Ce que notre Sensualité doit à la Nuit

par | 9/05/21 | (Dé)construction, Dossiers, Nos Voix, Sentiment amoureux en Islam

J’ai, passée à mon cœur, je crois bien, une laisse :
Laylâ me traîne ainsi partout, et je la suis.
La nuit est mon chemin, mon voyage : il me semble
Être le fou dont tout le corps se désassemble. 
Majnûn, Le Fou de Laylâ

 

Si la Nuit était un parfum, il serait celui de ma mère. Musqué, fort, envoûtant

«  Mama, t’es belle » Un soir, je la vois dans le salon, habillée d’un caftan bleu, maquillée, prête à partir, la nuit. Où ? je ne sais pas. Revient à moi seulement son odeur qui exalte la pièce. Mais je ne redoute pas l’abandon de l’enfant qu’on sépare de sa mère. Non, juste une impression forte que durant la nuit devaient se jouer des phénomènes affriolants, palpitants, hors du commun. Plus tard, devenue une clubbeuse invétérée, conquérir la Nuit me donnait un sentiment de toute-puissance. Que ce soit à New York, Paris ou Berlin, ce monde interlope et si incertain était désormais à moi. Au petit matin, j’avais séduit la Nuit et je rentrais avec elle. 

C’est lors de mes premières veillées durant le mois du Ramadan, que je me suis véritablement appropriée la Nuit. L’ambiance feutrée du Shor m’émoustillait. C’était si excitant d’être réveillée, pour partager le dernier repas avant l’aube. J’aimais cette atmosphère si particulière. D’inverser les rythmes. De bouleverser les habitudes. La Nuit prend le pouvoir et arrête le Temps. Durant le jour, privés d’eau et de nourriture nos sens sont à l’affût, et deviennent très sensibles. Tout notre être est contraint au désir. Les dernières heures sont intenables parfois. Après le Ftor, c’est une explosion orgasmique. L’abondance des plats, des couleurs, des effluves, des sapidités, épicées, sucrées, aguichent notre corps en manque. Un met qui peut sembler si banal en temps normal prend une toute autre saveur, presque aphrodisiaque. Déguster de la bonne chère, tout en subtilité, en devient un plaisir charnel. Cet abandon organique permet même à notre spiritualité d’être plus réceptive. Prier la nuit à la mosquée pour les tarawih, rend l’expérience mystique. Les nuits du Ramadan deviennent un territoire nouveau à explorer, pour nos sens, notre corps et notre esprit. On y déambule pour fuir la Vanité du monde et cultiver les élans du cœur et du corps. 

 

C’est dans l’interstice de la nuit et de sa voûte céleste , que l’œil entrevoit l’au-delà et le plus profond de l’âme. «  Ô Nuit, ô mes yeux »  chantait Oum Kalsoum. 

Les Musulmans sont une nation faite pour l’Amour et pour la Nuit. Dans l’âpreté du jour, les Arabes, peuple du désert, entretiennent un lien particulier avec la Nuit. En réalité, la Nuit revêt une dimension sacrée dans l’Islam et ce depuis l’origine. C’est durant la nuit de Layl Qadr, que le Prophète reçut le message divin. Observer, dans l’étendue de la Nuit, le hilal pour connaître le début du mois sacré,  pousse , les siècles suivants, les Musulmans à exceller dans les sciences de l’astronomie. Tant ils sont fascinés par l’immensité de la Nuit cosmique. Et ils apporteront une contribution majeure à l’humanité. Le croissant de lune n’est-il pas le symbole de l’Islam ?Et Leila/Layla,  prénom si doux et délicat qui signifie nuit,  est probablement l’un des plus populaires et intemporels dans notre culture. 

En 2011, la Nuit a insufflé un vent de liberté aux Révolutions arabes, et je pense à cette jeunesse égyptienne, rebelle et avide, investissant la place Tahrir tous les soirs pour contrer le pouvoir. La Nuit est politique. La Nuit est inspirante. 

C’est sous les étoiles, que les poètes soupirent les tourments de leur cœur. La Nuit devient confidente. Habibi Leil. C’est au clair de Lune, que les amants se livrent et se délivrent . La Nuit devient voluptueuse. C’est dans les ténèbres que se distinguent le mieux les lueurs des rêves, de l’espoir et de l’amour. La Nuit sonde nos âmes et inspire les artistes. Jamais l’occurrence d’un mot ne fut aussi manifeste dans l’histoire de l’art musulman. Mahmoud Darwich, Maari, Mashrou Leila… Écrivains, cinéastes ou chanteurs, d’hier et d’aujourd’hui, ont tous cédé au charme de la Nuit. Et bien entendu, comment ne pas évoquer l’œuvre monumentale des Mille et Une Nuits ? Ce recueil perse traduit en arabe dans la moitié du IX e siècle va connaître un tel succès après la traduction d’Antoine Galland en 1704, qu’il va souffler un vent de libertinage en Europe. La sensualité de l’Occident doit beaucoup aux Nuits arabes. Pendant mille et une nuits, Schéhérazade retarde sa mort en racontant au roi Sharyar des récits fantastiques, réalistes ou érotiques. Elle finit par triompher grâce à sa finesse d’esprit. La Nuit a sauvé Schéhérazade et toutes les autres femmes. Gloire à la Nuit ! 

 

La fin de ce mois béni approche, et je me suis glissée dans la peau d’une conteuse, comme dans la tradition, pour lui faire une déclaration d’amour. C’est dans les confins de la Nuit que mon âme a failli et défailli. C’est dans ses bras que j’ai pleuré et aimé.   Pour ces dernières nuits du Ramadan, comme un présent , j’offre une ode à ma dulcinée. 

Car ma sensualité doit beaucoup à la Nuit…

 

Amies de l’Amour, insomniaques poétiques, jeûneuses du Ramadan, si nous sommes réunies ce soir, c’est que je dois vous délivrer un message de la plus haute importance…Chut…Cela doit rester entre nous. Approchez. Encore un peu. N’ayez crainte. Sachez que pour cette dernière décade de ce mois sacré  , les portes des enfers sont fermées et les djinns sont enchaînés. Nulle d’entre vous ne sera inquiétée par ce secret longtemps gardé. Amies de l’Amour, il est temps que je vous conte l’histoire de cette femme qui avait rendez-vous avec la Nuit. Jadis, il est dit qu’elle était l’amante de la Nuit. 

En ce mois béni, la femme va enfin dire sa Vérité. 

 

Ce soir, j’ai rendez-vous avec la Nuit

 

Al Leil. Leili. Habibi Ya Leil. 

Que j’aime la Nuit.

Dans la chaleur de l’été, les enfants, condamnés, subissent le supplice ultime de la sieste et attendent la prière de l’Asr pour être libérés.

Après le Dhor, le soleil de l’Orient est impitoyable. La Ville fuit. La Ville se calfeutre. La Ville se tait. Derrière les persiennes, elle observe la torpeur qui envahit les ruelles et le silence qui la livre au sommeil. 

La Ville s’arrête. Le Temps s’arrête. Alors j’attends. Mon rendez-vous

 

Ce soir, j’ai rendez-vous avec la Nuit

Le lieu de ce Date amoureux est un stah. Celui de la maison de mes grands-parents. Cette terrasse d’été surplombe la Ville. À la prière de l’Asr, je m’y précipite pour assister au lever nocturne de la cité. 

Je l’attends. Le cœur battant. Le cœur impatient. 

Les ombres des habitations aux murs décrépits dessinent un horizon aux reliefs escarpés. Sur les stah, des antennes de télévision surgissent dans l’ocre du crépuscule, et le Cherghi du Sud fait danser le linge suspendu. Sur les toits, les cigognes élégantes regagnent leur nid perché. 

Délivrées par le soir, les rumeurs de la Médina en éveil viennent à moi.

Au loin, chahutent des moteurs de mobylettes intrépides, et des klaxons du trafic s’agacent. Les mégaphones des minarets retentissent à nouveau . C’est l’al Maghreb. Le chant des mueddins drape le soir de ce doux juillet. Les essences de fleurs de bougainvilliers embaument l’atmosphère. Les cigales entonnent leur sérénade nocturne. La Nuit s’allonge, sensuelle, sur le divan du Couchant. Et se confie à moi.

Enfin. Tout est en place pour notre tête-à-tête 

Je l’accueille et la cueille. Comme une fleur de jasmin. Une fleur de jasmin d’une nuit de juillet. Chère à Mahmoud Darwish.

À mesure que le rose du ciel se tamise, les lumières dansantes de la Médina scintillent. Plus tard, quand j’entre dans la Nuit profonde et veloutée, apparaît un miroitement brillant et ambré du ciel étoilé dans la ville. 

Que c’est beau une ville la Nuit. Aujourd’hui. La Nuit est mon amante, je la trompe avec le Jour. Pas aujourd’hui. Plutôt ce soir.

 

Ce soir, j’ai rendez-vous avec la Nuit.

Cette fois-ci avec une autre. Une autre Nuit. En fait je vous l’avoue, je suis une femme infidèle. Je me console en réalité dans les bras d’une nuit, chaque soir. Je crois qu’elles sont mille et une. Et bien plus. Nuit d’été, nuit courte, nuit blanche, nuit noire. Nuit du Ramadan. J’ai l’embarras du choix.

Ce soir, j’ai rendez-vous avec une nuit. Chez moi. C’est une nuit d’hiver. Une nuit d’Occident. Longue et vaporeuse. Cette Nuit aime jouer. Et se joue de moi. Elle chante et rit fort. Cantatrice et vile tentatrice. Une Drama queen. 

Dans la brume, la Nuit entre en scène. 

Fantasque, imprévisible, impossible. 

Quand les lueurs s’estompent, quand le lointain devient nébuleux,  

Quand le dôme étoilé enveloppe l’univers , 

Entre terre et ciel, mes repères disparaissent. 

La Nuit est une Reine. Reine de la nuit. Une Nuit d’opéra. Baroque. Inquiétante. 

Au fur et à mesure, son récital métamorphose mon décor en scènes chaotiques, les éléments prennent l’allure de créatures fantastiques. Son chant altère ma vue et affûte mes autres sens. Des ombres mouvantes et fantasmagoriques s’étirent dans ce noir incertain. Chaque vocalise me semble suspecte. Chaque note murmurée me paraît soufflée par un esprit. Surgissent alors, dans ma chambre d’enfant, mes terreurs originelles. Brusquement, la Nuit prend la forme d’une hydre, envahissante et lyrique. Sa voix me saisit et me plonge dans une autre dimension. De l’autre côté du miroir. Je ne résiste pas à la Nuit. Jamais. Qui le peut? 

Indomptable. La Nuit est fauve. 

Dans cette mise en abîme sauvage, je croise d’autres bêtes de scène. 

Des vagabonds maudits, des bohèmes écorchés, des clubbeurs surnaturels, des génies psychédéliques, des nymphes étincelantes. Traqués par le Jour, ils éclairent l’obscurité. 

Une musique insomniaque, des profondeurs des Enfers, ressuscite ces harpies flamboyantes.  Sous les néons hypnotiques,  j’entre et je m’enflamme, 

Sur les dancefloors épileptiques, je danse et je transe. Les rythmes des basses sous acide convulsent mon corps, et je cède au tarab de la Nuit. 

Dans sa fièvre, la faune somnambule perd la tête. Fait tomber les masques. 

Les remplace par d’autres. 

Des masques choisis, phosphorescents, insolents. Pour défier l’ordination sociale du Jour

Ces oiseaux de nuit ne peuvent être capturés. De véritables Djnouns. Et Majnouns. Des Kaïs possédés par la Nuit. Des fous de Layla.

La Nuit est cet espace-temps qui cultive les interdits, et cache les bandits. La Nuit, j’ai peur. Nuit tu me fais peur. La Nuit est le lieu de tous les dangers. La Nuit est sans témoins à charge. 

La Nuit je mens. La Nuit me manque. 

La Nuit fuit. Elle est la temporalité qui échappe au pouvoir, à l’ordre, au jugement. La Nuit provoque en duel le politique. Par ces temps de couvre-feu et de restrictions, jamais la Nuit n’a été aussi transgressive. 

La Nuit tutoie les dominants et refuse de se soumettre. 

Scandaleuse.

La Nuit est une femme

Outrageusement continent noir

Secrète, accueillante, abritante

Vaginale et utérine. 

Al Rahim. C’est dans la Nuit que la Lumière fut. C’est dans la Nuit, que nous prenons vie. C’est dans ma Nuit, que je donne vie. 

La Nuit est l’origine. Du monde. Elle en sera la fin. 

 

Ce soir, j’ai rendez-vous avec la Nuit.

La Nuit est l’infini. L’infini du ciel extatique. Dans le noir sidéral, ma vue décline et s’incline. Avec la Nuit, je m’éclipse. En apesanteur, j’explore son corps. Dans la cécité absolue, mes autres sens se décuplent et se délectent. Du velours de sa peau, des arômes de sa chevelure et du nectar goûtu du fruit défendu. Leil Hob. La Nuit tombe et sa chute m’entraîne dans un précipice de plaisirs cosmiques. Une chute de reins vertigineuse qui appelle à l’Amour. Cambrure céleste. Je glisse sur les courbes aériennes de la Nuit callipyge. Voltige nuptiale. Les caresses du clair de Lune illuminent ma chair, et mes lèvres gourmandes goûtent les baisers sucrés des étoiles. 

Ce soir, je m’accouple avec la Nuit. Nuits de noces et Lune de Miel. Miel de lune qui coule et enduit délicatement les abîmes de nos constellations. Je bois les paroles de mon amante, je savoure l’onctuosité de sa Voie lactée. Je m’enivre. Nuit d’ivresse. La Nuit est le temps des amants. 

 

Ce soir, j’ai rendez-vous avec la Nuit.

C’est en elle que je me réfugie. Quand le jour se lève, la Nuit devient le sanctuaire de mon âme. En elle, mon cœur est à l’abri. Dehors, les flammes du Jour sont un enfer. Dans le clair-obscur, mes nerfs échaudés trouvent un peu de réconfort. Loin de la fureur du Jour, je fais vœu de silence. J’entre dans les ordres de la Nuit. Mes sens se recueillent dans le cloître de mon être tourmenté. Incertain. Nuit du Doute. La Nuit doute. De moi. Comme ma foi. La Foi est intime avec la Nuit. La Nuit est adultère. La Nuit est l’amante de la Foi. Maudites. Entre elles et moi, les liaisons sont dangereuses. Je retiens la Nuit. Je retiens ma Foi. Je m’accroche à elles. Ces maîtresses diaboliques me trahissent. Ensemble, elles me révèlent. Lèvent le voile. Lèvent les voiles. Et m’embarquent dans une spirituelle odyssée voguant sur une mer agitée. 

En plein milieu de l’océan, j’ai le mal de mer et les rivages de la Vérité me semblent bien lointains…

Sur les flots de mon esprit torturé, je navigue à vue dans le brouillard de mes émotions, Le vague à l’âme, j’espère trouver ma terre ferme dans la tempête de ma déraison. 

 

Ce soir, j’ai rendez-vous avec la Nuit

Le Destin en a décidé ainsi. Mektoub

Dans cette lumière aveuglante, la Vérité ne se distingue pas du Mensonge.

Dans cette contrée inconnue, les sables sont mouvants et en mouvement. Les dunes trompeuses et les mirages fabulateurs. 

La magie du Désert est fourbe. Dans ma traversée, le Soleil âpre est sans répit. Pas l’ombre d’une certitude. Mon âme est asséchée. Ma Foi vacille et recherche la Nuit. Désespérément. Ma vue se trouble. Et puis plus rien. 

À mon réveil, ma Conscience m’abreuve. Une femme de bien assurément.

Elle me conseille d’attendre la Nuit pour reprendre ma route.

Je lui réponds que cela tombe bien, ce soir, j’ai rendez-vous avec la Nuit. 

Elle me dit de ne pas attendre n’importe quelle nuit. 

Je lui dis : Quelle nuit alors ? 

Elle me dit : La Nuit sacrée

Je lui réponds que n’importe quelle nuit ferait l’affaire.

Elle me dit qu’il serait bien dommage de la manquer, que cette Nuit vaut mille mois, qu’elle se trouve dans les jours impairs. 

Mais nul ne sait où elle est.

Je lui dis que ça valait bien la peine de me parler de cette Nuit sacrée, si c’est pour être si imprécise. C’est important pour moi d’en savoir plus, car ce soir, j’ai rendez-vous avec la Nuit .C’est pour elle que j’ai entamé ce voyage. Et pour ce voyage, j’irai jusqu’au bout de la Nuit. Je suis la Musulmane errante . J’erre et je me perds. Dans l’immensité de l’Univers. 

Elle me dit que mon cœur est mon astrolabe.  

Je lui dis que mon cœur est impatient 

Elle ne dit plus rien. 

 

Énigmatique, elle reprend.  

Sache que la patience est la mère de toutes les vertus. Elle est amie avec la Nuit, peut-être plus, si affinités. Mais cela les regarde. Mais si la Patience est l’amie de la Nuit, 

la Nuit est la petite sœur de la Mort. 

Inéluctable. Comme la Mort, la Nuit est une Fatalité. Ou une Fortune. Tout dépend. Mais pour chacune d’entre elles, nul ne connaît son heure. Les cœurs impatients se pensent éternels. Entre leurs battements, ils doivent accueillir leur ignorance. Et leur finitude

 

Elle poursuit. Tu retiens la Nuit car tu refuses de mourir. Tu attends la Nuit car tu te retiens de vivre. Laisse le sablier s’écouler. Le Temps t’est compté. Que tu le veuilles ou non. Tu trompes le Jour, tu es l’amante de la Nuit. Mais tu te trompes sur le Jour. La Nuit a besoin du Jour pour exister. Tu as besoin du Jour pour la Connaissance. C’est grâce à sa clarté, que tu peux lire entre les lignes des récits de la Nuit. Mais sache que le Livre de la Nuit ne révélera jamais tous ses secrets. Mektoub. Tout y est écrit. Et seul le Tout Puissant se réserve le droit de savoir. De tout savoir. Le Début et la Fin. Ton humilité de mortelle doit accepter Al Ghayb. La Nuit est l’Insaisissable. La Nuit est l’Éternelle.  Qui peut compter les étoiles? Ni ta Raison ni tes Sens ne peuvent percevoir le Mystère de l’Idée et de la Matière. 

Le Mystère de la Nuit donne Sens à ta Vie. Dans ta quête de la Nuit, ta Destinée s’élèvera sur les cimes de l’Espoir, mais les flancs de ton âme donneront dans le vide. De là, tu entendras les échos du Doute. 

Le Doute est le souffle du précipice qui donne le vertige. Et dans les vertiges de la Nuit, seul le Néant peut révéler la Lumière. Al Nour

 

Ce soir-là, le Prophète avait rendez-vous avec la Nuit

Les flancs de son âme étaient effrayés par les abysses du Doute.

Dans sa solitude, son cœur, patient, est allé chercher la force . Et la Nuit l’a trouvée.

Cette Force. Layl Al Qadr. La Nuit de Qadr est la Nuit de la Puissance. Sans les doutes de la Nuit, les Rêveurs n’imagineraient pas, les Poètes ne chanteraient pas, les Contemplatifs ne prieraient pas. 

Les doutes sont les graines de la Foi. Et de la Puissance. Même dans le Désert, les roses finissent par fleurir. 

La Révélation a besoin du Doute, ce sont deux faces d’une même Lune. La Nuit de la Révélation ne révèle pas la Vérité. Mais des vérités. Ta Vérité. 

C’est pourquoi cette Nuit vaut Mille mois. Elle a mille vérités à te révéler, mille secrets à te confier. Tu es amoureuse de la Nuit. Par amour, la Nuit te demande de respecter la Foi, son amante. Son consentement est sacré. Et dans la Nuit sacrée, dans toutes les nuits sacrées, ta Foi se respire comme un parfum de Rose du Désert. Nomade, tantôt elle vient, tantôt elle part. 

Dans le sublime de la Nuit, ta Foi consentira à revenir ( peut-être…) quand elle décidera d’un rendez-vous avec toi. 

 

Nejwa Mimouni, le 28 avril 2021, pour Lallab

 

 

Crédit image à la une: @jade.maerten

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