Djihene Abdellilah : une femme, une histoire, des combats, et des victoires

par | 4/05/22 | Portraits

Djihene Abdellillah est une femme qui a fait de son corps sa force, de sa vie un combat et de ses épreuves des victoires. Sportive de haut niveau elle a toujours su trouver sa place dans un monde masculin. Ce monde d’homme où la femme doit s’imposer, qu’elle a su changer par sa force physique, sa force de caractère et son mental. Une femme engagée qui écrit son histoire et nous apprend à nous, étudiant.e.s à trouver notre place ; à nous, femmes, musulmanes ou non, racisées ou non, à nous imposer, à nous battre tous les jours pour nos droits et nos libertés, et faire entendre nos voix.

Djihene est passionnée de sport depuis son plus jeune âge, un milieu dans lequel elle grandit, trouve peu à peu ses marques et prend sa place. Elle découvre le sport de combat lors de ses études supérieurs et devient une passionnée de boxe, de MMA et de Grappling. Des arts martiaux qui deviennent rapidement sans secret pour elle et dans lesquels elle excelle et y remporte une dizaine de titre dont le titre de championne du monde de Grappling en 2014 et championne de France de MMA. Malgré des problèmes de santé qui auraient pu l’empêcher de réaliser ses rêves et d’accéder à ces championnats, et face à des médecins catégoriques, lui disant de faire une croix sur le sport, sa force et sa résilience la pousse à participer aux championnats qu’elle remporte haut la main. « On ne nait pas vainqueur on le devient. » Ainsi, cette phrase prend tout son sens. Elle est considérée comme précurseure des sports de combats en France et marque l’histoire du sport, mais aussi l’histoire de l’enseignement car elle est la première à avoir introduit et enseigné les sports de combat dans les lycées et les universités- la Sorbonne notamment.

« On ne nait pas vainqueur, on le devient »,

Djihène

Femme sportive mais aussi très engagée sur la question des violences faites aux femmes, Elle crée en 2020 la Djihene Academy. Une association qui a pour objectif de démocratiser la pratique des sports de combat dans les milieux féminins. A travers cet engagement, elle veut redonner du pouvoir aux femmes en leur apprenant des techniques d’auto-défense pour pouvoir faire face à de quelconques agressions. Un engagement qui consiste à redonner la place aux femmes dans l’espace publique, leur redonner confiance en elle et leur montrer que même dans cet univers très masculin et fermé par la société, les femmes ont leur place autant que n’importe qui. Elle est engagée aussi sur d’autres causes féministes comme l’endométriose, au sein de l’association Endomind, pour qui elle est marraine. Une cause qui lui tient à cœur et pour laquelle elle s’engage afin de sensibiliser la société sur les questions de santé en démocratisant et faisant connaître la maladie de l’endométriose tout en permettant des recherches sur cette maladie encore méconnue du grand public et à laquelle nous ne donnons pas assez d’importance.

« Cette opération me permet de réunir deux choses qui me tiennent à cœur : la place des femmes dans la société et puis la pratique du sport comme élévation sociale » –

Djihene

Avec un parcours aussi inspirant qu’enrichissant, Djihene est l’une des premières femmes racisées que je découvre dans le milieu du sport, en tant qu’étudiante. Je la rencontre à la Sorbonne, où elle a été ma professeure pendant quelque mois. J’ai alors découvert une femme imposante qui nous pousse à donner le meilleur de nous-mêmes et surtout à dépasser nos limites. Elle devient pour plusieurs étudiant.e.s un modèle de femme puissante, auquel j’ai pu m’identifier. Elle nous fait découvrir, nous partage et nous transmet sa passion à travers ses cours. Au-delà de la technique, des méthodes et du sport, elle nous transmet aussi son état d’esprit, nous apprend à nous imposer, à prendre la parole et de la place tout en étant performant et en donnant notre maximum, sans jamais lâcher.

« Mon métier […] c’est d’accompagner mes élèves dans leurs projets, pour moi c’est super important » – Djihene

Je l’ai aussi rencontrée à des ateliers d’auto-défense physique, lors des lallabday . C’est lors de ces ateliers que j’ai découvert la seconde casquette de Djihene : son engagement pour la cause des femmes. Une femme douce mais tout aussi déterminée qui a su mettre des mots sur des problèmes que vivent les femmes au quotidien dans nos sociétés. Elle nous a mis face à notre réalité pour mieux comprendre la raison de cet atelier. Djihene nous a appris des techniques d’auto-défense assez simples et facilement réalisables mais elle nous a surtout appris à occuper l’espace, à nous imposer et ne pas avoir peur face à de potentiels agresseurs, parce que nous sommes capables de nous défendre. Car se défendre c’est aussi prendre conscience de son corps et de sa force. La peur doit changer de camps, la société aussi.

Crédit photo : @chrisetnico