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Quelle place pour les Femmes musulmanes dans la production et transmission des savoirs religieux ? Partie 3

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Tisser les fils de la mémoire collective et lire dans le silence de nos sources

Retrouvez ici la partie 1 et la partie 2 de cet article
Quelle fut la place des femmes musulmanes dans la production et la transmission des savoirs religieux ? Dans quelle mesure ont-elles participé à la transmission des ahadiths (paroles et actes rapportés du Prophète Mohammed), quel rôle ont elle joué dans les processus de raisonnement juridiques (fiqh), dans l’enseignement et la gestion des écoles religieuses, mais aussi dans la guidance spirituelle ? Quelles étaient les spécificités de leurs contributions ? Comment peut-on identifier et lire les sources historiques pertinentes ? Comment lire dans le silence des sources textuelles, et faire ressortir la voix et l’expérience de ces femmes dans textes majoritairement écrits par des hommes ? Que nous disent les efforts intellectuels de ces femmes musulmanes sur notre époque et notre rôle dans la production et la transmission des savoirs religieux.

 

Les limites dans la transmission des savoirs

Dans les parties précédentes, j’ai abordé quelques exemples des façons dont les femmes musulmanes ont contribué dans la production et la transmission des savoirs religieux en tant que muhadithates (transmetteuses de hadith), faqihates (juriste, savante en fiqh), muftiyates (donnaient des opinions juridiques), wa’izates (prédicatrices) et sufiyyates (guides spirituelles) dans la période prémoderne des sociétés islamiques (7e siècle jusqu’à la fin du 18e siècle). Quelles sont les limites de cette brève description ?

Tout en contrastant les lectures orientalistes du rôle des femmes dans les sociétés musulmanes, il faut garder un esprit critique et noter quelques limites :

• La plupart des femmes que j’ai cité faisaient partie des classes supérieures, d’une élite intellectuelle, et étaient pour la grande majorité filles de savants et d’éminents juristes.

• La période que j’ai couverte est une époque où les sociétés musulmanes étaient fondées sur des structures sociales profondément inégalitaires, en termes de classe, mais qui reposaient également sur l’esclavage. Les savoirs produits et transmis par les hommes et les femmes des classes populaires ainsi que par les musulman.es réduites à l’esclavage ne sont pas pris en compte dans ces sources textuelles ; à l’exception des exemples d’esclaves affranchis comme Rabi’a.

• Aussi, si les femmes que j’ai citées pouvaient enseigner dans les maisons, les rues et les mosquées ; elles restaient cantonnées au milieu informel. A quelques exceptions près, elles n’ont pas occupé de positions officielles auprès des institutions juridiques ou politiques.

 

Quelles leçons en tirer pour notre époque ?

Etant donné que leurs compétences et autorité scientifique étaient respectées, l’exclusion des femmes dans ces positions n’étaient pas due à un interdit religieux ou à un rejet sociétal, mais bien à des logiques de pouvoir et de domination patriarcale. Ces logiques de domination perdurent jusqu’aujourd’hui dans les institutions étatiques et religieuses, et bien évidemment cela va au-delà des contextes musulmans.

On peut se demander donc :

• Si les femmes dans les sociétés musulmanes prémodernes pouvaient répondre aux critères très exigeants de production et de transmission du savoir religieux, et même exceller dans ce domaine ; et s’il n’existe aucun interdit religieux pour qu’elles étudient, interprètent, transmettent, prêchent aux hommes et aux femmes ;

• Pourquoi la présence des femmes et leur leadership dans les sphères religieuses islamiques posent elle problème aujourd’hui ?

• Pourquoi l’héritage qui nous est transmis se concentre uniquement sur la piété, l’obéissance et la pudeur des femmes du prophète et des sahabiyates, et

• Pourquoi n’est-il jamais fait mention de ces femmes érudites, de leurs débats constructifs avec les autres savants, de leurs désaccords, de leur leadership etc… ?

 

Lire dans le silence des sources textuelles pour faire ressortir la voix des femmes

Comment devons-nous appréhender ces sources, ces biographies majoritairement écrites par des hommes, et comment pouvons-nous faire ressortir la voix et l’expérience des femmes de ces textes androcentrés ?

Pour apporter quelques éléments de réponse à cette question je me repose sur les travaux de Omaima Abou-Bakr, et notamment son article Rings of Memory où elle pose la question de l’invisibilité textuelle des femmes dans cette histoire documentée par des hommes. Les autres travaux sur le sujet que je vous conseille de lire sont ceux Leila Ahmed et de Mohja Kahf.

Crédit photo : Capture de la vidéo sur les Muhaddithat réalisée par Norhayati Kaprawi 

Il faut savoir que les mêmes questionnements ont été soulevés par des historiennes féministes spécialisées sur le Moyen-âge en Europe comme Ruth Evans. Comment penser les liens entre l’Histoire et l’historiographie, la réalité et la représentation. Ruth Evans parle par exemple de « ventriloquie » (ventriloquism) et met l’accent sur le rôle joué par les auteurs, masculins, ces ventriloques, dans la construction sociale des femmes dont ils relatent les faits, faits qui sont des représentations biaisées de la réalité.

Lorsque l’on explore ces sources, il faut donc garder à l’esprit les limites :

• Les descriptions des femmes dans les dictionnaires bibliographiques sont souvent brèves et les auteurs, des hommes, ont sélectionné ce qu’ils considéraient importants pour la postérité, comme le caractère moral, la piété etc.. ;

• Ces auteurs ne s’intéressaient pas aux questions d’émancipation des femmes ni au rôle joué par le genre dans l’accès à l’éducation et au savoir ;

• Enfin ces sources ne prennent pas en compte les préoccupations des femmes, leur vie quotidienne et leur routine, éléments que l’on ne peut que deviner en lisant dans le silence des sources, ou en faisant un travail de recherche dans l’histoire orale.

Il faut donc se poser plusieurs questions en appréhendant ces textes :

• Quelle représentation de la femme en question est véhiculée et est-ce que cela correspond à la réalité? (en comparant avec d’autres écrits et en prenant en compte les facteurs historiques, leur milieu social etc..)

• Qui sont les auteurs et en quoi l’image qu’ils peignent de cette femme peut servir les objectifs et les représentations véhiculés par leur environnement socio-historique ?

En d’autres termes ces sources textuelles nous informent sur la construction sociale et culturelle mais ne peuvent pas être considérées comme des représentations exactes des réalités vécues par ces femmes.

Pour Omaima Abou-Bakr, les œuvres conservées, même écrites par des hommes, sont une source d’information inestimable. Il faut néanmoins renverser la dynamique, de textes écrits sur les femmes à des textes écrits par les femmes. Pour cela elle suggère de creuser dans la mémoire écrite et orale, pour créer ce qu’elle appelle une « visibilité textuelle » des femmes musulmanes dans l’Histoire.

Rendre la visibilité textuelle aux femmes du passé est essentielle pour ré-affirmer la légitimité des femmes musulmanes aujourd’hui, à participer dans la transmission et la production de savoirs religieux. Je vous invite donc à lire ces sources à la lumière de nos contextes actuels, afin de tisser les fils de la mémoire collective entre les générations du passé et celles du présent.

Conclusion

Enfin, je ne pouvais pas finir cette intervention sans évoquer mes héroïnes contemporaines, celles sans qui je n’aurai pas été dans la mesure d’aborder ce sujet aujourd’hui, Omaima Abou Bakr, Mulki-Al Sharmani, Ziba Mir-Hosseini, Zainah Anwar, Jana Rumminger, amina wadud, Marwa Sharafeldin, Hala Al Karib, Zahia Jouirou, Asma Lamrabet et toutes les autres femmes avec qui j’ai la chance de travailler au quotidien à Musawah, mais également d’autres figures qui m’inspirent dans leurs écrits telles que Fatima Mernissi, Mohja Kahf et bien d’autres.

Je pense aussi à ces femmes qui aujourd’hui investissent les sphères du savoir religieux, notamment au réseau de savantes indonésiennes, ALIMAT qui a lancé pour la première fois, un majliss de fatwas émises par des femmes pour les femmes.

Pour finir, je souhaite aussi rendre hommage à toutes les femmes qui m’entourent, à mes grand-mères qui bien qu’elles ne soient pas lettrées sont des puits de sagesse et de savoir, à cet héritage oral transmis par nos mères, par nos tantes, par nos sœurs de sang mais aussi nos sœurs de lutte, héritage que nous nous efforçons de nous réapproprier et que nous devons valoriser au titre de savoirs légitimes. Car comme le dit Amina Wadud, « Our experiences matter, our lived realities matter » : nos expériences comptent, nos réalités vécues comptent.

Références :

– Al-Sa’di, Hoda, and Omaima Abou-Bakr. al-Mar’a wa-al-hayat al-diniyya fi al-‘usur al-wusfa (Women and Religious Life in the Middle Ages) Cairo: The Women & Memory Forum, 2001.
– Ahmed, Leila. Women and Gender in Islam: Historical Roots of a Modern Debate. New Haven: Yale University Press, 1992.
– Abou-Bakr, Omaima. “Rings of Memory: “Writing Muslim Women” and the Question of Authorial Voice.” In: The Muslim World, 2013, 103: 320-333
– Dryer, Elizabeth “Whose Story Is It? The Appropriation of Medieval Mysticism,” Spiritus: A Journal of Christian Spirituality, 4, no. 2 (2004), 151–172: 151.
– Evans, Ruth, and Lesley Johnson, eds. Feminist Readings in Literature. London and New York: Routledge, 1994.
– Kahf, Mohja. “Braiding the Stories: Women’s Eloquences in the Early Islamic Era”, in Windows of Faith, ed. G. Webb (New York: Syracuse University Press, 2000), 147-171:159.
– Lapidus, Ira M. A History of Islamic Societies. Cambridge: Cambridge University Press, 2014.
– Ruys, Juanita. “Playing Alterity: Heloise, Rhetoric, and Memoria,” in Maistresse of My Wit: Medieval Women, Modern Scholars, eds. L. D’Arcens and J. Ruys (Turnhout: Brespols Publishers, 2004), 211–235: 212.
– Scott, Joan. “Gender: A useful Category for Historical Analysis.” American Historical Review 91, no.5 (1986): 1053-75.
– Spellberg, Denise. « History Then ,History Now: the Role of Medieval Islamic Religio-Political Sources in shaping the Modern Debate on Gender. » In Sonbol, Amira (ed.). Beyond the Exotic: Women’s Histories in Islamic Societies. Cairo: The American University in Cairo press 2005. pp. 3-14
– Rhoded, Ruth. Women in Islamic Biographical Collections: From Ibn Sa ‘d to Who’s Who. Boulder and London: Lynne Rienner Publications, 1994. Introduction. pp. 1-14, Conclusion, pp. 135-141
Article écrit à partir de l’intervention de Sarah Marsso à l’occasion du festival féministe Lallab Birthday #2 qui, pour fêter les deux ans de Lallab le 6 mai 2018, célébrait les héritières.

Crédit Photo Image à la une : Gathering de Farsaneh Faris Moayer

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Diffuse la bonne parole

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(Dé)construction

Quelle place pour les Femmes musulmanes dans la production et transmission des savoirs religieux ? Partie 2

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Tisser les fils de la mémoire collective et lire dans le silence de nos sources

La première partie de cet article a été publié ici 
Quelle fut la place des femmes musulmanes dans la production et la transmission des savoirs religieux ? Dans quelle mesure ont-elles participé à la transmission des ahadiths (paroles et actes rapportés du Prophète Mohammed), quel rôle ont elle joué dans les processus de raisonnement juridiques (fiqh), dans l’enseignement et la gestion des écoles religieuses, mais aussi dans la guidance spirituelle ? Quelles étaient les spécificités de leurs contributions ? Comment peut-on identifier et lire les sources historiques pertinentes ? Comment lire dans le silence des sources textuelles, et faire ressortir la voix et l’expérience de ces femmes dans textes majoritairement écrits par des hommes ?Que nous disent les efforts intellectuels de ces femmes musulmanes sur notre époque et notre rôle dans la production et la transmission des savoirs religieux.

 

La réémergence des femmes savantes (cheikhas)

On assiste à une réémergence des femmes cheikhas, savantes religieuses, au milieu du 9e siècle. Après plus de 250 années de silence, comment peut-on expliquer ce renouveau ? Les historiens et historiennes avancent trois raisons principales. Tout d’abord, les nouveaux développements dans les sciences religieuses et notamment la consolidation des corpus de hadith dans les Sahih (Bukhari et Muslim) ont permis d’assouplir les critères d’accès et de participation à ces sciences. Ensuite, l’acceptation de la transmission écrite (et non orale) des ahadiths a également facilité la participation des femmes car elles n’avaient plus besoin de partir en voyage, de faire des rihlas pour récolter les narrations. Enfin, c’est le système de transmission intrafamilial de ces sciences au sein de grandes familles de savants qui a permis aux femmes faisant partie de cette élite intellectuelle d’avoir accès à ces connaissances au même titre que les hommes.

Ces femmes qu’on a appelé les muhadithates étaient des expertes dans le domaine des ahadiths et de leur interprétation. Récemment l’auteur Muhammad Akram Nadwi a publié une encyclopédie de 57 volumes sur les muhadithates depuis les premières décennies de l’Islam jusqu’au temps contemporain. Si son ouvrage est une source d’information incommensurable, l’auteur reste malheureusement assez factuel et n’offre pas d’analyse historique et notamment pas de perspective genre. D’autres auteures l’ont fait, dont Omaima Abou Bakr, Jonathan Berkey et  Hoda Al Saada.

On peut lire dans les biographies de ces femmes savantes les détails sur la nature de leur travail, leur milieu social mais également leurs méthodes d’enseignement et les environnements mixtes dans lesquels elles évoluaient, ce qui est un élément intéressant à prendre en compte lorsque l’on pense à la façon dont les sciences islamiques sont enseignées aujourd’hui…

L’enseignement dans les sociétés islamiques prémodernes se déroulait de manière informelle au sein de cercles d’étude (majliss al ‘ilm) dans les mosquées, parfois même dans les rues ou les places publiques dans les grandes villes. Les savants et savantes donnaient des conférences publiques et les individus intéressés se rassemblaient autour de ces personnalités pour apprendre, et disséminer à leur tour les connaissances acquises.

Les étudiants participaient à un majliss jusqu’à ce qu’ils aient jugé avoir acquis ce dont ils avaient besoin, puis ils se dirigeaient vers un autre majliss pour acquérir d’autres connaissances. On peut voir que le processus à l’époque était plus flexible, et plus démocratique en un sens qu’aujourd’hui. Enseigner dans un majliss n’était pas une chose aisée, car avant de débuter les étudiants évaluaient l’enseignant en posant plusieurs questions précises pour tester ses connaissances. Ce processus d’évaluation et de sélection intransigeant s’appliquait également aux femmes, et leur présence dans ce domaine prouve leur haute qualification. Il faut également noter que leurs compétences ne se limitaient pas à la transmission de hadith, mais s’étendaient également à la maîtrise des règles juridiques (ahkam), l’histoire, la logique, l’éthique et la philosophie.

Une fois l’enseignante jugée compétente, la méthode d’enseignement suivait un processus très précis, où dans un premier temps les étudiants devaient écouter (sam’), puis réciter ce qui a été mémorisé (qira’a), et enfin faire preuve d’esprit critique et écrire leurs commentaires, pour que l’enseignante puisse lui donner une certification (ijaza). Et c’est notamment à travers ces ijazas que l’on a pu découvrir que de nombreuses femmes ont donné des certifications à de grandes figures de la tradition musulmane.

Donner des ijazas n’était pas à la portée de tout le monde, il fallait remplir des critères stricts de légitimité et de précision intellectuelle, ainsi qu’être reconnu comme autorité savante par ses contemporains. Critères exigeants que remplissaient de nombreuses femmes ; comme le montre le fait que le grand juriste et théologien Ibn Hajar a cité 53 femmes auprès desquelles il a étudié, tandis que Al- Sakhawi mentionne avoir obtenu des ijazas, des certifications auprès de 68 femmes.

Leadership religieux et spirituel

Parmi ces muhhadithates on peut citer Shaykha Shuhda bint Aúmad bin al-Faraj (12e siècle) qui était connue sous le nom de fakhr a nisa (la fierté des femmes) et qui donnait de grandes conférences publiques à la mosquée de Bagdad. L’historien ibn Khaliqan dans son livre wafiyat al a’ian (volume 5) témoigne que de nombreux savants ont étudié auprès d’elle, qu’à elle seule elle attirait un public très large, des plus jeûnes aux plus âgées ce qui atteste de sa stature et de sa notoriété. L’exemple de Shaykha Shuhda prouve également que les femmes étaient autorisées d’enseigner dans les mosquées, devant de grandes assemblées et qu’elles n’étaient pas confinées à l’enseignement dans leurs maisons.

On peut également citer l’exemple de Aicha bint Ali Bin Mohammed Bin Nasarallah, qui était une savante hanbalite (1359-1436 14/15e s), qui a enseigné à de nombreux imams, et qui était une experte reconnue de la sira (biographie du prophète) mais également des outils du fiqh (analyse juridique). Aicha a été amenée à voyager d’Egypte à la Palestine pour transmettre ses connaissances à de grandes figures savantes contemporaines.

Une autre caractéristique intéressante qui ressort de ces biographies, ce sont les titres que l’on a donné à ces femmes. Dans son ouvrage Materials on Muslim Education, Arthur Stanley Tritton mentionne les titres de « Sitt al-wuzara » (La grande dame des ministres), ou de « Sitt al fuqaha » (La grande dame des juristes). Certaines d’entre-elles se sont même vues donner le titre de « dhat riyasa », de leader, ce qui voulait dire qu’elles étaient l’autorité suprême sur une spécialité, titre qu’elles obtenaient après avoir remporté un débat public avec d’autres savants experts en la matière. (Makdisi, Rise of Colleges).

Malheureusement, la plupart des travaux écrits de ces femmes savantes sont perdus, et nous avons connaissance de leur existence qu’à travers la mention des titres de leurs ouvrages par leurs étudiants et leurs contemporains. Ceux-ci évoquent par exemple que leurs enseignantes ont pu écrire des questions de fiqh (masa’il fiqhiya), des opinions juridiques (fatawas), des interprétations et commentaires (ta’aliq wa shuruh). On note aussi parfois la mention qu’un savant aurait compilé des travaux pour telle ou telle personnalité, ce qui nous indique que c’étaient les hommes scribes qui étaient chargés de préserver et compiler les opinions juridiques des femmes.

Crédit Photo : Capture de la vidéo sur les Muhaddithat réalisée par Norhayati Kaprawi 

Nous retrouvons également des traces dans les correspondances épistolaires entre les savants et savantes pour échanger des informations, des opinions mais également pour débattre de problématiques scientifiques et religieuses. Al Sakhawi par exemple a compilé ses correspondances avec Fatima (1451) la fille du juge Kamal al-Din Mahmud, leur relation était amicale, ils échangeaient des anecdotes personnelles, des poèmes qu’ils critiquaient mutuellement, mais également des opinions juridiques (fatawas). Ce qui montre que leurs échanges étaient placés sur un pied d’égalité.

Certains historiens ont avancé que l’autorité de ces femmes était restreinte par leur incapacité d’interagir directement avec les étudiants hommes, c’est le cas notamment de Jonathan Berkey dans son ouvrage Women and Islamic Education. Mais les exemples que j’ai cité de correspondances et d’enseignement dans les mosquées contredisent cette hypothèse.

Un autre contre-exemple est la pratique de ce qu’on appelait des « Mujawara », lorsque des voyageurs, hommes ou femmes s’installaient aux alentours des lieux saints (la Mecque, Médine ou Jérusalem) pour vivre une vie de piété et de méditation. Lorsque les premières madrassas (écoles) sont nées, beaucoup se sont installées autour de ces voyageurs (mujawirun) pour qu’ils transmettent leurs savoirs. Dans leurs compilations Ibn Hajar et Al Sakhawi mentionnent que des femmes figuraient parmi les mujawirun, et qu’elles interagissaient avec les hommes. Certaines femmes étaient également connues pour leur prêches, comme Taj al-nisa’ bint rustum bin tabi al raja al- Asbahani  (1504) qui avait le titre de « Shaykhat al –haram » c’est-à-dire le titre officiel de savante de la grande mosquée de la Mecque.

Enfin, de nombreuses femmes ont choisi la voie mystique soufie, les ‘abidates ou sufiyyates.  Abu Abd al-Rahman al-Sulami (936-1021) a écrit un dictionnaire bibliographique sur ces femmes soufis, (dhikr al-niswa al-muta’abbidat al sufiyyat), on retrouve également des traces de leur présence dans les commentaires des exégèses coraniques (tafsirs) ou dans les poèmes. Aziza Ouguir montre dans ses recherches que les savants issus de la tradition mystique soufi des sociétés islamiques prémodernes ne distinguaient pas les hommes des femmes, qu’ils considéraient comme leurs égales aux yeux de Dieu. Aussi les écrits de Ibn Arabi et de Ibn Taymiyya attestent que ces femmes avaient occupé des postions de leadership religieux et étaient reconnues pour leur piété et sagesse.

Une des figures les plus célèbres est celle de Rabia al Adawiyya (720-801), esclave affranchie originaire de Basra, en Iraq, qui a alimenté pendant des siècles et alimente encore les enseignements soufis, et notamment à travers ses poèmes relatant son amour inconditionnel pour Dieu. Rabi’a a refusé les maintes demandes en mariage qu’on lui a faite. Elle a réussi à dépasser les catégories sociales dans lesquelles on enfermait les femmes, elle n’était en effet, ni épouse, ni esclave ni en dessous de quelconque autorité masculine, la seule autorité à laquelle elle se soumettait était Dieu, un être non genré.

Il existe évidemment bien d’’autres femmes mystiques soufi moins connues ; Fatima de Nishapur, Fatima de Cordoba, Aicha de Damas, et de nombreux auteurs ont consacré des ouvrages à ce sujet, je vous conseille notamment les travaux sur les femmes mystiques musulmanes de Azad Arezou.

SUITE DE L’ARTICLE 

Retrouvez la suite de cet article « Quelle place pour les Femmes musulmanes dans la production et transmission des savoirs religieux ? ci-dessous :

Partie 3/3

 

Références :

– Al-Sa’di, Hoda, and Omaima Abou-Bakr. al-Mar’a wa-al-hayat al-diniyya fi al-‘usur al-wusfa (Women and Religious Life in the Middle Ages) Cairo: The Women & Memory Forum, 2001.
– Al-Sakhawi, Muhammad b. ‘Abd al-Rahman. Al-Daw’ al-Lami’ li-Ahl al-Qarn al-Tasi’. Cairo: Maktaba al-Qudsi, 1936.
– Al-Sulami, Abu ‘Abd al-Rahman. Dhikr al-Niswa al-Muta’abbidat al-Sufiyyat (Mention of worshipping mystic women), ed. M. M. al- Tanahi (Cairo: al) Hai’a al-misriya al-‘amma lil-kitab, 1999).
– Al- Zarkashi, Muhammad b. Bahadur. Al-Ijaba li-Irad ma Istadrakathu ‘Aisha ‘ala al-Sahaba. Beirut : al-Maktab al-Kutubal-‘Ilmiya, 2000.
– Azad, Arezou. “Female Mystics in Medieval Islam: The Quiet Legacy.” In: Journal of the Economic and Social History of the  Orient, 2013, 56: 53-88.
– Berkey, Jonathan. The Transmission of Knowledge in Medieval Cairo: A Social History of Islamic Education. Princeton, NJ: Princeton University Press, 1992. Chapter 6. pp. 161-181.
– Ibn Hajar al-‘Asqalani, Ahmad b. ‘Ali. al-Durar al-Kamina fi A’yan al-Mi’a al-Thamina. Cairo: Dar al-Kutub al-Haithda, 1966. Ibn Sa’d, Muhammad. Kitab al Tabaqat al Kabir, Leiden: E.J. Brill, 1904_18.
– Lapidus, Ira M. A History of Islamic Societies. Cambridge: Cambridge University Press, 2014.
– Makdisi, George. The Rise of Colleges. Edinburgh University Press, 1981.
– Norhayati Kaprawi, October 2018. Video on Muhaddithat : https://www.youtube.com/watch?v=dKX8cmWOxr8&feature=youtu.be
– Ouguir, Aziza. 2013. Female Religious Agents in Morocco: Old Practices and New Perspectives.
– Spellberg, Denise. « History Then ,History Now: the Role of Medieval Islamic Religio-Political Sources in shaping the Modern Debate on Gender. » In Sonbol, Amira (ed.). Beyond the Exotic: Women’s Histories in Islamic Societies. Cairo: The American University in Cairo press 2005. pp. 3-14
– Sayeed, Asma. “Women and Hadith Transmission: Two Cases from Mamluk Damscasus.” In: Studia Islamica, 95, 2002: 71-94
– Sayeed, Asma. Women and the Transmission of Religious Knowledge in Islam. Cambridge: Cambridge Univeristy Press, 2013. Sonbol, Amira. 1996. The New Mamluks: Egyptian Society and Modern Feudalism. New York: Syracuse University Press, 2000.
– Tucker, Judith. In the House of Law: Gender and Islamic Law in Ottoman Syria and Palestine. Cairo: American University in Cairo Press, 1999

 

Article écrit à partir de l’intervention de Sarah Marsso à l’occasion du festival féministe Lallab Birthday #2 qui, pour fêter les deux ans de Lallab le 6 mai 2018, célébrait les héritières.

Crédit Photo Image à la une : Capture de la vidéo sur les Muhaddithat réalisée par Norhayati Kaprawi

 

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Diffuse la bonne parole

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(Dé)construction

Quelle place pour les Femmes musulmanes dans la production et transmission des savoirs religieux ? Partie 1

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Tisser les fils de la mémoire collective et lire dans le silence de nos sources

 

Aujourd’hui nous célébrons ces femmes qui nous ont précédées, les combats qu’elles ont menés, les traumatismes qu’elles ont surmontés, mais surtout les sagesses qu’elles nous ont transmis, de génération en génération, une source immatérielle, créatrice et inépuisable de savoir qui est trop souvent passée sous silence. Ce sont ces voix étouffées, ces savoir-faire et savoir être rendus invisibles par des siècles de domination patriarcale, que j’aimerai rappeler à nous, et notamment l’héritage des femmes dans la tradition musulmane.

 

Quelle fut la place des femmes musulmanes dans la production et la transmission des savoirs religieux ? Dans quelle mesure ont-elles participé à la transmission des ahadiths (paroles et actes rapportés du Prophète Mohammed), quel rôle ont elle joué dans les processus de raisonnement juridiques (fiqh), dans l’enseignement et la gestion des écoles religieuses, mais aussi dans la guidance spirituelle ? Quelles étaient les spécificités de leurs contributions ? Comment peut-on identifier et lire les sources historiques pertinentes ? Comment lire dans le silence des sources textuelles, et faire ressortir la voix et l’expérience de ces femmes dans des textes majoritairement écrits par des hommes ? Que nous disent les efforts intellectuels de ces femmes musulmanes sur notre époque et notre rôle dans la production et la transmission des savoirs religieux.

 

L’émancipation des femmes musulmanes n’est pas née avec le colonialisme et les Etats nations modernes.

J’ai choisi de me concentrer sur la période prémoderne des sociétés musulmanes, c’est-à-dire depuis la mort du Prophète (PSL) dans la seconde moitié du 7e siècle jusqu’à la fin du 18e siècle, car c’est au cours de cette période que se sont construites, approfondies et consolidées les sciences religieuses islamiques telles qu’on les connait aujourd’hui. Contrairement à l’imaginaire façonné par les stéréotypes orientalistes, les femmes ont occupé des rôles et positions clés dans les sociétés islamiques prémodernes, et elles n’étaient pas toutes passives et cloîtrées dans des harems. La réflexion autour de l’histoire oubliée de ces femmes a fait l’objet de nombreuses études, de la part d’historiens et historiennes tels que Amira Sonbol, Leila Ahmed ou Jonathan Berkey

Ces travaux remettent en cause le postulat moderniste selon lequel les femmes n’ont pu et ne peuvent atteindre une pleine et véritable émancipation qu’à travers la modernisation dans toutes ses formes et ses manifestations. Ce postulat est problématique car il a ancré dans la conscience collective que l’émancipation des femmes musulmanes est née avec le colonialisme occidental et les Etats nations modernes. Aussi, il nous ramène au binarisme typique du paradigme orientaliste qui oppose la tradition à la modernité ; modernité qui serait synonyme de progrès.

Ainsi, les travaux historiques récents ont démontré la présence active des femmes musulmanes dans la sphère publique au cours de cette période, qui s’étale sur près de dix siècles, et notamment dans les domaines religieux et spirituels, en tant que muhadithates (transmetteuses de hadith), faqihates (juriste, savante en fiqh), muftiyates (donnaient des opinions juridiques), wa’izates (prédicatrices) et sufiyyates (guides spirituelles).

Avant d’explorer quelques exemples, il est tout d’abord important de noter ici la rareté et la dispersion des sources historiques sur la vie de ces femmes. Ainsi les historiens et historiennes qui travaillent sur ce sujet se sont essentiellement reposés sur les dictionnaires biographiques de l’époque, qui servaient à documenter la vie des grandes figures religieuses et politiques, y compris les figures féminines. Il existe de nombreuses compilations telles que Tabaqat de Ibn Sa’d (845), Siyar A’lam al-Nubala’ de al-Dhahabi (1348), al-Durar al-Kamina de Ibn Hajar al-Asqalani (1448) ou al-Daw’ al-Lami’ de Muhammad Shams al-Din al-Sakhawi (1428- 1497). L’information récoltée sur les femmes est souvent très brève et concise, et il faut donc être attentive aux détails de la narration ainsi qu’au ton du narrateur, et nous aborderons cela à la fin de mon exposé, comment lire entre les lignes et combler les lacunes lorsqu’il ne s’agit pas de HIStories mais de HERstories.

Les Sahabiyates

Dans son ouvrage, Women and the transmission of religious knowledge in Islam, Asma Sayeed identifie quatre phases historiques, en ce qui concerne la place des femmes musulmanes dans la transmission du savoir religieux.  La première phase est celle des premières décennies qui ont suivi la Révélation, où les femmes du prophète ainsi que les Sahabiyates – les femmes compagnones ont transmis leurs connaissances en ligne directe du Prophète Mohammed (PSL)

Ces femmes étaient des figures respectées et des sources prolifiques de savoir, dont l’autorité et la légitimité étaient notoirement reconnues par les musulmans de l’époque. Il n’existe pas de liste définitive des compagnons et compagnones du prophète, mais Ibn hajar cité précédemment a documenté 1545 femmes sur les 12304 compagnons. Certaines d’entre-elles sont très connues, d’autres moins. On peut citer bien évidemment les femmes du Prophète, qui non seulement furent source d’autorité pour témoigner des faits et gestes du Prophète, mais dont leurs propres comportements et préférences furent également considérés comme faisant partie de la Sunna.

Aicha et Umm Salama sont celles qui furent les plus actives, Aicha ayant transmis entre 1500 et 2400 ahadiths, et Umm Salama entre 175 et 375 ahadiths. De nombreuses biographies font l’éloge des compétences multiples de Aicha, dont par exemple Abu Nu’aym al-Isbahani dans son ouvrage Hilyat al-awliya qui raconte que non seulement Aicha excellait dans la transmission des hadiths, dans son esprit critique et son interprétation qui relève du fiqh, mais qu’elle était également reconnue pour ses compétences médicinales, sa maîtrise de la poésie et que son opinion était valorisée sur la gestion des affaires de la cité.

Aussi il est intéressant de noter que les ahadiths rapportées par les femmes du prophète ne se limitaient pas aux relations conjugales, Aicha a transmis des ahadiths sur la pureté rituelle, les prières surérogatoires, le jeûne, le pèlerinage, l’héritage mais aussi sur l’eschatologie. Aicha a également plusieurs fois fait figure d’autorité pour corriger les contradictions d’autres compagnons lorsqu’ils rapportaient des faits du prophète qui ne correspondaient pas avec sa personnalité, (débats qui furent compilés par Al-Zarkashi) elle a notamment corrigé à plusieurs reprises les paroles rapportées par le compagnon Abu Hurayra. Je vous conseille à ce sujet de lire l’ouvrage de Fatima Mernissi, Le Harem politique (1987) qui consacre tout un chapitre au rôle joué par ce compagnon dans la transmission de points de vue misogynes.

Les opinions juridiques de Aicha n’étaient pas toujours acceptées mais sa présence et sa prestance étaient telles que les compagnons ne pouvaient pas lui tenir tête, ainsi par exemple elle a permis aux enfants nés hors mariage de pouvoir diriger la prière – s’ils en avaient les compétences requises- et elle a également permis aux femmes de faire leur pèlerinage sans mahram (tuteur masculin) tant que celles-ci étaient assurées de leur sécurité.

Ce sujet est comme vous pouvez l’imaginer extrêmement riche, et je ne peux donc que vous inviter vivement à lire les ouvrages qui relatent la vie et les positions de Aicha, mais également de Um Salama, des autres épouses du prophète, ses tantes et cousines, et notamment sa tante Fakhita bint Abi Talib (um Hani) qui a rapporté 30 ahadiths, et des sahabiyates, Asma bint Abi Bakr, Lubaba bint al-Harith, Umm Ayman etc..

Les grandes discordes (fitna)

La deuxième phase est celle de la fin du 7e et du 8e siècle. C’est une période avec un contexte politique difficile, où vont se succéder trois « grandes discordes », ce qu’on a appelé des fitna c’est à dire les premiers affrontements, rivalités de pouvoir et divisions entre les musulmans.

Durant cette période, qui est aussi celle de la conquête et de l’expansion du monde musulman sous les dynasties omeyyades et abbasides, la transmission des ahadiths et le savoir religieux furent utilisés à des fins politiques et pour poursuivre des intérêts claniques et personnels. Cette manipulation des sources a poussé à la professionnalisation de cette discipline et à l’établissement de critères stricts pour déterminer la validité du savoir transmis.

Parmi les critères requis figuraient l’acuité juridique, la formation linguistique, la possibilité d’avoir des interactions directes avec les enseignants, et la possibilité de faire de long et pénibles voyages (rihlas) pour récolter et vérifier les narrations. Comme la plupart des femmes ne pouvaient pas remplir ces conditions et concurrencer leurs homologues masculins, leur participation dans la transmission du savoir a considérablement chuté sur à peu près deux siècles.

 

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Retrouvez la suite de cet article « Quelle place pour les Femmes musulmanes dans la production et transmission des savoirs religieux ? ci-dessous :

Partie 2/3

Partie 3/3

 

Références :

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– Al-Sakhawi, Muhammad b. ‘Abd al-Rahman. Al-Daw’ al-Lami’ li-Ahl al-Qarn al-Tasi’. Cairo: Maktaba al-Qudsi, 1936.
– Al-Sulami, Abu ‘Abd al-Rahman. Dhikr al-Niswa al-Muta’abbidat al-Sufiyyat (Mention of worshipping mystic women), ed. M. M. al- Tanahi (Cairo: al) Hai’a al-misriya al-‘amma lil-kitab, 1999).
– Al- Zarkashi, Muhammad b. Bahadur. Al-Ijaba li-Irad ma Istadrakathu ‘Aisha ‘ala al-Sahaba. Beirut : al-Maktab al-Kutubal-‘Ilmiya, 2000.
– Ahmed, Leila. Women and Gender in Islam: Historical Roots of a Modern Debate. New Haven: Yale University Press, 1992.
– Berkey, Jonathan. The Transmission of Knowledge in Medieval Cairo: A Social History of Islamic Education. Princeton, NJ: Princeton University Press, 1992. Chapter 6. pp. 161-181.
– Ibn Hajar al-‘Asqalani, Ahmad b. ‘Ali. al-Durar al-Kamina fi A’yan al-Mi’a al-Thamina. Cairo: Dar al-Kutub al-Haithda, 1966. Ibn Sa’d, Muhammad. Kitab al Tabaqat al Kabir, Leiden: E.J. Brill, 1904_18.
– Lapidus, Ira M. A History of Islamic Societies. Cambridge: Cambridge University Press, Makdisi, George. The Rise of Colleges. Edinburgh University Press, 1981.
– Sayeed, Asma. Women and the Transmission of Religious Knowledge in Islam. Cambridge: Cambridge Univeristy Press, 2013.
– Sonbol, Amira. 1996. The New Mamluks: Egyptian Society and Modern Feudalism. New York: Syracuse University Press, 2000.

Article écrit à partir de l’intervention de Sarah Marsso à l’occasion du festival féministe Lallab Birthday #2 qui, pour fêter les deux ans de Lallab le 6 mai 2018, célébrait les héritières.

Crédit photo : Montage effectué par l’autrice à partir des couvertures de ouvrages cités

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