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Habiba Bent Mouloud : « Réveille la Bédouine en toi »

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A toi de t’assumer et d’être qui tu es pleinement. Là est le remède. » Comment oublier cette phrase, issue du livre Réveille la Bédouine en toi ? Écrit par Habiba Bent Mouloud, créatrice de la marque de foulards minimalistes Bédouine, il s’agit du genre de récit que l’on dévore d’une traite et que l’on referme en se sentant différent·e.

 

« La Bédouine, je la vois comme une femme de force, qui sait lutter contre les tempêtes de sable dans le désert. Je me considère comme une Bédouine en Occident, car je trace mon chemin malgré le fait que l’on essaye de me faire trébucher. Je reste digne, droite et je marche avec ambition. Une Bédouine, personne ne peut la mettre à terre. » Habiba Bent Mouloud plante le décor, entre deux verres de thé à la menthe.

 

« Je suis une femme libre, portant le voile, chef d’entreprise, épouse épanouie, mère de famille dévouée… Bref, une femme qui n’a nullement l’intention de nager à contre-courant de ses valeurs », écrit la jeune créatrice dans son livre. Il y a quelques années, alors qu’elle se préparait pour emmener sa première fille chez le pédiatre, elle laisse échapper près de son bébé l’une des épingles avec lesquelles elle attache son foulard. « J’ai directement eu un flash : j’ai vu le concept du hijab Safar, que j’ai créé ensuite. » Un voile de qualité que l’entrepreneuse a passé des années à mettre au point. Cousu dans une matière au retombé parfait, avec bandeau intégré et clips, il se suffit à lui-même : « Il est minimaliste, à mon image ». Dans son concept, tout est soigné, jusqu’au moment où l’on reçoit son colis, le hijab soigneusement emballé dans son petit pochon, délicatement parfumé et accompagné d’un mot manuscrit personnalisé.

 

Le concept de hijab Safar, porté par @sakinabblog. Crédit photo : Bédouine

 

 

« Dieu ne t’a pas sauvée pour que tu ne fasses rien de ta vie. »

 

Dans Réveille la Bédouine en toi, Habiba Bent Mouloud reprend son parcours de A à Z :

« Le livre n’était pas prévu. Jamais dans ma vie je ne pensais que j’allais écrire un livre ! Moi qui fais des fautes d’orthographe même en parlant ! », plaisante-t-elle. « Et pourtant, je l’ai fait. Quand tu te débarrasses de toutes tes barrières psychologiques, de tes croyances limitantes, tu es capable de faire beaucoup de choses et tu vas au-delà de ce que tu aurais imaginé faire. » L’idée de ce récit est née au fil des salons qu’elle écume en France pour faire connaître sa marque. « J’ai remarqué qu’on me posait beaucoup de questions et que je pouvais transmettre des choses à travers mes petites anecdotes, j’ai vu la motivation que j’apportais. J’ai eu un déclic : juste avant d’avoir ma troisième fille, j’ai accouché de mon histoire sur le papier. »

Elle y aborde son cheminement, sans tabou mais avec beaucoup de pudeur. Tout commence avec ces deux fois où, encore bébé et enfant, elle frôle la mort : « Quand ma mère m’a raconté ça, je me suis dit ‘Dieu ne t’a pas sauvée à maintes reprises pour que tu ne fasses rien de ta vie, que tu n’apportes rien au monde’ », explique-t-elle aujourd’hui. Elle ne cache rien des difficultés qu’elle a rencontrées, notamment avec sa décision de porter le voile, qui a fait trembler jusqu’à sa propre famille. Elle insiste également sur les retombées de son voyage à La Mecque : « J’ai pu y goûter au désert, au minimalisme pur. Nouveau déclic, en rentrant chez moi, j’ai tout trié. D’abord le matériel : j’ai vendu ma télé, mon canapé, je voulais me débarrasser de ce qui m’encombrait. On aurait dit que je déménageais ! J’ai aussi fait le tri du côté des gens : l’entourage toxique, les personnes sans ambition qui me freinaient… En enlevant le superflu, j’ai vu plus clair. J’étais face au désert que représente ma vie et j’ai eu l’idée du concept Safar et du lancement de mon entreprise. »

 

Celle qui me confie qu’elle se pensait « juste capable de réaliser une génoise aux pêches » se lance. « Je ne m’imaginais pas ne rien faire de mes dix doigts. Ce n’était pas du tout un besoin d’argent, mais je ne me voyais pas être juste mariée, avoir des enfants et gérer mon foyer. J’avais besoin de plus, d’avoir quelque chose qui m’appartient vraiment. Au final, aujourd’hui, cela m’aide à être une femme épanouie : je suis là pour mes enfants, mais ils ne me voient pas faire mon ménage et zapper devant la télé. Ils voient une femme heureuse, active. Et je pense que cela va aussi avoir un impact sur leurs propres vies : je suis sûre que je suis en train d’élever de futures entrepreneuses. »

 

Crédit photo : Bédouine

 

 

Une détermination à toute épreuve

 

Ses origines, sa foi, Habiba les revendique profondément. « Quand je dis aux gens ‘ma marque s’appelle Bédouine’, des fois, j’ai des réactions du type : ‘oh… encore une Maghrébine qui parle de ses origines, elle nous fait honte…’. Non, au contraire ! Moins tu assumes qui tu es, plus tu vas pousser les gens à te rabaisser, puisque toi-même tu ne t’acceptes pas. Moi, je suis née en France, dans le fin fond du Sud-ouest, et pourtant je suis très fière de mes racines qui sont au Maroc », explique-t-elle.

 

Lucide sur les difficultés d’intégration des femmes voilées et/ou racisées dans le monde du travail en France, elle regrette : « Aujourd’hui, quand on se présente à un entretien, c’est rare que l’on soit pris·e si l’on est issu·e de la diversité, et encore plus si l’on est voilée ». Mais rien n’entache son optimisme. « Notre intégration se fera, mais cela va être long. Le chemin qui va nous y mener le plus rapidement, c’est l’entreprenariat. On ne nous laisse pas notre chance, donc ce que l’on doit faire, c’est être positives et voir loin : développer nos compétences, créer des boîtes, nous rendre visibles pour arriver à nous asseoir à la table des grands patrons et ainsi nous intégrer petit à petit au monde du travail. Je fais mon bonhomme de chemin, je vais voir des fournisseurs, je rencontre d’autres professionnels du milieu et parfois, je me dis ‘ah oui, c’est vrai que je suis voilée’, c’est un détail que j’oublie ! Et du coup, eux aussi l’oublient. Ils n’ont plus en tête l’image infondée de la femme voilée inculte : je suis devenue une cliente lambda, une personne à part entière, qui a sa boîte et sait la gérer. Il faut que l’on cesse nous-mêmes de nous considérer uniquement comme des femmes voilées. »

 

Avec son livre, Habiba encourage chacun·e d’entre nous à se révéler : « Pour se lancer, il faut faire un cheminement dans son propre désert. Il faut se libérer de tous ces trucs qui obstruent notre vue : les séries télé, les réseaux sociaux, la télévision… On ne se retrouve jamais avec soi-même pour réfléchir. Il faut déterminer la chose que l’on peut passer des heures à faire sans voir le temps passer et ne pas se cantonner à ce que l’on voit autour de nous. Moi-même je design des modèles que je suis la seule à vendre : car c’est moi qui les ai inventés. Tout le monde vend des foulards carrés ou rectangulaires, moi non ! Il y a de la place pour tout le monde. »

 

Crédit photo à la une: Habiba Bent Mouloud

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Ramadan est fini – et maintenant, on fait quoi ?

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Cela fait maintenant deux semaines que le mois de Ramadan est parti. Deux semaines que nous vous avons souhaité « Aïd moubarak », et que nous vous avons proposé de garder 8 bonnes habitudes prises pendant ce mois béni.
Et d’un point de vue spirituel ? Deux options s’offrent à nous : refermer cette parenthèse et retourner à nos habitudes en attendant le prochain Ramadan… ou poursuivre sur notre lancée pour progresser tout au long de l’année, et ainsi accueillir le prochain en étant meilleur·e·s que cette année.

Ramadan est véritablement un mois spécial dans l’année. Nous accentuons nos efforts pour repousser nos limites, améliorer notre comportement, et redoubler d’attention envers les nécessiteux. Le tout avec l’objectif de nous rapprocher de Dieu :

Ô les croyants ! On vous a prescrit le jeûne comme on l’a prescrit à ceux d’avant vous, ainsi atteindrez-vous la piété.

Sourate 2 (Al-Baqara, La vache), verset 183

De ce fait, je suis souvent déçue lorsque j’entends dire que la finalité du mois de Ramadan est de nous mettre à la place des plus démuni·e·s. Certes, cela fait partie des bienfaits et des enseignements de ce mois, mais cette explication me paraît réductrice. Il serait dommage de passer à côté de l’opportunité que représente Ramadan pour nous développer pendant les 11 autres mois de l’année…

Devenir une meilleure version de nous-mêmes

Contrairement aux idées reçues (que nous, musulman·e·s, contribuons malheureusement parfois à répandre), le jeûne du mois de Ramadan ne se limite pas à une privation de nourriture, de boisson et de relations sexuelles du lever au coucher du soleil. Il s’agit également d’un jeûne de tous nos sens et de tous nos organes, censés s’abstenir de tout comportement néfaste, à commencer par notre langue. Il est dit dans un hadith (parole ou acte du Prophète) rapporté par Abou Hourayra et authentifié par Cheikh Albani :

Il est possible qu’un jeûneur n’ait comme part de son jeûne que la faim et la soif.

Ce hadith fait référence à des personnes qui ne récolteront pas la récompense promise par Dieu aux jeûneurs·ses. Il est généralement mentionné pour rappeler l’interdiction du mensonge, de la médisance et des mauvaises paroles, qui nous privent de la récompense et du pardon divins que nous espérons obtenir pendant Ramadan.

Ce mois sacré représente donc une école, une forme d’entraînement pour travailler sur nos défauts et parfaire notre comportement.

Des facilités pour nous aider à progresser

Pendant Ramadan, nous sommes ainsi encouragé·e·s à revenir à l’essentiel, à méditer, à prendre conscience des bienfaits de Dieu, à renouer ou renforcer les liens de parenté, à prendre soin de nos parents, à soigner nos relations avec nos voisin·e·s, à partager de nos richesses avec les pauvres, les orphelins et les voyageurs, etc. Toutes ces choses sont bien sûr demandées par l’islam tout au long de l’année, mais pendant Ramadan, des circonstances particulières nous sont accordées afin de nous encourager et de nous faciliter la tâche.

Tout d’abord, nous sommes incité·e·s à agir par la promesse divine que les récompenses seront démultipliées pour chaque bonne action accomplie pendant ce mois béni. Durant les dix dernières nuits, et plus particulièrement les nuits impaires, les musulman·e·s redoublent de ferveur dans leurs prières et leurs aumônes, dans l’espoir que leurs efforts coïncideront avec la Nuit du destin, dont la valeur est supérieure à mille mois :

Nous l’avons certes fait descendre [le Coran] pendant la nuit d’Al-Qadr. Et qui te dira ce qu’est la nuit d’Al-Qadr ? La nuit d’Al-Qadr est meilleure que mille mois.

Sourate 97 (Al-Qadr – La destinée), versets 1 à 3


Crédit photo : Michael Foley

Dans Sa Miséricorde, Dieu nous accorde aussi des facilités inégalées le reste de l’année. Dans un hadith rapporté par Abou Hourayra et relaté dans les Sahih de Bukhari et Muslim, le Prophète nous informe :

A l’arrivée du Ramadan, les portes du Paradis sont ouvertes, celles de l’Enfer fermées et les démons enchaînés.

Certes, même sans démons, nous avons toujours nos propres défauts à combattre – mais ces conditions créent un environnement propice à un « coup de boost » dans notre spiritualité et notre développement personnel.

Un tremplin pour continuer à cheminer le reste de l’année

En sachant tout cela, devons-nous penser que le Ramadan est un « one shot », une occasion unique où nous fournissons autant d’efforts… pour ensuite retourner à notre point de départ ? Les circonstances exceptionnelles qui caractérisent ce mois ne doivent pas nous faire perdre de vue que notre but est d’être épanoui·e·s dans notre relation à notre Créateur, et exemplaires dans notre comportement avec toutes Ses créatures – chaque jour de l’année.

Pendant un mois entier, nous nous sommes privé·e·s de nourriture. Nous avons lutté contre nos défauts. Nous avons développé notre générosité et notre empathie. Pourquoi laisser tomber tous ces efforts et retourner à la case départ, au lieu de voir ce mois comme un entraînement intensif, qui nous a permis de relever le niveau pour toute l’année à venir ? Un peu comme un cours nous permettant de passer à la classe supérieure… Sauf que j’ai parfois l’impression que nous fournissons beaucoup d’efforts pendant Ramadan pour nous élever spirituellement, et lorsque l’Aïd arrive, nous nous relâchons complètement, comme si notre quête spirituelle se limitait à un seul mois dans l’année. Il nous paraîtrait pourtant aberrant de travailler sans relâche pour avoir le poste de nos rêves, pour ensuite démissionner deux jours après l’avoir obtenu… Sans oublier que dans le Sahih Bukhari, le Prophète nous donne un précieux conseil dans notre cheminement :

L’action la plus aimée de Dieu est l’action la plus régulière et la plus constante, même si elle est petite.

Autrement dit, il est important d’avancer pas à pas, au lieu de nous épuiser dans un sprint religieux, jusqu’au point où la fin du Ramadan est parfois vécue comme un soulagement. Essayons plutôt de considérer cette période comme l’occasion de nous défaire de nos mauvaises habitudes et d’adopter celles que nous voudrions maintenir tout le reste de l’année. Ce mois, par ses circonstances particulières, son atmosphère de ferveur et la solidarité qui y règne, est le contexte idéal pour nous dépasser et avancer vers le prochain niveau de notre développement personnel et spirituel. Résister aux choses illicites et nuisibles pour nous et pour les autres paraît plus abordable, lorsque nous avons réussi à renoncer à des choses licites simplement par amour pour Dieu.

Par ailleurs, les théories actuelles de développement personnel soulignent souvent qu’il faudrait 21 à 30 jours pour adopter une nouvelle habitude – le mois de Ramadan est donc l’occasion rêvée de le faire. Il faut toutefois un peu plus de temps (au minimum 2 mois) pour que cette habitude soit ancrée et devienne automatique. A nous, donc, de poursuivre nos efforts et de profiter de ce nouveau départ que nous avons tou-te-s pris en jeûnant, en apprenant à nous contrôler et en purifiant nos âmes des désirs de ce bas-monde.

Faisons en sorte que Ramadan ne soit pas la fin de la course, mais un tremplin pour évoluer toute l’année et être encore meilleur-e au moment d’accueillir le prochain, si Dieu nous accorde cette faveur…

Image à la une : mosquée Nasir al-Mulk à Shiraz, en Iran – Crédit Women SenseTour – in Muslim Countries

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Diffuse la bonne parole

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