Pas d’argent, pas de valeur… Vraiment ?

par | 2/03/22 | (Dé)construction

Une jeune femme de 24 ans, son master en poche, passe à la maison les quelques mois avant sa première embauche. Une mère de 4 enfants, affectueuse et dévouée, a passé une quinzaine d’années au foyer, tâchant de répondre aux besoins de ses enfants. Une autre, fraîchement diplômée de sa licence de psy, prend une année sabbatique pour réfléchir à son orientation. Une autre encore fait une « pause » dans sa carrière professionnelle pour se marier et ainsi mieux endosser ce nouveau rôle d’épouse.

Elles ont des choix de vie différents, sont à des étapes différentes de leur croissance personnelle, mais toutes ont un point commun : si on leur lance d’un ton détaché « tu fais quoi alors ? / …en ce moment ? / …dans la vie ? ». Il est probable qu’elles répondront « bah rien », l’air embarrassé, le visage rougissant, le regard fuyant. 

         Pourtant c’est loin d’être le cas !

Elle se lève chaque matin aux aurores, s’extirpe du confort de son lit pour son premier rendez-vous avec le Divin. Elle réveille les enfants, les habille, invoque toute la patience de l’univers lorsque le petit dernier rechigne à avaler ses céréales à 8h17 alors qu’elle doit le déposer à l’école à 8h25. Elle fait de sa maison un endroit où il fait bon vivre : dépoussiérer par-ci, épousseter par-là. Elle range les vêtements qui tapissent le sol de la chambre de son adolescente, qui, à 15 ans, n’a toujours pas compris le principe d’une armoire. Farine, eau, sel, elle prépare les ingrédients nécessaires pour faire du pain maison. A 14h, elle se dépêche, au risque d’être en retard à son atelier de lecture. Oui, et puis sa grand-tante âgée lui a demandé un coup de main pour trier ses vêtements, alors elle va lui prêter main forte. Fort heureusement, les courses sont déjà faites, elle a pris l’initiative de s’en débarrasser la veille. Après le retour de l’école, elle endosse le rôle de maîtresse : elle aide son fils à faire ses devoirs même si elle doit lutter face à Bob l’éponge pour capter son attention volatile. Un imprévu tombe le lendemain avec la belle-famille… Tant pis pour ce colloque auquel elle voulait assister sur Paris. Même couchée, elle continue de travailler : elle est gestionnaire et passe en revue les tâches à accomplir pour le lendemain…

        

         Mais alors d’où vient ce malaise à confesser ce « rien » qui est en réalité « tout » ?

En réalité, ce qu’elle fait est très semblable à ce que fait un-e boulanger-e, une femme de ménage, un-e auxiliaire de vie, un-e professeur-e particulier-e, un-e gestionnaire, un-e chercheu-r-se, un-e personnal shopper, etc… Après tout, comme le.a boulanger-e, elle mélange les mêmes ingrédients, elle produit le même pain. À la différence que le.a boulanger-e facture 1 euro au consommat-eur-ice, tandis qu’elle fait cela gratuitement. Le travail de l’un est comptabilisé dans le Produit Intérieur Brut (PIB), tandis que pour l’autre, c’est du travail invisible. Pourtant, elle produit tout de même de la richesse !

         Cela n’a pas grande importance pour une société qui fonde la valeur sociale d’une chose sur son aspect monétaire. Tu es infirmièr-e et tu changes les pansements de tes patient-e-s tous les matins ? Ton activité est socialement valorisée. Tu es maman et tu panses le genou de ton enfant blessé ? Ça ne compte pas.

         Le but ici n’est pas de dévaloriser le travail extérieur féminin ! Celles qui cumulent un emploi à temps plein – ou temps partiel – en plus de toutes leurs tâches domestiques du quotidien sont des battantes. Il s’agit plutôt de revaloriser ce qui n’est pas considéré par notre société marchande.

Alors non, le travail et l’emploi ne se superposent pas : le travail ne se réduit pas à l’emploi. Non, tu ne fais pas « rien », au contraire : tu fais tout ! Et prends bien conscience que ce que tu fais, si tu ne le fais plus, un-e professionnel-le devra s’en charger moyennant salaire.

 

         Parlons salaire justement !

Dans la sourate « Hûd » du Coran (nom du prophète des Aad), on peut lire les paroles de ce prophète qui s’exprime en ces termes  : « Ô mon peuple, je ne vous demande pas de salaire pour cela. Mon salaire incombe à Celui qui m’a créé. Ne raisonnez-vous pas ? » [Sourate Houd/11 _ verset 51].

         Tout travail mérite salaire ! Sache que si tu ne perçois rien ici-bas, Dieu se fait un devoir de te rémunérer dans l’Au-delà. Si aujourd’hui tu envies le salaire mondain des autres, sache que demain, tous t’envieront ton salaire divin. Lorsque Dieu rémunère, Il est Généreux comme personne. Tu es payée même si tu ne le vois pas. La seule différence, c’est qu’au lieu de tomber tous les mois, ta rémunération tombera en un seul versement à la fin de ta vie de travail. Ça vaut le coup d’attendre non ?

Dieu dit dans le Coran : « Certes, Dieu a acheté aux croyants leurs personnes et leurs biens en échange du Paradis. (…) Réjouissez-vous donc du commerce que vous avez fait. Et c’est là le très grand succès ! » [Sourate at Tawba _ verset 111]

 

R.S.

 Crédits photo : R.S.

 

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