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Femmes musulmanes dans l'histoire Portraits

Lubna de Cordoba : garante de l’essor culturel

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[Publié initialement le 12 mai 2019]
La femme dont je vais vous parler a atteint des sommets par sa seule volonté, son efficacité et sa soif de savoir.
Ses vastes connaissances et compétences lui ont permis de côtoyer les plus grand.e.s de son temps, et d’occuper des postes où les responsabilités furent des plus importantes.
La femme dont je vais vous parler est poète, mathématicienne, bibliothécaire et tellement d’autres choses à la fois.
La femme dont nous allons parler s’appelle Lubna, mais elle est également connue sous le nom de Lubna de Cordoba.

 

De sa naissance, de son enfance, et de son adolescence, nous ne savons que très peu de choses. Nous ne pourrons situer l’année ni même la ville de sa naissance. De Lubna, nous savons qu’elle était espagnole, issue d’une famille en grande précarité et qu’elle fut réduite à la servitude très jeune.
Mais sa condition initiale ne l’empêcha pas de développer un nombre incalculable de passions. En effet, l’écriture, la grammaire, la poésie et les mathématiques l’attiraient, si bien que dès qu’elle le pouvait, elle y consacrait l’ensemble de son temps et de son énergie.
C’est ainsi que, très vite, elle fut repérée et commença alors à servir en ce sens. Elle devint scripte et eut pour mission de recopier et de calligraphier un certain nombre de livres afin qu’ils puissent être diffusés plus facilement. Son efficacité ne fut plus à prouver et son nom se répandit. Bientôt, Lubna commença à être sollicitée par différentes personnalités.

 

Si nous devions citer des modèles de femmes autodidactes aujourd’hui, Lubna de Cordoba devrait nécessairement y figurer. Partie de rien, elle consacra durant des années son temps et son énergie à se former, jusqu’au jour où elle fut appelée par le calife Abd Al-Rahman III pour travailler à ses côtés au sein de la cour royale des Omeyades de Cordoue. C’est ainsi qu’elle devint secrétaire du palais, mais également bibliothécaire, mathématicienne et poète.
Lubna était une femme forte, autonome et ses différentes expériences et connaissances lui permirent très vite de dépasser les fonctions qui lui avaient été confiées. Elle fut en capacité de débattre et de rivaliser avec politicien.ne.s, philosophes et dirigeant.e.s de l’époque. Son charisme et son intelligence lui permirent très vite de figurer parmi les figures les plus importantes du palais des Omeyyades de Cordoue.
En 961, à la mort d’Abd Al Rahman III, son fils Al Hakam b. Abd al-Rahman reprit le pouvoir. A aucun instant il n’eut la volonté de se séparer de Lubna; bien au contraire, il lui donna pour mission d’être garante de l’essor culturel et intellectuel du califat. Ainsi, avec un grand nombre de femmes et d’hommes à ses côtés, elle commença à reproduire, écrire et traduire les livres les plus importants, et ce dans des domaines très différents.

 

C’est en partie grâce à ce travail colossal qu’elle dirigea que nous sommes aujourd’hui en capacité d’étudier et de nous inspirer d’œuvres de philosophes, de mathématicien.ne.s, de physicien.ne.s de la Grèce antique notamment.

Elle fut aussi – avec Hasdaï Ibn Shaprut, médecin, diplomate et mécène juif du Xe siècle – à l’initiative de la création de la fabuleuse bibliothèque de Madinat al-Zahra. A la suite de quoi elle la présida. La bibliothèque royale comptait plus de 500 000 livres, dont Lubna avait la capacité de dire où chacun d’eux se trouvait. Afin qu’elle soit perpétuellement alimentée et que les plus belles pièces y soient recensées, Lubna parcourut seule le Moyen-Orient à la recherche des livres les plus prisés. De sources historiques, on sait notamment qu’elle voyagea fréquemment au Caire, à Damas et à Bagdad.
Sa bibliothèque fut l’une des plus importantes et des plus célèbres de son temps. Cordoue connut, grâce à son travail acharné, un essor culturel conséquent. Les savant.e.s s’y déplaçaient massivement afin d’y trouver les écrits dont il.elle.s avaient besoin. La ville était devenue dans les esprits de chacun.e une cité des sciences et de la culture.

Des siècles se sont écoulés avant qu’une bibliothèque semblable à la sienne voie le jour en Espagne. Al Hakam II était le mécène et le protecteur des philosophes et des poètes, même les plus polémiques, et Lubna en était la cheffe d’orchestre.

 

Lubna a su faire de Cordoue un lieu symbole de pluralisme, de tolérance, où l’équité devait nécessairement régner. A la fin de sa vie, c’est à l’enseignement que Lubna se consacrera; elle enseigna notamment aux enfants la magie des mathématiques et leur transmit son amour des chiffres.
C’est en 984 que Lubna décéda. Cependant, si l’on en croit les chroniques arabes de l’époque, nous savons qu’en partie grâce à elle, la machine avait été amorcée. En effet, comme il est souvent mentionné, il pouvait y avoir dans certains quartiers plus de 170 femmes lettrées chargées de copier, traduire ou rédiger. Ces quelques données suffisent à nous donner une idée de l’héritage qu’elle avait laissé, de nous montrer la place qu’occupait la culture mais également la manière dont les femmes y contribuaient.

 

Lubna fut une femme musulmane aux origines ni royales ni nobles. Seule, elle se façonna, elle s’instruisit, elle se perfectionna. Ce travail acharné qu’elle mena lui valut d’être nommée et renommée. Lui donner, à elle, la charge de ces hautes responsabilités, était une preuve de la confiance et du respect qui lui étaient accordés. C’était également un contre-argument clair contre quiconque prétendait que les femmes en islam n’avaient pas de rôles stratégiques à jouer.

Lubna, bien qu’oubliée, fit partie de ceux et celles ayant contribué à la diffusion des savoirs qui furent essentiels dans la prospérité de nos sociétés.
Sa personne, son histoire et les traces qu’elle nous a laissées devraient nous rappeler qu’avec force et détermination, nous pouvons inverser notre destinée; qu’avec envie et passion nous pouvons faire taire la répression, et qu’avec persévérance et croyance nous pouvons faire évoluer les pires des mentalités.
Alors prenons ensemble Lubna comme modèle, faisons d’elle une source d’inspiration pour notre génération et celle à venir. Utilisons son histoire pour faire valoir justice, égalité et respect.
Pour en savoir plus sur son histoire et son parcours, je vous invite si vous êtes anglophones à écouter ce fabuleux podcast à son sujet.

 

Belle écoute 😉

 

Illustration : Sist’art
Sist’art c’est l’histoire de 3 soeurs passionnées d’art et de dessins.
Pour découvrir leur univers, rendez vous sur instagram : @taekanddoart et @sistart.comics

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Diffuse la bonne parole

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Fatima Zahra : figure incontournable de l’Islam

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[Publié initialement le 9 mai 2019]
Aujourd’hui l’hommage rendu sera différent des précédents. Alors que jusqu’ici, nous tâchions de mettre en avant des modèles féminins peu connus, aujourd’hui le choix sera tout autre. En effet, la femme dont nous allons parler n’a ni été oubliée, ni été invisibilisée, elle est même d’ailleurs extrêmement appréciée par l’ensemble de la communauté musulmane, et pour certain.e.s, elle est un modèle.
Alors pourquoi vous en parlez ? Pourquoi une fois de plus la présenter ? Pour plusieurs raisons à vrai dire. Premièrement, car les présentations et mises en avant de rôles modèles féminins musulmans favorisant l’émancipation et la réclamation de plus d’équité et d’égalité sont encore trop peu nombreuses, y compris si les figures sont connues.
Deuxièmement, car partager l’histoire de cette femme, c’est rappeler à l’ensemble des femmes et plus spécialement aux femmes musulmanes que le respect de notre dignité n’est pas à troquer, n’est pas à quémander.

 

Vous l’aurez peut-être compris, aujourd’hui nous parlerons de Fatima Zahra, figure incontournable de l’islam. Elle participa activement à tous les développements majeurs survenus dans l’établissement de la nouvelle foi de l’islam.

Cependant, afin que l’on puisse ensemble se questionner, j’essaierai de vous parler de certains épisodes de sa vie peu commentés, et qui pourtant nous rappellent avec force l’importance du consentement et l’égalité dans la conjugalité.

Avant toute chose, il convient cependant de rappeler que l’importance que revêt la personne de Fatima Zahra diffère du sunnisme au chiisme.
Ayant pour ma part reçu une éducation sunnite, j’espère ne commettre aucun impair offensant à l’égard de la communauté chiite. En cas d’imprécisions, je tiens d’emblée à m’en excuser. Enfin, si approfondissements méritaient d’être apportés, je serais ravie de pouvoir les mentionner.

 

C’est parti, allons ensemble à la rencontre de Fatima Zahra !

 

Fatima Zahra fut la plus jeune des filles du prophète Muhammad (pbl) et de la grande Khadija. Elle naquit à La Mecque aux alentours de 614 dans la tradition chiite, et aux alentours de 606 dans la tradition sunnite, soit cinq ans avant que les 1ères révélations ne soient adressées à Muhammad (pbl). L’enfance de Fatima Zahra ne fut pas des plus faciles. En effet, dès ses plus jeunes années, elle fut éprouvée. Eprouvée par la perte de sa mère mais également par les multiples violences et repressions infligées par les Mecquois à l’ensemble des musulman.e.s des premiers temps.

C’est dans ce contexte que se développa entre Fatima Zahra et son père une relation d’amour et de complicité si fusionnelle que ce dernier la surnomma Umm Abeeha — « la maman de son père » — valant à Fatima Zahra d’être aujourd’hui un modèle de bonté et de sincérité.

Grand nombre d’écrits nous disent que Muhammad (pbl) voyait en elle son premier amour Khadija… et qu’elle voyait en lui le souvenir d’une mère partie trop tôt. Fatima Zahra était constamment auprès de son père; aussi puisait-elle en lui ses connaissances et son inspiration.

En 624, alors qu’elle était à Médine en compagnie de son père, elle reçut des propositions de mariage. N’ayant guère l’envie de quitter son foyer familial, Fatima Zahra rejeta les propositions sans aucune objection. Cette même année, celui qui deviendra son bien-aimé et le père de ses enfants vint également demander sa main. Il s’agissait d’Ali, fils de Abu Talib, oncle du Prophète (pbl). Agée d’environ 18 ans, Fatima Zahra accepta la demande et l’union fut ainsi scellée.

Pour subvenir à leurs besoins, Ali travaillait comme peintre et porteur d’eau, et Fatima Zahra comme broyeuse de céréales. La vie qu’ils menèrent ensemble fut simple et modeste, tous deux n’attachant que très peu d’importance aux richesses matérielles. C’est ainsi que ce couple est aujourd’hui encore souvent cité comme un exemple de modestie et de minimalisme. Ensemble, ils eurent deux garçons, Hassan et Husayn, et deux filles, Zaynab et Oum Kalthoum. Leurs enfants occuperont par la suite des rôles tout aussi stratégiques qu’eux.

En effet, ils seront notamment à l’origine des revendications et des batailles donnant naissance au chiisme quelques années plus tard. A la suite de la bataille de la Mecque en 630, Fatima Zahra et ses proches retourneront vivre à la Mecque, ville natale de cette dernière. Quelques années plus tard en 633, Fatima Zahra décédera, fruit du destin, quelques mois après son père.

Avant de conclure, j’aimerais partager avec vous l’un des épisodes de la vie de Fatima Zahra, qui est assez connu, mais sur lequel la réflexion reste souvent superficielle. Cet épisode m’a beaucoup fait réfléchir car, à mes yeux, il met clairement en lumière certaines ambiguïtés au sujet de la polygamie.

Après déjà plusieurs années de mariage, Ali exprima l’envie de prendre une seconde épouse. Chose que Fatima Zahra refusa. Voulant consulter l’avis de son père, elle lui expliqua la situation et les raisons de son refus. Il en résulta de la part du Prophète (pbl) une interdiction formelle à l’encontre de Ali d’aller au bout de son dessein.

Lorsqu’on y pense, ce simple épisode permet aujourd’hui de questionner la légitimité de la polygamie en islam, nous rappelant que le consentement est la norme.

L’an dernier, lors d’un repas de rupture du jeûne partagé avec des ami.e.s chiites, j’ai tout bonnement compris l’importance et l’amour que ces dernier.e.s portèrent à Fatima Zahra. En prenant le temps de les écouter me la conter, j’ai compris qu’elle était en somme pour eux la plus grande femme de tous les temps, qu’elle était le modèle de patience et de persévérance par excellence.
Cette importance est en réalité assez simple à expliquer. Fatima Zahra fut, d’une part, l’épouse du premier imam chiite Ali, et, d’autre part, la mère des deuxièmes et troisièmes imams — donc, par extension, l’ancêtre de tous les imams successifs.

Fatima Zahra fut une inspiration pour les personnes de son temps. Elle l’est encore aujourd’hui et le sera certainement encore demain.
Retenons notamment que son nom fut à l’origine de la dynastie des Fatimides, dynastie ayant régné de 909 à 1171, et qui prétendait en être les descendant.e.s.
En somme, l’histoire de Fatima Zahra ainsi que le comportement adopté par cette dernière sont des grilles pour une meilleure compréhension de notre religion.

Fatima Zahra fut une femme qui su imposer le respect de sa dignité. Son histoire nous prouve une fois de plus que l’Islam permet aux femmes de revendiquer la justice, l’égalité et l’équité qui leur sont de fait autorisées.

 

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Femmes musulmanes dans l'histoire Portraits

Shajar al Durr : d’esclave à sultane

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[Publié initialement le 8 mai 2019]
Qui parmi vous a déjà entendu ou prononcé ne serait-ce qu’une fois le nom de la fameuse Cléopâtre ? Beaucoup j’imagine ! J’aimerais à présent tenter ma chance avec une femme ayant occupé des fonctions similaires en Egypte, mais semble t-il bien moins connue. Qui parmi vous a déjà entendu ou mentionné le nom de Shajar al Durr ?
Peu, n’est-ce-pas ?

 

Et pourtant, Shajar al Durr est une femme ayant occupé un rôle et une place tout autant stratégique que celle de la célèbre reine égyptienne. Elle fut notamment la 1ère femme après Cléopâtre à s’être assise sur le trône d’Egypte, jouant ainsi un rôle politique central dans l’histoire de l’Egypte et plus encore dans l’histoire de l’islam.

Esclave dans les 1ers temps de sa vie, elle deviendra par la suite épouse du sultan As-Salih Ayyûb, puis sultane d’Egypte, et enfin, elle fera partie des figures fondatrices de la dynastie des Mamelouks d’Egypte, dynastie qui règnera sur l’État islamique le plus puissant de son temps.

 

Avant de commencer le projet « Power Our Stories », je m’étais convaincue que les sources au sujet des femmes musulmanes ayant occupé des rôles politiques, militaires et/ou religieux au sein de l’histoire de l’islam étaient très limitées. C’était effectivement une réalité, trouver des sources ou références en français n’était pas chose aisée. Mais cette réalité mériterait mine de rien d’être nuancée, car en cherchant encore et encore on finit toujours par trouver.

En effet, n’en sachant que très peu sur la personne et l’histoire de Shajar al Durr, je me suis lancée un peu aveuglément à la recherche d’informations, en français dans un premier temps. Et à ma grande surprise ce fut le … NÉANT ! J’ai donc tenté ma chance en tapant quelques mots-clés dans le fameux moteur de recherche en anglais et SURPRISE, je suis tombée sur un grand nombre d’articles à son sujet.

Des articles humoristiques, nous expliquant à quel point Shajar al Durr était une femme BADASS, et des articles historiques insistant sur le rôle politique et militaire que cette dernière avait eu a joué. Le site de Muslim Heritage, en plus de me fournir des informations précieuses au sujet de Shajar, me permit de venir ajouter à ma liste un nombre important de figures musulmanes inspirantes et fascinantes. Le livre Sultanes oubliées : Femmes chefs d’État en islam, de la célèbre sociologue marocaine  Fatima Mernissi, s’est également avéré contenir une réelle mine d’or !

C’est donc grâce à toutes ces sources que je m’en vais vous faire voyager dans l’Egypte du XIIIème siècle.

De l’enfance et de la jeunesse de Shajar al Durr nous ne savons que très peu de choses. En effet, impossible de dire qui furent ses parents, ni même quel nom ces derniers décidèrent de lui donner. Personne, semblerait-il, n’avait jugé bon d’enregistrer les informations au sujet de cette jeune fille alors esclave. Ce que nous savons d’elle en revanche, c’est qu’elle naquit aux alentours des années 1220 de notre ère et qu’elle était probablement issue d’une ethnie turque, ou peut-être arménienne. Sa venue au haram de Salih Ayyub est en somme le marqueur historique de son arrivée. C’est en tant qu’esclave que Shajar-al-Durr arriva aux alentours de 1235 dans la forteresse de Kaya, où le prince Salih Ayyb était alors exilé.

En 1238, suite au décès du sultan Al Kamil, As Salih Ayuub est appelé à se rendre au Caire afin de succéder sur le trône. Épris par celle qu’il nomme sa favorite, As Salih Ayuub plia bagage et proposa à Shajar-al-Durr de l’y accompagner. C’est alors qu’une réelle histoire d’amour commença entre le sultan et Shajar-al-Durr. De cet amour naîtra leur fils Khalil. Puis, quelque temps, après afin de sceller leur union et de la faire connaître au grand jour, ils se marieront. Après 10 ans de règne et alors que François Louis IX lançait la 7ème croisade, le sultan As-Salih Ayyub tomba gravement malade et mourut la même année.

C’est ainsi que Shajar-al-Durr, consciente du danger auquel le royaume faisait face et consciente de l’importance de cette situation et du rôle qu’elle pouvait avoir à jouer, cacha à l’ensemble des membres de la cour la mort son époux. Elle prit alors les rênes du pays, et, avec l’aide du commandant en chef de son défunt mari, elle se prépara à la guerre en rachetant notamment 1000 jeunes esclaves turcs, qu’elle fit instruire au métier des armes.

Aussi stratège et rusée qu’elle fut, ses premières batailles firent un succès. En effet, à la suite de l’une des batailles, Shajar, grâce à l’aide de son armée, fit de Louis IX son otage. Précieux otage… En effet, elle troquerait la libération du monarque capturé contre la modique somme de … 400 000 livres, somme qui représentait environ 30% des revenus annuels de la France de l’époque.

Les stratégies militaires qu’elle mit en place et ses talents de négociatrice permirent donc en partie de mettre fin à la 7ème croisade.

En l’espace de quelques mois de règne et dans le plus grand des secrets, Shajar-al-Durr avait donc secrètement pris la tête du royaume et avait en partie renversé le cours de l’histoire.

Cet épisode permit à Shajarr-al-Durr de se faire pour alliés les membres de l’armée. Ainsi, suite à l’annonce officielle du décès de son époux, Turanshah, successeur légitime, se présenta au Caire dans l’optique de reprendre le trône d’Egypte. C’était sans compter sur le soutien de certains chefs de l’armée qui décidèrent de la soutenir dans son accession au trône, mettant ainsi différents stratagèmes en place pour éliminer Turanshah.

Après la mort de ce dernier, Shajar devint donc officiellement Sultane d’Egypte, possédant ainsi les pleins pouvoirs politiques et militaires.

L’ensemble du royaume la reconnaissait à présent comme Sultane d’Egypte. Des pièces de monnaie étaient frappées en son honneur et son nom figurait dans l’ensemble des mosquées lors des prières du vendredi. De quoi rendre à Shajar-al-Durr la légitimité qu’auparavant elle n’avait jamais pu espérer.

Cependant, dans le contexte patriarcal et misogyne de l’époque, certaines factions égyptiennes, ne supportant pas de se savoir dirigées par une femme, commencèrent à se rebeller. Afin d’apaiser les tensions, Shajar-Al-Durr fit donc le choix d’épouser un mamelouke, ancien comptable d’As Salih Ayyub, Aybek, qui devint ainsi officiellement sultan. Dans les faits, cependant, Shajar-al-Darr continua à diriger, bien épaulée par sa garde renforcée, qu’elle avait elle-même pris le soin de composer.  Quelques années plus tard, Aybek, frustré par les pouvoirs que son épouse possédait, et dans l’optique d’atténuer ses responsabilités, décida de contracter un nouveau mariage.

Furieuse et se sentant trahie par celui qu’elle avait fait sultan, Shajarr organisa le meurtre de son mari à l’aide de quelques membres de sa garde. N’ayant eu le temps de dissimuler le corps avant qu’il ne soit découvert, le meurtre d’Aybek devint public, ouvrant ainsi des débats sur le sort qui lui devrait lui être réservé. Elle fut emprisonnée et décéda peu de temps après, suite à une émeute d’esclaves du harem qui la battront à mort.

Mais l’influence qu’elle aura sur son temps ne s’arrêtera pas là. En effet, avant leur mort, Shajar-al-Durr et Aybak avaient fermement établi la dynastie mamelouke, dynastie qui finira par repousser les Mongols, expulser les croisés européens de la Terre Sainte et demeurer la force politique la plus puissante au Moyen-Orient jusqu’à la venue des Ottomans.

Du statut d’esclave au statut de femme de sultan, Shajar devint sultane d’Egypte. Voici l’ascension fulgurante que connut cette souveraine musulmane en quelques années, et ce dans une acceptation plus ou moins totale.

Face à cette histoire et au rôle majeur qu’occupa Shajar-al-Durr, je ne peux m’empêcher de me questionner sur le comment. Comment se faisait-il que jamais auparavant je n’avais rencontré la fabuleuse et stratège Shajar-al-Durr? J’aurais pourtant pu la rencontrer à tant de reprises. Moi qui avais suivi un cursus universitaire d’historienne, moi qui écoutais pourtant assidûment mes cours sur l’histoire de l’Orient musulman, moi qui assistait hebdomadairement à des cours d’éducation islamique, je n’avais jamais entendu ce nom être mentionné ?
À mon sens, il est aujourd’hui évident que l’invisibilisation de cette femme et de bien d’autres encore est la résultante d’une vision profondément masculiniste de l’histoire.

Qu’il s’agisse de savoir religieux ou de savoir  historique, l’oubli des figures féminines semble être la norme, nous rappelant ainsi avec force que les lectures patriarcales de l’histoire sont l’œuvre des hommes dans leur ensemble et non l’œuvre d’une religion en particulier.

Voilà 3 jours maintenant qu’ensemble nous avons embarqué à la rencontre de ces femmes musulmanes ayant tant contribué au développement et à l’essor de l’islam.

Je me suis engagée durant le mois sacré de ramadan à vous présenter 30 femmes musulmanes inspirantes, mais ces femmes importantes sont en réalité bien plus nombreuses que 30.

Ainsi, aujourd’hui, j’aimerais vous soumettre un défi.

C’est donc à votre tour de jouer ! Et si, ensemble, nous rendions gloire à toutes ces femmes musulmanes invisibilisées? Pour participer, présentez en quelques lignes grâce au hasthag #PowerOurStories l’une des femmes musulmanes d’antan que vous connaissez et qui à sa manière a grandement contribué à l’Histoire.

 

Ensemble, apprenons, créerons, diffusons.

Crédit image à la une : Imène. Imène est graphiste, illustratrice et rédactrice. Pour découvrir ses projets et travaux, je vous invite à visiter ses différentes pages :
➡️ benhimene.wixsite.com/nomfeminin
➡️ www.raconte-editions.fr
➡️ Et sa page Instagram @raconte_editions

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Femmes musulmanes dans l'histoire Portraits

L’histoire de Umm Waraqa

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[Article publié initialement le 7 mai 2019]
Durant ce mois de ramadan, #Lallab soutient le merveilleux projet Power Our Stories, créé par notre co-présidente Attika Trabelsi.
Attika relève le défi de vous faire voyager à travers l’histoire de 30 femmes musulmanes ayant grandement contribué au développement et à l’essor de l’islam.
Des femmes si importantes qui furent pourtant pour la grande majorité oubliées, invisibilisées ou bien même discréditées.
Mais si ces femmes ont existé, si elles ont coexisté, si elles ont gouverné, alors elles viennent faire voler en éclat les images et rôles auxquels certain.e.s tenteraient de nous assigner, nous femmes musulmanes.
Les mettre à l’honneur, c’est questionner, c’est revendiquer plus d’équité, plus d’égalité !

L’histoire d’Umm Waraqa comme l’ensemble des histoires des femmes que je vous partagerai durant ce mois sacré ont fait voler en éclat les connaissances que je pensais avoir au sujet de ma religion. Vous savez ce genre de connaissances que j’avais acquises au fil des discussions avec ma famille, mes camarades et professeur.e.s de cours islamiques, ou encore dans différents livres visant à m’expliquer ce qu’était ma religion.
Moi qui depuis mon enfance avais constamment entendu ou lu que l’imamat féminin était incompatible avec notre religion et par conséquent illicite, ai grandement été étonnée en faisant la découverte de cette fameuse Umm Waraqa.
Découvrir qu’une femme avait été en personne nommée par le Prophète Muhammad pour diriger les prières au sein de son quartier, m’a tout bonnement questionnée !
Cette rencontre imprévue fit naître en moi un nombre important de questionnements.
Comment se faisait-il que 1380 années après les 1ères révélations cette femme restait si peu connue des musulman.e.s ? Comment se faisait-il que malgré sa nomination à un rôle si stratégique et ce par le Prophète lui-même, le taux d’imame dans le monde aujourd’hui était proche de 0 ?

J’ai découvert la fabuleuse Umm Waraqa à travers les différentes prises de parole de femmes, dont celle de l’incroyable Amina Wadud, professeure d’études islamiques et figure de proue du féminisme musulman.  En continuant mes recherches pour approfondir sur le sujet, je suis tombée sur une étude très documentée du Canadian Council of Muslim Women traitant de la question épineuse de l’imamat féminin. Cette étude faisant acte d’une grande rigueur m’a permis de m’inspirer d’un grand nombre de sources. J’ai donc puisé toutes les informations pour constituer cette biographie grâce au travail mené en amont par des chercheuses musulmanes du monde entier que j’aimerais tant remercier.

Allez c’est parti, marchons ensemble sur les pas de la grande Umm Waraqa ! Accrochez-vous, vos idées reçues, si vous en avez, risquent d’être quelque peu mal menées !

 

Difficile d’attribuer à Umm Waraqa une date officielle de naissance, cependant il est aujourd’hui attesté qu’elle était l’une des nombreuses femmes faisant partie des compagnons du prophète Mohammed (pbl) vivant ainsi durant la 1ère partie du VIIème siècle. Issue de la tribu des al Ansari (les médinois.es), Umm Waraqa s’est très tôt convertie à l’islam et ce avant même l’arrivée du messager dans la ville de Médine. Elle fit donc partie de ceux et celles ayant laissé de côté leurs anciennes croyances, convaincu.e.s par les dires de Muhammad.

 

Passionnée et fervente croyante, Umm Waraqa se recueillait fréquemment spirituellement en puisant dans les textes coraniques, si bien qu’elle faisait partie des rares musulman.e.s de l’époque s’étant donnée pour mission de mémoriser les différentes révélations que Muhammad recevait. En raison de sa piété, de son intelligence—notamment émotionnelle—et de ses nombreuses connaissances, le prophète la forma et lui permit de diriger des prières mixtes. Aux environs de l’année 623, le nombre grandissant de musulman.e.s dans la ville renforçait le besoin d’une seconde mosquée, de par les distances qui séparaient un certain nombre de médinois du quartier où se trouvait la maison du prophète—maison faisait également office de mosquée principale. C’est ainsi que le prophète Muhammad (Paix et bénédiction sur lui) demanda à Umm Waraqa de diriger la prière dans son quartier, en lui mettant notamment à disposition un muezzin afin d’assurer un appel à la prière plus audible.

Umm Waraqa, touchée par cette demande, mit alors sa maison à disposition des croyant.e.s. Elle devint un lieu d’adoration, de transmission du savoir, d’amour et de retraite spirituelle.

 

Au-delà du fait d’être une femme pieuse et leader au sein de la communauté dans les 1ers temps de l’islam, Umm Waraqa fut également une femme d’action. Après que le prophète ait annoncé à sa communauté de fidèles qu’une bataille se tiendrait prochainement à la Mecque (la Bataille de Bader), cette dernière demanda aussitôt d’accepter sa présence et son soutien au front. Chose que le prophète lui refusa, non pas en raison du fait qu’elle était femme, mais de part les responsabilités de guide spirituel qui lui incombaient. En effet, durant ces batailles, bien d’autres femmes avaient pu accompagner et épauler le Prophète.

Après la mort du prophète, Umm Waraqa continua à occuper une place majeure dans le développement de la religion naissante. En effet, le calife Umar la nomma pour diriger les comités de marché de Médine et de La Mecque, rôle politique profondément stratégique de l’époque. Au-delà de cette fonction politique qui lui fut accordée, elle occupa également un rôle religieux majeur en rejoignant le comité de savant.e.s. Ce comité avait pour mission de travailler à la transmission du Coran ainsi qu’à sa compilation écrite sous le califat d’Uthman.

 

Aujourd’hui, personne ne conteste que le Prophète Muhammad lui-même nomma une femme, à savoir Umm Waraqa, pour diriger la prière. Cependant, les différentes sources en faisant acte sont souvent remises en question par certains savants ou imams sur un point qui se révèle être sémantique.

 

En effet, le prophète demande à Umm Waraqa de « diriger la prière dans son dar », le mot dar pouvant signifier en arabe maison ou quartier.

Ainsi certains dirigeants musulmans contemporains refusent le droit aux femmes de diriger des prières mixtes, partant du principe que le prophète aurait demandé à Umm Waraqa de diriger la prière au sein de sa maison, composée de 2 servantes et d’un servant, et non à l’ensemble de la communauté de son quartier. Or, si cette interprétation était valable, comment pourrait-on expliquer la nécessité de mise à disposition d’un muezzin cité également à plusieurs reprises ?

Quoiqu’il en soit, cette nomination par celui qui est un modèle pour les croyant.e.es devrait être, en soi, suffisante pour rendre crédit à l’imamat des femmes en islam aujourd’hui.

 

Lorsque je vois la violence physique et verbale auxquelles font face les femmes musulmanes revendiquant la légitimité de l’imamat féminin aujourd’hui, je ne peux m’empêcher de penser que ceux et celles qui s’opposent à leurs revendications font abstraction de tant d’années d’histoire(s) pourtant censées nous rappeler la nature et l’essence même du message qui fut révélé.

Alors, si Umm Waraqa fut en personne nommée, je ne peux m’empêcher de penser que cette objection constamment répétée est le fruit d’une réflexion peut-être bancale mais certainement patriarcale !

Donc oui, une fois de plus, l’histoire de Umm Waraqa nous rappelle la nécessité de production d’un savoir à travers la réécriture de l’histoire des femmes musulmanes ayant contribué au développement de l’islam. Elle nous rappelle également que le Coran atteste de la capacité des femmes à diriger une communauté tant sur le plan politique que religieux. Elle nous rappelle les places que nous sommes en capacité d’occuper et les rôles que nous avons à jouer.

Ainsi, la réhabilitation des places et rôles des femmes musulmanes dans l’historiographie nous permettra à nous, femmes et hommes musulmans aspirant à une spiritualité plus juste et plus équitable, de revivre le fondement initial de ce que pouvait être la foi musulmane d’antan.

Plus que jamais, il est de notre responsabilité de créer ce contre-pouvoir qui ne pourra être réel et audible que grâce à ce contre-savoir. En effet, pour parvenir à écrire l’ensemble de cet article, j’ai dû batailler pour trouver des sources ou références traitant du sujet autre que par la négation. Ainsi, j’aimerais conclure cet article sur la brillante conclusion proposée par le Canadian Council of Muslim Women nous rappelant ces mots du Coran : “En vérité, Dieu ne modifie point l’état d’un peuple, tant que les (individus qui le composent) ne modifient pas ce qui est en eux-mêmes.” (Coran 13:11)

 

Que le savoir soit notre arme, qu’il rende gloire aux principes d’équité, de justice et d’émancipation de l’islam. Principes tant dévoyés et par la même oubliés.

 

Alors ensemble, apprenons, créons et diffusons.

Crédit Photo Image à la une: Charlotte. Passionnée de dessin et notamment par l’univers de la mode, Charlotte est une illustratrice qui a son style bien à elle.
Retrouvez tous ses dessins sur : son insta @lapagedesign et son Facebook lapagedesign ch.

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Diffuse la bonne parole

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Femmes musulmanes dans l'histoire Portraits

Nusayba B. Ka’b Al Ansariyya : l’épée de l’inclusion

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[Article publié initialement le 6 mai 2019]
Durant ce mois de ramadan, #Lallab soutient le merveilleux projet Power Our Stories, créé par notre co-présidente Attika Trabelsi.
Attika relève le défi de vous faire voyager à travers l’histoire de 30 femmes musulmanes ayant grandement contribué au développement et à l’essor de l’islam.
Des femmes si importantes qui furent pourtant pour la grande majorité oubliées, invisibilisées ou bien même discréditées.
Mais si ces femmes ont existé, si elles ont coexisté, si elles ont gouverné, alors elles viennent faire voler en éclat les images et rôles auxquels certain.e.s tenteraient de nous assigner, nous femmes musulmanes.
Les mettre à l’honneur, c’est questionner, c’est revendiquer plus d’équité, plus d’égalité !

Il est des rôles qui aujourd’hui semblent comme par nature et par disons le aussi construit et acquis social revenir aux hommes. Pourtant, l’histoire que je vais vous raconter va nous rappeler avec force que l’assignation d’un genre à un rôle n’est pas chose naturelle. En effet, l’histoire que je m’apprête à vous conter se déroule en Arabie du VIIème siècle. Elle est celle d’une femme musulmane aux multiples facettes, aux multiples rôles, aux multiples visages. Elle est celle d’une femme qui fut mère, épouse, compagnonne du Prophète (Paix et bénédictions sur lui). Elle est celle d’une femme dévouée, portée par une croyance profonde en ses valeurs, celle d’une femme persévérante, combattante et inspirante. Cette femme, c’est Nusayba B. Ka’B Al Ansariyya, connue également sous le nom de Umm Ammara. Figure militaire, figure religieuse mais aussi figure féministe des 1ers temps de l’islam, Nusayba fait partie de ses femmes qui nous rappellent l’importance du rôle politique, religieux et social qu’ont pu et dû jouer les femmes musulmanes d’antan.

Avant de vous conter l’histoire de cette femme fascinante plus en détail, j’aimerais vous rappeler l’importance que revêt le travail de production et de réappropriation des savoirs, le travail de (ré)écriture de l’histoire sous le prisme féminin. En effet, si cet article vous est partagé aujourd’hui, c’est avant tout grâce au travail incroyable que mène un certain nombre de femmes depuis des années. Des femmes musulmanes ou non en quête d’émancipation, en quête de sens et de réponses, en quête de justice. Ces femmes sont convaincues que le message de l’Islam est émancipateur et instaure l’équité des droits et devoirs entre les hommes et les femmes au sein de la société. Elles luttent ainsi quotidiennement en ce sens à travers leurs productions et leurs écrits. Ainsi, j’aimerais mentionner le travail réalisé par ces femmes m’ayant permis de collecter les informations nécessaires à la rédaction de cet article à l’image des travaux réalisés par l’incroyable magazine féministe américain Muslim Girl mais également par la professeure en sciences islamiques à l’université d’Oxford, Elisabeth Kendall.

Ensemble embarquons pour un voyage dans le temps, laissons nous embarquer à la rencontre de l’incroyable Nusayba.

Membre de la tribu des Najjar, Nusayaba fit partie des premiers.es converti.e.s de l’islam dans la ville de Médine. Son soutien sans faille, son intelligence, sa bravoure et son courage lui valurent d’être l’une des compagnonnes renommées parmi les illustres compagnons du Prophète Muhammad (pbl). Cette place occupée par Umm Ammara nous rappelle avec force les liens de confiance, de bienveillance, de proximité qui régnaient alors entre les femmes et les hommes au sein de Médine au VIIème siècle mais également le respect mutuel que les un.e.s éprouvaient pour les autres. De par son maniement de l’épée et du bouclier, ses connaissances religieuses et ses questionnements précurseurs, Nusayaba devraient être un modèle à suivre pour chacun.e d’entre nous. Dans un grand nombre de chroniques, les responsabilités notamment militaires de cette dernière nous invite à voir l’engagement sans faille et la contribution que certaines femmes ont pu avoir dans les années stratégiques et fondatrice de cette nouvelle religion qu’était l’Islam. C’est souvent comme guerrière ayant fait sacrifice de sa vie et de celle de sa famille par amour pour le Prophète (pbl) qu’Umm Ammara est présentée. En effet, c’est lors de la bataille de Uhud en 625, bataille opposant les musulman.e.s aux Mecquois que Nusayaba s’est révélée. Lors de cette bataille, voyant que le Prophète Muhammad (pbl) étant en difficulté, cette dernière est personnellement venue combattre à ses côtés tenant ainsi en déroute un grand nombre d’opposants, sauvant par la même occasion la vie du Messager (pbl). A la suite de cette bataille, le Prophète (pbl) en personne lui demanda de l’assister sur un certain nombre d’autres batailles, faisant ainsi d’elle l’un.e de ses gardes du corps. Cependant, bien qu’elle ait combattu au côté du Prophète (pbl) de l’Islam à plusieurs reprises, Nusayba ne peut être réduite à ce seul rôle militaire comme certains aimeraient de l’assigner ; Umm Ammara est en réalité bien plus.

Ses connaissances au-delà d’être militaires sont aussi religieuses et philosophiques. En effet, elle était aussi une femme de savoir, faisant partie de celles et ceux qui s’intéressaient de près aux révélations coraniques, étudiant, apprenant et se questionnant sur le sens des versets ainsi nouvellement révélés. De ce fait, Nusayaba fut la première femme d’entre tous les croyants et croyantes à se questionner sur la notion d’inclusion dans les versets du Coran révélés jusqu’alors. Alors que les premiers versets ne faisaient référence qu’aux hommes, Nusayba se rendit un jour auprès du Prophète (pbl) et lui demanda pourquoi le Coran ne faisait référence qu’aux hommes mettant ainsi tout un pan de la communauté musulmane de côté : les femmes. Quelques temps après, les futures révélations transmises au Prophète (pbl) s’adressèrent tant aux hommes qu’aux femmes. Ce verset en fait référence : « Les musulmans et les musulmanes, les croyants et les croyantes, les hommes pieux et les femmes pieuses, les hommes sincères et les femmes sincères, les hommes patients et les femmes patientes, ceux et celles qui craignent Dieu, ceux et celles qui pratiquent la charité, ceux et celles et observent le jeûne, ceux et celles qui sont chastes, ceux et celles qui invoquent souvent le Nom du Seigneur, à tous et à toutes, Dieu a réservé Son pardon et une magnifique récompense. » Coran 33.35

Cet épisode aujourd’hui peu relaté semble pourtant essentiel. Umm Ammara aurait-elle donc été à l’origine d’une certaine conscientisation de la place des femmes dans les écrits du Coran ? Cette interrogation soulevée par Umm Ammara et la réponse qui lui fut apportée par le divin révèle la dimension inclusive que l’islam tend à offrir à l’ensemble des croyants et tout particulièrement des croyantes. La légitimité et les réflexions ayant découlées des questionnements formulés par Nusayba, femme du VIIème siècle se présentent comme un pied de nez historique. Lorsque l’on sait qu’à son époque, ses propos furent écoutés et entendus avec dignité et respect, il est fascinant de faire le parallèle avec la violence et le rejet frontal auquel nous femmes féministes faisons face aujourd’hui lorsque nous tentons de faire accepter une vision inclusive dans nos sociétés contemporaines.

Qu’on ne s’y trompe pas, cet article n’a pas pour but de faire l’apologie de la guerre ou d’une quelconque violence. Aussi étonnant que cela puisse paraître, durant mes recherches, je suis tombée sur un nombre important de vidéos, articles ou blogs utilisant la compagnonne Nusayba comme argument au devoir de participation des femmes à une pseudo “guerre sainte” qui serait menée au nom de l’Islam. Cet article a pour unique objectif de rendre hommage à une femme aux multiples talents afin de nous rappeler qu’à travers l’histoire et le développement de l’Islam, de nombreuses femmes nous ont ouvert la voie pour la construction d’une société plus juste et inclusive. Cela nous montre qu’énormément de femmes ont joué des rôles politiques, religieux et militaires importants et stratégiques. Rendons donc hommage à cette femme qui, au-delà d’être une “simple” guerrière est avant tout un modèle de persévérance, de détermination et de justice.

Crédit image à la une : Houda Damouch, designer et architecte d’intérieur, artiste peintre de formation et de passion. « J’aime à dire que l’art peut s’exprimer de bon nombre des manières, cultiver son être avec minutie et patience comme on cultiverai une fleur délicate est aussi un art. Je me passionne aussi pour le savoir, celui qui nourrit le corps et l’âme, celui qui réforme l’esprit par la sagesse »

Son compte insta : @houdhouda_
Sa page Facebook : /D.sign.HD

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