu te confies. Dans ces moments où tu sens qu’elle est la seule à pouvoir te comprendre : ta mère, ton père, ta femme, ton mari, ta sœur, ta meilleure amie… ?

Imagine maintenant que ce moment est tellement lourd que tu as besoin de l’appeler une, deux, cinq fois par jour. Peut-être plus. Parfois tard, la nuit. Et cela, plusieurs jours d’affilée. C’est trop dur à porter, tu as besoin d’elle, de lui, de son soutien, de ses mots.

Combien de temps crois-tu que cet être si précieux à tes yeux accepte que tu le sollicites autant ? Deux, trois jours, une semaine, un mois… ? Il arrive un temps où il ne pourra plus t’écouter autant. Non pas qu’il ne t’aime plus, mais qui peut supporter cela ?

Pour d’autres, dans ces terribles moments, c’est l’isolement qui est source d’apaisement. Tu te mets alors à chercher au plus profond de toi des solutions. Tu essayes de comprendre : « Comment, pourquoi, grâce à quoi supporter tout cela ? ».
&nbsp:

Que tu préfères être seul·e ou te confier, je vais te partager un secret… Je connais Celui qui est Le meilleur des conseillers, Celui qui a la réponse à toutes tes questions. Il s’appelle Allah, exalté soit-Il. Et la prière est l’un des moyens les plus purs pour Le contacter.

Imagine dans ces moments d’épreuves pouvoir te confier, t’adresser à un être qui ne se lasse jamais. Il ne t’en veut pas de t’énerver, de pleurer ou même de douter de Lui et de Ses réponses. Lorsque tu lui demandes pardon, Il te pardonne sans concession.

Qui d’entre nous est capable de pardonner si entièrement ? As-tu déjà ressenti la valeur d’un pardon que l’on t’adresse ou que tu donnes sincèrement ?

Plus tu reviens vers Lui, plus tu Lui demandes de l’aide, plus Il est heureux. Sa porte est toujours ouverte. Jour et nuit. Aussi souvent que tu le veux : cinq, dix fois par jour. Indéfiniment.

Voilà pourquoi je prie. Son écoute est toujours sincère et ses conseils sont justes. Cette prière, cinq fois par jour, qui pour toi peut sembler un poids, est en fait la plus belle manière de s’alléger. Qui possède un si fidèle compagnon ?

Maintenant que tu comprends pourquoi je prie, je souhaite te faire goûter à quelques délices de ces précieux instants. Parfois je prie seule, parfois en groupe, dans des lieux improbables, en pleine forêt aussi bien qu’à la mosquée.

La prière se fait obligatoirement à certains moments. Avant que le soleil ne se lève ou lorsqu’il se couche, par exemple. Quel plus beau spectacle pour la méditation ? Les oiseaux aussi sont là. Je les entends également partager quelques mots avec Notre Seigneur bien-aimé.

Quand je me rends à la mosquée, l’ambiance est particulière. Je sens l’odeur des muscs lorsque je me rapproche. L’air semble plus frais. Déjà, le corps se relâche… En paix.

 

 

La prière a ses codes, ses mouvements. Ce serait trop long de t’expliquer toute leur signification.

L’imam commence… Le silence se fait. Des centaines de personnes et pourtant… Il récite les paroles de Celui qui nous aime, qui nous connaît comme nous ne nous connaîtrons jamais. Sa voix sublime me donne des frissons. Et vient ce moment de communion, ce « AMIN » puissant. Des centaines de voix à l’unisson.

Même si je ne comprends pas tout, chaque mot que je capte est une bénédiction. Nos corps, collés les uns aux autres, ont chaud. Nos jambes commencent à faiblir parfois. Et pourtant, nous tenons. Lorsqu’arrive enfin le moment de la prosternation, que notre front touche le sol, nous nous livrons.

Je lui dis ce qu’Il sait déjà et j’entends toutes ces femmes qui chuchotent, qui pleurent parfois, tout autour de moi. Peut-être sommes-nous plusieurs à Lui demander la même chose, à Lui demander Son Pardon ? Une prière est-elle plus entendue lorsqu’elle est faite à l’unisson ?

Chaque prosternation est une libération. J’imagine ce sac rempli de péchés, lourd à porter, qui, lorsque mon front touche le sol, se vide, glisse de mon dos peu à peu… Et au moment de se redresser, il n’y a plus de fatigue. Je repars de la mosquée, le corps allégé, le cœur apaisé.

Chaque prière a sa saveur. Chaque prière a son secret. Peut-être que tu le découvriras si tu essaies. Tente de te tourner vers Lui. Et qui sait, Il mettra sûrement quelqu’un sur ton chemin pour t’accompagner. Peu importe comment tu le fais…

Je vais te confier un dernier secret. Avant de me convertir, je priais. Je ne savais pas comment, pourquoi, ou vers qui exactement, mais je Le sollicitais souvent. Je tournais mon regard vers le ciel, la nuit et je Lui demandais de l’aide. Je ne pouvais pas rêver de réponse plus parfaite que cette conversion… Il est tout près. Merci mon Dieu.

 

 

D’ailleurs, écoute ce qu’Il te dit à ce sujet-là :

Et quand Mes serviteurs t’interrogent sur Moi. Alors Je suis tout proche : Je réponds à l’appel de celui qui Me prie quand il Me prie. Qu’ils répondent à Mon appel et qu’ils croient en Moi, afin qu’ils soient bien guidés.
Sourate 2, verset 186

 

Nous avons effectivement créé l’Homme et Nous savons ce que son âme lui suggère et Nous sommes plus près de lui que sa veine jugulaire.
Sourate 50, verset 16

Avant de te laisser, une dernière chose. Une femme m’a offert ce livre : La saveur de la prière, de Ibn Qayyim Al-Jawziyya. J’ai mis deux ans à comprendre ce qu’il signifiait. Et maintenant que je connais le goût de ce mets si précieux, je ne peux plus m’en lasser. Aussi longtemps qu’Il me le permet. Alors non, ne t’inquiète pas, ce n’est pas si dur de prier cinq fois. C’est un cadeau à la valeur inestimable.

 

Je te souhaite à toi aussi de connaître, un jour, ce moment de paix.

A très bientôt cher·e·s ami·e·s.

Crédit photo de couverture : Jewel Samad AFP

 

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Arib al-Ma’muniya : une célèbre musicienne à la cour

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[Publié initialement le 20 mai 2019]
Aujourd’hui, grâce à la femme que je vous présenterai, nous parlerons d’art, de musique, et de spiritualité.
La femme dont je vais vous raconter l’histoire nous permettra de nous rappeler, ou juste de ne pas oublier, que la musique, la danse et l’art de manière générale occupaient une place importante dans les coutumes et mœurs des premier.e.s croyant.e.s de l’islam.
Elle nous permettra de nous rappeler que le développement de l’islam permit de donner naissance à un nouvel art. Un art à la fois élaboré à partir de musique arabe préislamique, marquée à travers le temps par des contributions perses, byzantines, turques, amazighs et maures. Une telle fusion de styles qui fut rendue possible grâce à la place que l’art et la culture occupèrent, grâce au soutien et à leur maintien par les plus grand.e.s qui, à travers le temps, souhaitèrent s’en porter financièrement garant.e.s
Alors, si l’art et la culture furent si centraux durant des décennies dans l’histoire de l’islam, comment se fait-il qu’aujourd’hui, lorsque l’on tape « Islam & musique » dans un moteur de recherche, la majorité des articles sur le sujet viennent nous expliquer que la musique, la danse ou encore le chant seraient nécessairement à bannir ?

‘Arīb al-Ma’mūnīya naquit en 797 dans la ville de Bagdad, dans l’actuelle Irak. Elle était la fille du vizir Ja’far al-Barmaki, membre des Barmakids, et de l’une des domestiques de la famille, nommée Fāṭima. Le statut illégitime qui fut le sien lui valut une enfance plutôt instable et difficile. Son père, Ja’far al-Barmaki, refusa catégoriquement de la reconnaître publiquement. Il survenait certes durant ses premières années à ses besoins, mais laissa sa mère Fatima se charger de l’ensemble de son éducation.

Très vite, la situation se compliqua pour elle lorsque, âgée de 4 ans, sa mère Fatima tomba gravement malade et mourut. Ja’far, informé de la situation et refusant d’abandonner son enfant, fit le choix de la remettre à une famille chrétienne, famille à qui il confia la mission de son éducation. En contrepartie, Ja’far s’engagea à payer mensuellement le montant qui lui serait demandé.

Au sein de cette famille, la vie d’Arib devint plutôt paisible. Durant cinq années, à leurs côtés, elle apprit à lire, à écrire et se découvrit une passion pour les arts.

Simultanément, la situation politique et économique devint de plus en plus compliquée pour les Barmakids et par extension pour son père. Plus le temps passait, plus Ja’far se voyait en difficulté pour rémunérer la famille qui accueillait sa fille.

C’est ainsi qu’au bout de quelques impayés, Arib fut vendue à un certain Al Marakibi qui l’emmena à Basra. Chez lui, elle servit quelques années, mais Al Marakibi, la voyant éduquée et intéressée, lui fit enseigner l’art de l’écriture et de la grammaire. Arib réalisa alors ses premiers pas en tant que poète et passa une grande partie de son temps à rédiger, à composer. Avec l’expérience et le temps, elle commença aussi à chanter.

Ses textes étant profonds et sa voix envoûtante, Arib se fit rapidement remarquer.

A l’âge de 17 ans, elle retrouva sa liberté et commença à travailler pour le compte de certains vizirs. Elle occupait alors leurs palais et, le soir ou durant les festivités, Arib chantait et partageait sa douce poésie. De nombreux vizirs s’arrachaient ses services si bien qu’elle fut très vite reconnue comme étant l’une des musiciennes les plus talentueuses d’Iraq.

Avec une renommée si grandissante, c’est le calife abbasside Al Mamun en personne qui demanda à la rencontrer. Fasciné par son charisme et son talent et en admiration devant son art, Al Mamun proposa à Arib de l’héberger à la cour en échange d’interventions lors de festivités, de soirées ou de cérémonies. Arib accepta et s’installa donc à ses côtés.

Au sein du palais, Arib fut grandement inspirée et productive. Rassurée de ne plus avoir à se questionner sur comment elle gagnerait sa vie, elle passait le plus clair de son temps à l’écriture de chansons et à leur compilation.

Elle écrivit durant ses années au palais plus de 1000 chansons et poèmes compilés en plusieurs volumes.

Symbole de son talent et de sa créativité, Arib servit, après Al Mamum, les 9 califes suivants. Elle mourrut sous le règne de Al Mutadid, à l’âge de 96 ans. Arib aura donc servi au cours de sa vie un nombre considérable de vizirs et 10 des califes abbassides. Vivant au sein même de la cour, elle fut la musicienne la plus connue et reconnue du IXème siècle.

L’histoire d’Arib, j’aimerais la partager à toutes ces femmes, ces passionnées qui à un moment de leur vie ont douté ; douté de la légitimité, de leur talent ; douté de la possibilité de pouvoir à travers leur art s’exprimer.

A toutes ces femmes, à qui l’on a dit qu’islam et art étaient incompatibles, à toutes ces femmes à qui l’on a expliqué que pour être une « bonne » croyante, il faudrait nécessairement qu’elles choisissent entre leur passion et leur religion.

Mesdames, dites-vous que l’art a toujours existé et que l’islam a contribué à le faire évoluer. Un nombre important de textes, d’écrits, d’histoires sont aujourd’hui présents pour nous le rappeler, pour souligner que la grandeur de l’islam s’est avant tout construite sur la grandeur de sa culture.

S’en séparer, c’est laisser de côté cette part de beauté, c’est oublier ceux et celles qui nous ont précédées.

Crédit image à la une : Charlotte. Charlotte est une illustratrice passionnée de dessin et notamment par l’univers de la mode. Je vous laisse découvrir son univers :
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Femmes musulmanes dans l'histoire Portraits

Khadija : mécène de l’islam

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[Publié initialement le 15 mai 2019]
La femme dont nous allons parler aujourd’hui, je suis presque certaine que vous la connaissez, je suis presque certaine que vous l’avez même peut-être à plusieurs reprises déjà citée.
Cette femme est en somme la référence féminine musulmane. Elle fait partie des pionnières de l’islam; elle fut un soutien émotionnel, un soutien financier, un soutien politique; bref, ce genre de soutien inébranlable qui permet de transformer les visions en réalité, qui permet de rassurer, qui permet de réconforter, d’accompagner. Avez-vous deviné de qui nous allons parler ?
J’ai longuement hésité à faire figurer son histoire parmi les 30 femmes sélectionnées. Je partais du principe que son histoire était déjà trop relatée et que certainement bien d’autres femmes totalement oubliées méritaient davantage d’être racontées. J’ai finalement changé d’avis lorsqu’en cherchant à me documenter à son sujet, je n’ai trouvé que trop peu de sources lui rendant pleinement hommage, trop peu de sources rappelant à quel point cette figure fut incontournable, à quel point elle fut l’un des piliers majeurs du développement de l’islam des premiers temps, à quel point l’islam ne se serait pas si aisément diffusé si cette femme n’avait pas été.
J’ai finalement  été convaincue et ai pris la plume lorsque j’ai su que Khadija (qu’Allah soit satisfait d’elle) nous avait quitté.e.s lors de la dixième nuit du mois de Ramadan en l’an 620. Alors, j’ai commencé à rédiger en me disant qu’en cette 10ème nuit de Ramadan 2019, 1399 ans jour pour jour après, je tenterais modestement de lui rendre hommage dans des termes profonds, sincères et justes.

 

Concernant les sources, il y a à son sujet un réel avantage. L’avantage avec Khadija (Ase), c’est que depuis mon enfance, on me conte son histoire, on me rappelle à quel point cette femme fut exceptionnelle, à quel point elle devrait être pour moi un modèle.

J’ai donc voulu aujourd’hui relever un challenge. Ce challenge, c’est de vous raconter son histoire à travers mon regard, de la sublimer, mais surtout de l’appréhender sous un prisme quelque peu différent. J’aimerais aujourd’hui vous présenter Khadija (Ase) comme étant bien plus que l’épouse du Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui). J’aimerais vous montrer à quel point elle fut essentielle dans le cheminement de la révélation durant ces nombreuses années de répression. J’espère ne pas vous décevoir et qu’à la fin de cette lecture, vous repartirez avec, à son sujet, comme un nouveau regard.

C’est parti, sans plus attendre, rendons à Khadija (Ase) ses lettres de noblesse !

Khadija (Ase), connue également sous le nom de Khadijah bint al-Khuwaylid, naquit vers l’an 555 à la Mecque. Femme d’affaires et négociante, Khadija (Ase) faisait partie de ces puissant.e.s entrepreneur.e.s qui géraient d’une main de fer leurs relations commerciales. Face à cette femme dans les contrées voisines, naturellement un grand respect s’imposait.

Khadija (Ase) était une leader au sein de sa communauté et grâce à elle, un grand nombre de familles pouvait s’alimenter et subvenir à ses besoins. En effet, il semblerait que le nombre de caravanes que possédait Khadija (Ase) égalait, voire surpassait le nombre de caravanes que possédaient les autres commerçant.e.s de la tribu des Quraysh. Afin de faire proliférer son commerce, elle avait au sein de ses équipes un grand nombre de personnes à son service, en charge de vendre sa marchandise et de la faire transiter de la Mecque à la Syrie, puis de la Syrie à la Jordanie et au Yémen.

Parmi eux.elles, elle recruta un jeune homme âgé d’une vingtaine d’années. Ce jeune homme, orphelin de père et de mère, n’avait que peu de ressources financières. Il s’était présenté à elle, sollicitant son aide en échange de ses services. Motivé et compétent, Muhammad (pbl) prit très vite des responsabilités et devint l’un de ses hommes de confiance.

En plus d’être une brillante entrepreneure, Khadija (Ase) était également mère de famille. En effet, de ses deux précédents mariages, dont elle était à présent veuve, elle avait eu plusieurs enfants, dont l’un avait survécu et était à sa charge. Elle parvenait pourtant parfaitement à concilier ses affaires personnelles et professionnelles tout en venant en aide financièrement et matériellement aux nécessiteux.ses de son quartier.

Après quelques temps de travail aux côtés de Muhammad (pbl), marquée par la sagesse, la gentillesse et la patience de son jeune employé, elle fit savoir à l’une de ses proches amies, Nafaysa, qu’elle souhaitait l’épouser.

C’est ainsi qu’elle prit la responsabilité d’aller lui faire savoir qu’elle souhaitait avec lui fonder un foyer. Ce à quoi il répondit qu’il n’avait pas les moyens d’entretenir une famille, qu’il ne comprenait pas pourquoi elle s’intéressait à lui alors qu’un grand nombre de notables avaient déjà essayé et s’étaient pourtant vu repoussés.

En 595, alors âgée de quarante ans, Khadija (Ase) épousa Muhammad (pbl), qui lui en avait vingt-cinq. C’est ainsi que pour eux débuta une longue aventure de vingt-cinq années où ils furent ensemble grandement éprouvés. Quinze années après leur mariage, alors qu’ils étaient d’heureux parents et que leurs affaires prospéraient, les premières révélations divines se manifestèrent à Muhammad (pbl)… dans la douleur.

En effet, cela sonnait pour eux le début des premières années de difficulté. Muhammad (pbl) ne parvenait plus à trouver le sommeil, effrayé par les révélations qui lui étaient faites et dont il ne parvenait pas à saisir le sens. Alors qu’effrayé par l’état dans lequel il finissait par se convaincre qu’une sorte folie maladive le gagnait, Khadija (Ase) passait son temps à l’écouter, à le rassurer et à tenter de comprendre pourquoi tout cela se produisait. Ces premières années furent pour elle le début d’une patience et d’un soutien inébranlable de sa part.

A force d’écoute, de réflexion commune, et de bienveillance à son égard, elle finit par lui faire accepter sa destinée. Muhammad (pbl) avait été choisi comme messager de Dieu. Afin d’affirmer son soutien, Khadija (Ase) devint la première convertie de l’islam. Après avoir été pour son époux un soutien financier, elle devint également pour lui son premier soutien moral. Soutien qui permettra à l’un des hommes les plus importants de ce monde aujourd’hui de se construire et de s’accepter.

Mais ce n’était pour eux que le début des difficultés. En effet, le Prophète (pbl) commença à partager les révélations qui lui avaient été faites et à prêcher sa nouvelle religion. En quelques années, les adeptes furent de plus en plus nombreux.ses, issu.e.s de tous les clans et de toutes les catégories sociales.

Ainsi, face à cet engouement, les Mecquois.es, jusqu’alors polythéistes, tentèrent de stopper ce mouvement en réprimandant les nouveaux croyants. Ils.elles commencèrent dans un premier temps à infliger tortures et persécutions aux musulman.e.s les plus faibles, en les faisant notamment esclaves. C’était sans compter sur le soutien de Khadija (Ase), qui n’hésita pas à missionner quelqu’un pour aller acheter l’ensemble des nouveaux croyant.e.s alors mis.es en esclavage afin de leur rendre leur liberté. Les violences à l’égard des musulman.e.s ne cessaient de se renforcer et un embargo s’imposait à présent dans la ville de la Mecque.

En 616, tous.tes les commerçant.e.s de la Mecque avaient l’interdiction de vendre aux musulman.e.s quelconques denrées alimentaires. C’est ainsi qu’une fois de plus Khadija (Ase) prit la responsabilité de subvenir secrètement aux besoins de la communauté musulmane naissante, en se fournissant en eau et nourriture dans les contrées voisines. Elle joua ce rôle durant les quatre années d’embargo au terme desquelles elle décéda.

Des années encore après sa mort, elle restait une référence pour le Prophète (pbl) qui passait son temps à l’honorer, à la citer, à puiser ses ressources dans le souvenir de ce qu’elle était.

Au-delà d’être l’épouse du Prophète (pbl), Khadija (Ase) est un modèle de leadership féminin comme nous en trouvons peu ailleurs. Femme active, mère de famille, soutien infaillible pour sa communauté, Khadija (Ase), avant même de rencontrer Muhammad (pbl), était sur tous les fronts.

Après son mariage, elle continua sur cette lignée, notamment en appuyant la mission prophétique de Muhammad (pbl). Ses encouragements, sa patience, son aide et sa bienveillance aidèrent le Prophète (pbl) à croire en ses visions et ainsi à propager l’islam.

Plus qu’un soutien moral, Khadija (Ase) fut la référence pour Muhammad (pbl), elle fut son cap, elle fut sa boussole, elle fut la seule, elle fut l’unique. Elle fut son soutien financier du début de vie mais aussi du début de prophétie. Elle fut son soutien émotionnel lorsqu’il en avait besoin. Elle fut également et surtout un soutien pour l’ensemble des premier.e.s croyantes. En effet, en investissant sa richesse, elle permit aux premier.e.s musulman.e.s de faire face aux violences infligées par les Mecquois.es et ainsi au message de perdurer.

Rendons ses lettres de noblesse à Khadija (Ase) et acceptons que plus que l’épouse du Prophète (pbl), elle fut celle qui le nourrit, elle fut celle qui lui permit d’accepter la destinée qui lui était confiée, elle fut celle qui mit sa richesse à disposition durant les années de répression. Elle fit tout cela, alors si le message d’un berger devenu commerçant a pris une telle ampleur en 1300 ans, gardons avant tout à l’esprit que c’est avant tout le fait de cette femme !

Crédit image à la une : Sist’art. Ce n’est pas une mais 3 illustratrices que nous avons le plaisir de mettre à l’honneur aujourd’hui. Sist’art c’est l’histoire de 3 soeurs passionnées d’art et de dessins.
Pour découvrir leur univers, rendez vous sur instagram : @taekanddoart et @sistart.comics

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Communiqués

[Communiqué] Agression sexiste et islamophobe au Conseil Régional de Bourgogne Franche-Comté : notre soutien aux victimes est total

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Ces derniers jours ont été extrêmement douloureux pour nous, membres de Lallab.
Nous avons assisté, atterrées, abattues et horrifiées, à l’épisode tragique de cette mère, qui porte le voile, et qui s’est retrouvée prise à partie et agressée par un élu du Rassemblement National (RN) au sein du conseil régional de Bourgogne Franche-Comté où elle accompagnait la classe de son fils lors d’une sortie scolaire. Nous avons vu ces images d’un petit garçon qui a fondu en larmes dans les bras de sa maman, traumatisé et touché par les violences qui la visaient.

Avant toute chose, nous apportons tout notre soutien à cette mère, à son fils et à leur famille. Vous avez tout notre amour ! Nous sommes terriblement admiratives de sa force et de la tendresse avec laquelle elle a protégé son fils alors qu’elle était victime d’attaques si violentes. Nous sommes solidaires, unies et nous n’oublions pas !

Nous sommes également reconnaissantes de voir que nous, femmes musulmanes, continuons de participer bénévolement aux sorties scolaires. C’est grâce à la dévotion de ces mères que tous les enfants peuvent profiter de sorties. Et ce malgré les violences et les humiliations que nous vivons au quotidien et qui ont des conséquences lourdes sur nos vies, sur nos corps et nos santés mentales, ainsi que sur celles de nos familles et de nos enfants.

Si – une fois n’est pas coutume – des élus et la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations Marlène Schiappa ont témoigné leur soutien à l’égard de cette mère de famille agressée, nous ne sommes pas dupes. Nous avons vraiment le sentiment que cette condamnation a été faite uniquement parce que l’agresseur était d’extrême droite.

Car où se trouvaient ces élu.e.s de gauche comme de droite pour dénoncer le projet de lois de ségrégation visant à exclure les mères voilées du milieu scolaire ? Où se trouvaient ces élu.e.s lorsque des partis politiques (comme la France Insoumise) débattent encore du droit ou non d’être islamophobe ? Où se trouvaient ces élu.e.s lors de la retransmission irresponsable des discours de haine d’Eric Zemmour qui appelle à la guerre civile contre les musulman.e.s, sur une chaîne d’info continue (Cnews) ? Où se trouvaient ces élu.e.s pour dénoncer les mensonges islamophobes de Blanquer sur la déscolarisation des petites filles ? Où se trouvent ces élu.e.s, aujourd’hui, pour dénoncer l’incitation à la délation des enfants supposé.e.s musulman.e.s qui refusent de tenir la main à leur camarade du sexe opposé ? Où se trouvent ces élu.e.s, qui demandent aux universités de dénoncer leurs étudiant.e.s musulman.e.s ? Où sont-ils enfin quand le Ministre de l’intérieur Christophe Castaner appelle à la délation contre l’ensemble des musulmans pratiquants sous prétexte de lutte contre la radicalisation et le terrorisme, entretenant un amalgame lourd de conséquences pour ses citoyen.ne.s ?

Nous ne sommes donc pas crédules face aux politiques qui dénoncent à demi-mots le Rassemblement National (RN) mais qui oublient soudainement qu’ils ont eux-mêmes alimenté cette ligne de pensée islamophobe et participé au harcèlement médiatique et politique des femmes musulmanes qui portent le voile. Et ne nous y trompons pas, si cet évènement a été médiatisé, combien de mères vivent dans l’ombre cette même humiliation alimentée par un discours islamophobe ambiant ?

Cet énième épisode raciste et sexiste qui vise les femmes musulmanes nous effraie terriblement et pose de réelles questions sur l’avenir de ce pays ! Vers quelle société avançons-nous ? Celle où des enfants sont les témoins impuissants d’une humiliation qui vise leurs parents ? Celle où le moindre soupçon à leurs égards les fragilisera et les rabaissera ? Celle où ils auront toujours le sentiment d’être rejeté.e.s pour ce qu’ils et elles sont ?

A Lallab, nous dénonçons l’acharnement sexiste, raciste et islamophobe de la classe politique qui, avec la complicité des médias, contribue à banaliser un discours xénophobe visant les musulman·e·s. Nous ne voulons pas d’une société de vigilance qui n’est rien d’autre qu’une incitation à la délation raciale. Les « petits riens qui deviennent des grandes tragédies », comme le dit Macron, semblent surtout acter d’une « traque aux musulman·e·s » en les faisant passer pour des terroristes, et ce pour n’importe quel détail lié à leur pratique religieuse, lequel sera automatiquement jugé suspect.

Port de la barbe, pratique exacerbée lors du ramadan, refus de faire la bise, présence de la tabâa sur le front, refus de tenir la main à une fille à l’école, autant d’éléments plus invraisemblables les uns que les autres mais qui seraient des signes de radicalisation pour nos politiques. Ces discours alimentent une paranoïa collective sur les musulman·e·s et témoignent avant tout de l’ignorance abyssale de notre gouvernement sur les questions de lutte contre le terrorisme et la radicalisation. Aujourd’hui, des innocent.e.s paient déjà le lourd tribut de cette politique de la délation : discrimination à l’embauche, licenciements, mises au placard, discriminations à l’éducation, à l’accès aux loisirs, voire pire, agressions, et tentatives de meurtre.

Ce climat de surveillance stigmatise une partie de notre population, une fois de plus érigée en bouc-émissaire, et se développe à une vitesse inattendue. Nous voyons en France mais aussi à l’étranger les conséquences d’une islamophobie exacerbée : un million de musulman.e.s interné.e.s dans des camps de concentration pour Ouïghour.e.s en Chine, le muslim ban aux États Unis, le génocide des Rohingyas en Birmanie, la perte de nationalité des musulman.e.s en Inde, la persécution des musulman.e.s en Centrafrique, en Ouzbékistan, l’attentat islamophobe en Nouvelle-Zélande… La montée du terrorisme d’extrême droite islamophobe nous montrent que ce climat délétère a des conséquences dramatiques, qui nous terrifient.

Nous demandons aujourd’hui que des mesures fortes soient prises par les politiques et la justice contre l’islamophobie en France. Nous leur demandons de condamner l’agression que cette mère et son fils ont vécue et de sanctionner Julien Odoul, qui a enfreint les règles et créé un trouble à l’ordre public. Nous en appelons aussi à la responsabilité des médias, qui participent à nourrir ce climat de terreur. Nous leur demandons de ne pas donner de tribune à des multi-récidivistes de la haine raciale, de ne pas alimenter le racisme et le sexisme à l’endroit des musulman·e·s et d’assumer le rôle qu’ils entretiennent dans le développement de ce climat nauséabond.
 
Les Lallas
 
 

Crédit photo : CCIF

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Communiqués

[Communiqué] L’islamophobie tue

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Nous sommes pleines de colère et de tristesse en découvrant cette nouvelle agression d’une violence sans nom.
 
Hier, une femme a été poignardée en pleine rue, sous les yeux de sa famille, par un homme. Son seul tort ? Elle portait un foulard. L’islamophobie BLESSE et TUE, tous les jours.
 
Il sera toujours temps demain de réagir au traitement médiatique à deux vitesses des attaques terroristes islamophobes jamais désignées comme telles, de dénoncer l’obstination avec laquelle ces mêmes médias s’empressent de justifier ces actes en masquant le racisme des agresseurs derrières des motifs psychologiques (le criminel serait « dépressif » apprend-on), et de s’indigner face à l’absence totale de réactions étatiques.
 
Mais pour l’heure, toutes nos pensées vont vers cette sœur, actuellement hospitalisée dans un état grave, vers ses proches, ses enfants en bas âge, et vers toutes celles qui vivent au quotidien l’insécurité dans un pays qui refuse d’ouvrir les yeux face à la violence qu’il impose aux femmes musulmanes.
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Femmes musulmanes dans l'histoire Portraits

Hürrem Sultan : d’esclave à sultane

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Il est des personnalités qui en l’espace de quelques années parviennent à remettre en question un ordre étant établi depuis bien longtemps déjà. La femme dont nous allons parler aujourd’hui fait partie de celles-là.
En l’espace de quelques années et bien qu’au prix de plusieurs violences subies, Hürrem Sultan parvint à faire évoluer le regard porté sur les femmes en politique au sein de l’Empire. Ses talents, son courage, sa détermination et son amour propre permettront d’ouvrir la voie à une lignée importante de femmes sultanes après sa mort.

 
Fille d’un prêtre orthodoxe, c’est vers 1504 qu’Aleksandra Lisowska naquit au sein du territoire de la Ruthénie, dans le royaume de Pologne, situé dans l’actuelle Ukraine. Elle vécut une enfance joyeuse auprès de ses parents et sa sœur. A l’âge de 15 ans, Aleksandra se fiança à l’un de ses amis d’enfance. Quelques semaines plus tard, à la suite d’un raid tatar dans sa région, elle assista, impuissante, au massacre de sa famille et de ses proches. Quant à elle, elle sera faite prisonnière et sera vendue en tant qu’esclave au sein de l’empire ottoman, à Constantinople.

En 1520, Aleksandra fut probablement offerte en guise de présent au Sultan Suleiman quelques jours après son accession au trône. Elle n’avait alors que 16 ans. Très vite, son fort caractère et son ton désinvolte et enjoué lui valurent le surnom de « Hürrem », signifiant littéralement la joyeuse. C’est en 1521, qu’elle donnera naissance à son premier fils.

Aleksandra devint rapidement favorite du roi, et occupa une place centrale dans la vie du palais. Les faveurs que le Sultan lui faisait et les poèmes qu’il lisait publiquement à son attention, déclenchèrent les jalousies au sein du harem. Bientôt, le souverain délaissa ses autres concubines et fit le choix de vivre pleinement sa relation avec Hürrem. C’est ainsi qu’en 1534, Hürrem fut officiellement affranchie. A la suite de son affranchissement, Hürrem se convertit à l’islam et fit le choix de s’écarter du sultan Soliman, rappelant à ce dernier que toute relation sexuelle hors mariage était proscrite par sa foi. Face à cet éloignement et aux remarques de cette dernière, Suleiman le Magnifique demanda sa main et l’épousa, faisant donc d’Hürrem son unique épouse, brisant par là des siècles de tradition. En effet, jamais dans l’Empire Ottoman auparavant une esclave avait été élevée au rang de sultane. Dans les années qui suivirent, ensemble, ils eurent 4 garçons.

La relation entre Hürrem Sultan et son conjoint étant fusionnelle et les talents politiques de cette dernière étant reconnus, Hürrem Sultan commença à jouer un rôle politique centrale dans la vile politique de l’Empire Ottoman.
Ses talents de diplomate lui valurent notamment le titre d’Haseki, sultane consort. Elle sera la première à porter ce titre et permettra d’ouvrir la voie à une longue lignée de sultanes après sa mort. Conseillère principale de son époux, elle interviendra fréquemment dans les affaires d’Etat, et plus spécifiquement en politique étrangère où elle échangera avec d’autres souverains notamment pour négocier des terres. Elle tâchera également d’accompagner son conjoint lors de ses différentes tournées.

Son influence devint telle que sa présence au sein des affaires de l’Etat fut décisive. Tous ses talents et qualités firent d’elle l’une des femmes les plus puissantes de l’empire ottoman. Avec les budgets qui lui furent confiés, Hürrem Sultan devint également philanthrope en construisant des madrasas, des mosquées, des hammams et même des hôpitaux pour femmes là où le besoin se fit sentir. À Jérusalem et La Mecque, elle fonda de grands complexes caritatifs en capacité d’accueillir les pèlerins ou voyageurs. Grâce à cela, plus de 1000 personnes dans le besoin furent nourris et logés quotidiennement.

Parallèlement à ses implications politiques et caritatives, Hürrem se donna pour mission de construire un certain nombre de bâtiments publics dans les villes les plus visitées. Jusqu’à ses dernières heures, Hürrem Sultan milita pour plus de justice et d’équité au sein du sultanat. Son aura politique lui vallut d’une part un grand nombre de victoires politiques et diplomatique et d’autre part d’être reconnue dans le monde entier.

C’est en avril 1558 qu’elle décéda et fut enterrée dans un mausolée adjacent à celui de son conjoint, dans la mosquée portant son nom.
 
Retracer l’histoire de femmes musulmanes ayant remis en question l’ordre établi me donne force et espoir.
En lisant au sujet de Hürrem Sultan, en rédigeant sa biographie, un sentiment de quiétude me gagna.
Je nous imaginais, nous femmes musulmanes contemporaines unies et réunies partageant le même but commun : celui de questionner et d’argumenter pour obtenir plus d’équité et d’égalité au sein des institutions religieuses de nos pays.
Je nous imaginais nous organiser, nous replonger dans le passé pour construire un argumentaire si solide que personne, pas même une horde de « savants » misogynes, ne pourrait remettre en question.
En rédigeant l’histoire de Hürrem Sultan, cela me parut si accessible, si possible que je me perdis durant quelques minutes, heures dans mes pensées, à rêver de cette société, qu’ensemble nous pourrions créer !
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Femmes musulmanes dans l'histoire Portraits

Jahanara Begum : princesse des princesses

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Lorsque j’ai commencé ce projet, jamais je n’aurais cru pouvoir être tant inspirée par ces femmes du passé.
De jour en jour, de recherche en recherche, d’article en article, je prenais petit à petit conscience que les rôles modèles que je découvrais jouaient un rôle fondamental dans le développement de mon inspiration, de ma confiance en moi et de mes perspectives d’avenir.
En partant à la rencontre de ces femmes, je ne savais pas vraiment comment l’exprimer mais je ressentais comme un soupçon de fierté rien qu’à l’idée de savoir qu’elles avaient existé. Je prenais conscience que l’historiographie basée sur les interdits et les « rappels » de nos droits et devoirs pouvait facilement être inversée et rectifiée. Il y avait en fait tant à dire, tant à écrire, tant à reconstruire sur le sujet. Je m’imaginais offrir à mes filles et à mes petites fille une histoire plus égalitaire, une histoire plus juste et une histoire évitant toutes frustrations et questionnements existentiels. Grâce à des femmes qui, à travers leurs parcours et histoire, permettent d’allier sereinement spiritualité et égalité, passion et ambition.
Jahanara Begum fait partie de ces femmes. Ces femmes qui, en plus d’être talentueuses, possèdent une grandeur d’âme sans égal.

 
C’est le 23 mars 1614 que naquit Jahanara Begum. Fille aînée de l’empereur Shah Jahan et de son épouse Mumtaz Mahal, elle était également la sœur des princes héritiers Dara Shikoh et Aurangzeb.

Shah Jahan y tenait : parmi ses enfants, filles comme garçons recevraient une éducation de qualité et poussée. C’est ainsi que l’éducation de Jahanara fut confiée à la sœur du célèbre poète Talib Amuli, Sati al Nisa Khanam. Elle lui enseigna durant ses premières années l’apprentissage et l’étude du Coran, la littérature persane, la médecine, l’écriture et la poésie. Jahanara partageait ces cours avec un grand nombre de membres de sa famille. Ensemble, elles lisaient, se formaient à la poésie et à la peinture et confrontaient leurs idées.

Dans l’esprit familial, il était tout aussi important d’entretenir l’esprit que le corps. Jahanara apprit donc à jouer aux échecs, au polo et fut même formée à la chasse. Pour assouvir sa soif de savoir, elle avait accès à la bibliothèque de l’ancien empereur Akbar. Sa bibliothèque regorgeait de livres sur les religions ou encore de livres de littérature persane, turque ou indienne.

Une étape centrale vint marquer la vie de Jahanara et la changea à tout jamais. Alors qu’elle n’était âgée que de 17 ans, elle perdit sa mère prématurément. A la surprise générale et bien que son père avait plusieurs épouses, Jahanara fut nommée première dame, Padshah Begum.

Déjà avant le décès de sa mère, Jahanara exerçait une influence politique majeure aux côtés de son père. Son intelligence, sa patience et sa diplomatie lui valurent d’être la fille préférée de son père. A présent, Jahanara avait donc pour mission de s’occuper de ses frères et sœurs mais également de soutenir son père endeuillé qui, face à la difficulté, arrivait à peine à gouverner.

Durant cette période, il lui donna les pleins pouvoirs et suivit fréquemment ses conseils. Il lui confia d’ailleurs la responsabilité du sceau impérial. L’admiration que Shah Jahan avait pour sa fille se reflètait dans les multiples titres qu’il lui attribuait. Parmi lesquels Sahibat al-Zamani (Femme mature) et Padishah Begum (Femme empereur) ou Begum Sahib (Princesse des Princesses).

Son pouvoir était tel que, contrairement aux autres princesses impériales, elle fut autorisée à vivre dans son propre palais, en dehors des limites du Fort d’Agra bien que n’étant ni mariée, ni fiancée. Grâce aux différentes dotations versées par son père et l’héritage de sa mère, la princesse Jahanara était très riche. Femme entrepreneure, elle avait le sens des affaires et su faire croître ses revenus.

Elle possédait plusieurs navires qui faisaient les navettes entre Surat et la Mer Rouge. Elle exerça également une activité dans le négoce en entretenant notamment des relations commerciales avec les Anglais et les Néerlandais. Mais hors de question pour elle de gaspiller son argent ou de le dépenser à mauvais escient ! Jahanara était connue pour son rôle actif dans la prise en charge des pauvres et le financement de construction de mosquées.

En tant que reine principale de facto de l’empire moghol, Jahanara était responsable des dons de bienfaisance. Elle organisait en ce sens des offrandes et y consacrait des journées entières. Elle milita ainsi pour lutter contre la famine et pour aider au financement des pèlerinages à La Mecque.

Elle se donna également pour mission de contribuer financièrement aux actions en faveur de l’apprentissage et des arts. Elle paya la publication d’une série d’ouvrages sur le mysticisme islamique, comprenant des commentaires sur le Mathnawi de Rumi, un ouvrage mystique très populaire parmi les Indiens moghols.

Dans la ville de Agra, elle est aujourd’hui connue pour avoir parrainé la construction de la mosquée Jami Masjid, située au cœur de la vieille ville. Elle y fonda également une madrasa destinée à la promotion de l’éducation.
Tout ceci fut financé par Jahanara à partir de ses indemnités personnelles.

Avec son frère Dara Shikoh, elle fut l’une des seul.e.s descendant.e.s de Timur à avoir adopté le soufisme. Le mollah Shah Badakhshi l’initia à l’ordre de Qadiriyya Soufi en 1641. Jahanara Begum fit de tels progrès sur la voie soufie que Mollah Shah souhaitait la nommer à la succession de la Qadiriyya, même si finalement ceci ne se fit pas.

Son père, Shah Jahan, tomba gravement malade en 1657. Cette maladie déclencha une guerre de succession entre ses quatre fils, Dara Shikoh, Shah Shuja, Aurangzeb et Murad Baksh.

Pendant la guerre de succession, Jahanara prit part pour son frère Dara Shikoh, héritier légitime. Mais face aux hommes d’Aurangzeb, celui-ci fut vite mis en déroute et s’enfuit vers Delhi.

Shah Jahan demanda à Jahanara d’utiliser sa diplomatie féminine pour mettre fin à cette guerre fratricide. En juin 1658, Aurangzeb assiégea son père Shah Jahan au Fort d’Agra, le forçant à se rendre sans condition en coupant l’approvisionnement en eau. Jahanara se rendit à Aurangzeb le 10 juin pour proposer une partition de l’empire. Selon son plan, Dara Shikoh se verrait attribuer le Pendjab et les territoires adjacents ; Shuja aurait le Bengale ; Murad aurait le Gujarat ; le fils d’Aurangzeb, le Sultan Muhammad, obtiendrait le Deccan ; et le reste de l’empire irait à Aurangzeb. Mais Aurangzeb rejeta la proposition de sa sœur, refusant toute collaboration avec Dara Shikoh, qu’il jugeait infidèle.

Lors de l’ascension d’Aurangzeb sur le trône, Jahanara rejoignit son père en prison au Fort d’Agra, où elle se consacra à ses soins jusqu’à sa mort en 1666.

Après la mort de leur père, Jahanara et Aurangzeb se réconcilièrent et cette dernière redevint conseillère politique. Son frère la nomma Princesse des princesses et de nouveau première dame.
 
Du début jusqu’à la fin de sa vie, Jahanara fut appréciée et reconnue pour les talents qu’elle possédait en tant que diplomate et personnalité politique. Elle accompagna les différents hommes de sa famille dans leur accession au pouvoir et les aida à trouver les combinaisons qui leur permirent de régner avec le soutien et le consentement du peuple.

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