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Ce qui nous regarde, une pièce de Myriam Marzouki… Ou la claque que je viens de me prendre !

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Je sors du théâtre. Je n’ai qu’une envie, rentrer chez moi, m’arrêter. Et écrire. Ecrire pour essayer de comprendre ce qui vient de se passer, ce que je viens de vivre. Les yeux humides à la fin de la pièce, j’essaie de retenir mes larmes. J’écoute les autres parler, mais je ne suis plus vraiment là.

Ce samedi soir, j’arrive au théâtre l’Echangeur, à Bagnolet, sans vraiment savoir ce que je vais voir. La pièce s’appelle « Ce qui nous regarde ». Je sais seulement qu’elle parle du voile. La salle est pleine. Autant de femmes que d’hommes, mais peu de têtes coiffées d’un foulard. Je m’attends à quelques clichés, à des explications des textes sacrés, à une vision scénarisée de ce que peut représenter le voile. En fait, je m’attends à tout. A tout, SAUF à ça !

La pièce commence. Les photos de grands-mères, en noir et blanc, s’affichent en grand. Des photos d’un autre temps, de femmes « coiffées d’un fichu » : Olga et Aziza. Ce sont les grands-mères de Myriam Marzouki, la metteuse en scène. Une femme féministe, engagée, athée, à la double culture française et tunisienne.

C’est une pièce qui veut faire « un pas de côté » pour regarder le « problème » du voile autrement. Au final, peu de choses sur l’Islam, et tant sur notre société !

Le seul texte religieux de la pièce, chanté puis hurlé par un des comédiens, est perturbant. La première fois qu’il le dit, silence.  La deuxième fois, nous rions. Et pourtant… C’est un texte révélateur de ce qui est entré, pour certain.e.s, dans la norme. C’est une ode à la gloire des hommes. Un texte extrait de l’Evangile de Saint Paul, dans la Bible. Un texte dont j’ignorais l’existence, le Première épître aux Corinthiens (11 : 2-16, Nouveau Testament).

Puis vient cette femme en longue robe noire, un foulard sur la tête. Elle est belle, souriante, le visage doux. Et soudain, tout change. Ses traits s’assombrissent, son sourire s’efface. Des gants de boxe rouges apparaissent. Elle doit se battre, contre un ennemi invisible. C’est cette image qui m’a mis le premier coup de poing de la pièce. Elle ressemble à toutes ces femmes qui doivent se battre pour être elles-mêmes.

Crédit photo : Vincent Arbelet
Crédit photo : Vincent Arbelet

Finalement, le voile n’est qu’un prétexte pour essayer de dénouer les fils de tout ce qui se joue dans notre société. Dans une interview, Myriam Marzouki cite cette phrase de Bourdieu :

« Lorsqu’on regarde un objet social avec beaucoup d’attention, on finit par y voir la société tout entière. »

Et franchement, notre société n’est pas belle à voir.

« Ce qui nous regarde » est à la fois une pièce de théâtre, un documentaire, un voyage dans l’histoire, à travers les médias, une initiation à tout ce qui peut s’intriquer lorsqu’on fixe son objectif sur un pseudo-problème précis.

Cette pièce dénonce et mélange deux grandes idées qui s’imbriquent sur la question du voile en France : la place de l’histoire post-colonialiste et le commerce du corps des femmes dans notre société capitaliste.Et c’est sur ces deux axes, entre autres, que la pièce va nous amener, à travers des photos, des reportages, des bouts de vie scénarisés… Elle nous parle de l’Algérie et des campagnes pour le retrait du voile.

Elle nous parle de ce père qui en veut à sa fille de se voiler et d’aller à l’encontre de ce que lui, immigré qui s’est « intégré », aurait voulu pour elle.

Elle nous parle aussi du jeu que peuvent nous imposer les médias sur ces systématiques associations entre femmes musulmanes et femmes en niqab, pourtant si minoritaires sur le territoire français.

Elle nous parle également du commerce du corps des femmes. Une comédienne s’exprime et tente, avec nous, de définir ce qu’est être une femme libre, féministe, émancipée… – forcément dénudée ?

Elle finit par s’accroupir, à moitié déshabillée, et poser. Poser, comme dans nos magazines. La pornographie publicitaire est devenue une norme. Combien de corps de femmes dénudés pour vendre une montre ? Combien de photos de femmes objectifiées dans nos journaux ? Faites l’expérience. Prenez le premier magazine près de vous et je suis sûre que vous y trouverez des publicités avec des femmes elles-mêmes réduites à des marchandises. Tout cela est devenu si tristement normal. Trop normal !

Crédit photo : Vincent Arbelet
Crédit photo : Vincent Arbelet

Elle nous interroge : et si, finalement, ce ne serait pas nous qui serions soumis à ce consumérisme, à ses marques que nous portons, à ses tendances que nous affichons ? « Obéissez, obéissez », répète cette femme. Qui de nous n’est pas au moins un peu soumis à ce dieu capitaliste, à ce dieu du commerce qui tente de tout contrôler ?

Un ensemble de mots, d’expressions subtiles se glisse dans cette pièce. J’en retiens deux. Une femme en pleine dispute demande si ce qui nous poserait tant problème avec ce voile, ce ne serait pas « ce qui nous échappe ». Une autre, en face d’elle, nous parle de ce voile qui serait comme un « miroir »…

Je vous laisse y réfléchir. Mon cerveau bouillonne encore. Une énorme envie d’aller chercher dans différents livres d’histoire – et pas ceux de nos écoles – pour mieux comprendre.

A la sortie de la pièce, la metteuse en scène est là. Quelqu’un lui demande « Allez-vous filmer la pièce ? ». Elle répond que non : c’est une pièce qui doit se Vivre. Je suis encore un peu sous le choc, mais j’acquiesce. Il faut le Vivre pour tenter de comprendre ce qui vient de se passer.

Un dernier conseil, courez ! Courez voir cette pièce ! A Bagnolet jusqu’au 9 février, puis en tournée dans toute la France. En espérant qu’elle repassera par Paris.

Je laisse le mot de la fin à la femme assise à côté de moi. A la fin de la pièce, elle se lève et dit : « Maintenant, on a plus qu’à digérer tout ça ». Je n’ai pas encore repris mon souffle, je suis encore sonnée.

Pourtant, je n’ai qu’une seule envie : y retourner !

Courrez vite découvrir , « Ce qui nous regarde » de Myriam Marzouki  dans le cadre de la programmation hors les murs de la MC93

A Bagnolet, au théâtre de l’Echangeur jusqu’au 9 février 2017.
A Reims, le 11 février à 16h30 dans le cadre du festival Reims Scènes d’Europe

 

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Diffuse la bonne parole

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(Dé)construction

Tu es Française musulmane ou Musulmane française ? Ces grands débats inutiles et imposés

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Etre une femme musulmane en France va avec son lot de surprises, d’épreuves, et de débats externes et internes. Lorsque notre religiosité n’est pas seulement supposée mais qu’elle se devine très clairement du fait de l’invisibilité de nos cheveux en public, bref, lorsque nous ne sommes pas des musulmanes discrètes, plusieurs débats nous sont imposés. Je les ai appelés les GDII pour Grands débats inutiles et imposés, en référence aux Grands projets inutiles et imposés, terme utilisé par les écologistes pour désigner les projets auxquels ils sont opposés comme l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Florilège.

 

1. Etre Musulman.e français.e ou Français.e musulman.e

 

«Alors là il faut faire un choix ma cocotte. C’est soit tu es Française de confession musulmane soit Musulmane de nationalité française » : c’est, en substance, ce qu’on demande aux Français.es musulman.e.s (ou dans l’autre sens, c’est selon). Ce qui est sous-entendu c’est l’incompatibilité entre les deux identités : l’identité nationale et l’identité religieuse. C’est le versant individualisé du grand débat national « L’Islam est-il compatible avec les valeurs de la République ? ». Et comme nous savons si bien le faire en France, personne ne prend la peine de spécifier et définir les termes du débat. On parle de l’Islam comme si c’était un bloc monolithique alors qu’il existe autant de musulman.e.s que de façons de pratiquer sa religion, et donc d’être musulman.e. De même, on érige les valeurs de la République comme un ensemble de concepts immuables qui fonderaient le socle de notre nation. Mais quand on creuse un peu plus, on n’y trouve pas grand-chose et bizarrement la valeur qui est principalement citée est la laïcité. J’aurais tendance à penser que cette sur-utilisation de la laïcité a une visée précise. Je romps le suspense. En fait c’est pour conclure que l’Islam est incompatible avec la République.

Aujourd’hui, je me rends compte que les termes du débat sont biaisés, mais cela n’a pas toujours été le cas. Je me souviens, en souriant du ridicule de la réflexion, avoir sérieusement sondé ma mémoire à la recherche de mon premier sentiment d’appartenance religieuse et de mon premier sentiment chauvin. A quel moment me suis-je sentie musulmane pour la première fois ? A quel moment me suis-je sentie française pour la première fois ? J’ai de manière absurde perdu des minutes, voire des heures, de mon temps. C’est un non-débat absolu car on s’en fiche. Le débat n’a juste pas lieu d’être. Etre musulman.e et être Français.e sont deux identités distinctes. Une religion, une nationalité. Nous sommes des millions à vivre ces identités au quotidien, et bizarrement, on le vit plutôt bien. Si c’était si frustrant, les hôpitaux psychiatriques seraient remplis de musulmans-n’arrivant-pas-à-vivre-du-fait-de-l’incompatibilité-de-leur-foi-et-de-leur-nationalité. Cela n’a aucun sens de vouloir hiérarchiser ces deux identités car elles cohabitent en nous. Et quand bien même une personne désirerait hiérarchiser et dirait qu’elle se sent plus musulman.e que Français.e ou plus Français.e que musulman.e, où est le problème ? Et pour ceux qui n’en démordent pas et ont en tête des exemples très spécifiques de conflits-entre-la-loi-française-et-les-préceptes-religieux-islamiques, un.e musulman.e est en adéquation avec ses principes religieux lorsqu’il ou elle obéit à la loi de son pays. Voilà. Je décrète donc, très solennellement, la fin de ce GDII.

 
photo 2 yuna
 
La chanteuse Yuna a su faire fi des barrières qui se sont érigées face à elle (capture d’écran YouTube)

 

2. Etre voilée et soumise ou dévoilée et libre

 

Alors celui-ci c’est LE grand classique des discussions sur le voile. Aujourd’hui, ma réponse consiste à arborer une expression faciale désabusée ou lever mes yeux au ciel en soupirant profondément. Mais ça n’a pas toujours été le cas. Pendant très longtemps, j’ai essayé de détricoter ce qu’on avait décrété être un oxymore : une femme musulmane voilée libre. Si en plus cette dernière ose se déclarer féministe, elle est vouée aux gémonies. L’argumentaire des détracteurs.trices du voile est simple : une femme voilée est soit voilée de force par son-père-son-frère-son-mari-ses-oncles-son-boucher-son-voisin-les-gangs-de-son-quartier-populaire-ces-zones-de-non-droit-que-la-République-a-perdues, soit elle a « choisi » de se voiler mais la pauvre elle n’a pas compris qu’elle s’était auto-aliénée. Dans les deux cas, une seule solution se présente à nos valeureux détracteurs : nous sauver.

Et quand on tente tant bien que mal de leur expliquer qu’on a fait ce choix comme des grandes et qu’à partir d’un moment il faudrait arrêter de nous infantiliser, les détracteurs font volte-face. Soudainement nous ne sommes plus des enfants en danger mais nous devons être responsables et solidaires des femmes dans le monde qui sont contraintes à porter le voile. Ainsi, dans un élan de solidarité des plus beaux, nous devons, oui nous devons, la bienséance républicaine l’exige, nous dévoiler. En plus de cela (oui parce qu’il n’y en a jamais assez lorsque l’on parle du voile), nous devons être reconnaissantes du combat de nos aînées qui se sont battues pour pouvoir s’habiller comme elles le souhaitent. Sneak peek, aux dernières infos, nous aussi en fait, nous nous battons pour pouvoir nous vêtir comme nous le désirons, mais ça apparemment on s’en fout, les seuls combats valables sont ceux pour le dévoilement. Alors je ne vais pas me casser la tête à perdre trop de temps à démonter cet argumentaire. Je reprendrais le trait d’esprit de la journaliste Sonia Gueddouri : doit-on s’interdire d’avoir des enfants parce que des femmes se sont battues pour pouvoir bénéficier du droit d’avortement en France ? La question vous semble absurde ? Voilà, vous avez saisi toute l’inutilité des arguments qui nous sont opposés, de ceux qui nous renvoient à la situation de femmes à l’autre bout du monde dont les réalités sont différentes des nôtres, à ceux qui ne nous offrent qu’une seule voie d’émancipation. Vous êtes gentils, valeureux détracteurs du voile mais on sait assez bien déterminer la façon d’être qui nous convient le mieux. Acceptez-le ou non mais nous avons choisi de choisir, et cela dans un spectre de choix plus large que celui que vous nous proposez.

Avant d’arriver à cette liberté, je dois avouer que c’est le non-débat qui m’a donné le plus de fil à retordre. Ma fibre féministe a été retournée dans tous les sens par les arguments qui paraissent logiques : le voile est un signe de sexisme car seules les femmes doivent se couvrir les cheveux dans les religions (bien entendu ces arguments-là occultaient constamment les exigences de pudeur qui s’adressent également aux hommes). Malgré les tiraillements internes, mes cheminements idéels arrivaient à chaque fois au même aboutissement : je me sens bien avec mon foulard. Je me sens bien lorsqu’on ne peut pas voir mes cheveux. Aussi absurde que cela puisse paraître aux yeux de certain.e.s, c’est ma façon d’être libre. Et honnêtement, je me fous des interprétations, des projections et des opinions sur mon voile et ma personne en général. Je me sens bien comme ça et je n’ai pas à me justifier du pourquoi du comment de mon bien-être. Ça a été un chemin long et sinueux mais aujourd’hui c’est ma vraie liberté : réussir à ne pas me plier aux avis et remarques pestiférés sur ma façon de m’habiller et le mode de vie que j’adopte, m’assumer à 100% en France et ne pas me sentir obligée de me justifier. Alors oui, je suis libre et voilée. Et je m’en fiche de ce que l’on peut en penser.

 
photo 3 mème i'm fabulous 
 

3. Joyeux Noël ou Joyeuses Fêtes

« Tu sais j’écoutais la présentatrice du 20 heures, elle a souhaité un Joyeux Noël aux téléspectateurs et je me suis demandé ce que ça faisait de l’entendre quand on ne fêtait pas Noël ».

Alors là, face à cette question posée le plus sérieusement du monde (oui oui), j’avais deux choix :

1)photo 4 rihanna kidding me
 
2) Tenter de lui faire comprendre gentiment que cette question est ridicule.

J’ai opté pour la deuxième car on ne se connaissait pas depuis assez longtemps pour que je puisse lui décocher mon plus beau facepalm et mon plus long soupir de désarroi. Je lui ai donc expliqué que même si je ne fêtais pas Noël, j’ai toujours entendu des personnes souhaiter « Joyeux Noël », je l’ai aussi souhaité à mes ami.e.s qui le fêtaient, je baigne dans une culture qui est empreinte des célébrations de Noël et j’aime regarder des films de Noël (je plaisante, ce n’était pas une partie de mon argumentaire). Bref, je lui ai dit que c’était un non-débat !

 

Tous ces GDII m’ont coûté en temps, en énergie et en réflexions, mais les avoir déconstruits (certains étaient plus faciles que d’autres, certes), m’a permis de me sentir beaucoup plus légère et en paix avec moi-même et mes identités.

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(Dé)construction

Best of des commentaires que j’ai reçus pendant mes 3 premiers mois chez Lallab – La suite

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Comme je l’expliquais dans la première partie de ce best of, en seulement 3 mois en tant qu’auteure chez Lallab, j’ai eu l’occasion de découvrir à quel point les gens peuvent être imaginatifs dans les commentaires. Vous ne voyez pas toutes les perles qu’on reçoit, alors je partage généreusement quelques-unes de celles que j’ai reçues sur mes articles. Une chose est sûre, elles prouvent qu’on a encore du boulot…

 

1. Ceux qui veulent décider à ta place de ce que tu vas écrire, et de comment tu dois le faire

A quand un long article (…) au sujet des femmes et filles que leur entourage, ici en France, oblige à porter ce voile maudit ? (…) Merci d’avance.

Chez Lallab, c’est parole aux concerné.e.s ; or, aucune femme concernée ne nous a proposé d’article à ce sujet. Je ne vais pas non plus le sortir de mon chapeau, puisque ce n’est pas une situation que j’ai vécue, ni que j’ai observée autour de moi. Donc désolée, il faudra passer ta commande ailleurs – mais est-elle vraiment nécessaire, étant donné que 99% des médias français ont déjà exaucé ton vœu depuis longtemps, et sans s’intéresser à l’autre pendant ?

J’aurais été bien plus touché et plus émotif si elle avait choisi une démarche pacifique et explicative, que si elle avait choisi ce ton moqueur, puéril et ironique. (…) Comment cela peut-il me donner de l’empathie envers elle et ce qu’elle vit si elle m’agresse, moi, lecteur, qu’elle ne m’explique même pas en détails POURQUOI précisément elle porte le voile

 

Voilà, pour UNE fois dans ma vie, je réponds à celles et ceux qui veulent m’imposer leur opinion sur le hijab, je me permets un MILLIEME de l’agressivité et du mépris que je me suis pris dans la face, mais c’était quand même la fois de trop. Apparemment, j’aurais dû serrer les dents, sourire (de manière crispée), et continuer à me justifier pour qu’il soit « touché » et « émotif » (il n’a pas non plus compris que ce n’était pas franchement mon but dans l’article).

Mais il faut le comprendre, tant que je n’aurai pas étalé au grand jour les raisons intimes pour lesquelles je porte mon foulard, comment les autres pourraient-ils ressentir de l’empathie par rapport à ce que je vis ? Les deux sont bien évidemment liés.

 

2. Ceux qui veulent te libérer tout en t’expliquant comment vivre ta vie

 

Certains lecteurs de Lallab sont de fervents adeptes du mansplaining, cette explication faite avec condescendance par un homme à une femme, sur ce qu’elle devrait faire ou non. Par exemple, certains hommes vont jusqu’à me dire que je dois me libérer du sexisme, tout en m’expliquant d’une manière bien infantilisante comment je dois le faire. Je crois qu’ils ne voient pas le cocasse de la situation.

Les femmes devraient réfléchir en leur for intérieur sur les raisons qui les poussent à se cacher les cheveux. [Mais c’était donc ça ! J’avais oublié d’y réfléchir !] Oui, clairement le sexisme. Mais pour lutter contre, ne tombez pas dans le piège de la religion qui ne fait que perpétuer le sexisme patriarcal (…) Luttez avec les bonnes armes, mais pas avec la religion… Elle est un piège dans lequel d’autres vous demandent de tomber…

C’est vrai quoi, si Alain me le demande, je ne peux quand même pas lui faire ça… Plus sérieusement, Alain, c’est bien gentil de te soucier de nous, mais la vie n’est pas faite de choix binaires, et on n’a pas attendu ton intervention pour trouver notre propre voie, loin des injonctions de n’importe quel homme qui voudrait nous dire comment mener notre vie.

 

3. Ceux qui n’ont pas trop de temps à perdre à argumenter, mais qui veulent quand même bien t’éclairer de leurs lumières

La religion est une forme de domination alors que vous portiez ou non le voile, vous resterez toujours soumises – M.

Eh bien merci pour cette intervention salvatrice qui me montre la voie vers la libération… et bonne journée à toi aussi, M. !

 

4. Ceux qui savent mieux

Je pense qu’elles [les femmes et filles que leur entourage, ici en France, oblige à porter ce voile maudit] sont plus nombreuses que les femmes voilées qui seraient ostracisées.

Alors certes, j’ai inséré un lien vers un article qui s’appuie sur les chercheurs.ses qui étudient la question en France et qui affirment que c’est exactement le contraire, mais quel poids cela a-t-il quand l’auteur du commentaire « pense » qu’elles sont plus nombreuses ?

J’apprécie également l’emploi du conditionnel dans « seraient ostracisées », comme s’il était encore à prouver que les femmes qui portent le hijab sont discriminées et exclues de nombreux domaines.

 

 

D’ailleurs, si les « femmes forcées par leur entourage » sont plus nombreuses que les « femmes ostracisées », est-ce que ça veut dire que ces deux catégories sont distinctes ? Les femmes forcées par leur entourage seraient-elles immunisées contre les discriminations ?

 

5. Ceux qui ont besoin d’un peu plus d’amour et de licornes dans leur vie

 

Ce sont les aigri.e.s qui doivent taper sur leur clavier avec de la bave qui écume au coin de leur bouche… mais qui assurent ensuite qu’ils sont pourtant respectueux.ses (nous n’avons sans doute pas reçu la même éducation).

Si vous avez suivi la première partie de ce best of, retrouvons Dr Jekyll et Mr Hyde, alias notre ami qui répondait à ses propres commentaires sous un autre pseudo :

C’est effectivement ce bout de chiffon qui permet de nier la réalité et qui convient aux gens qui planent, qui est un problème pour ceux qui le portent comme pour ceux qui ne le portent pas… Alors ouste !

Puis il ajoute : « Merci de ne pas censurer ma contribution, sincère et respectueuse ».

Un autre membre de notre fanclub réagit à l’article « Les 10 choses qui étonnent le plus depuis que je porte le hijab » :

Un article sans aucun intérêt quand on fait un choix, on doit l’assumer. Vous n’êtes pas exceptionnelle, vous êtes comme les autres voilées.

(Traduction : « C’est toi qui as voulu porter ton voile à la noix, alors maintenant tu encaisses et tu arrêtes de te plaindre. Tu te crois différente ? Lol, pourtant vous êtes toutes pareilles. »)

Puis, quand on lui dit qu’il ou elle peut exprimer ses opinions sans montrer autant d’animosité :

Je n’ai en aucun cas manquer (sic) de respect à l’autre, mais je démens juste ce qui n’est pas vrai dans son article. On veut nous présenter une femme voilée comme une femme normale, alors que c’est complètement faux.

Ben quoi, j’ai juste dit que « l’autre » (espérons qu’il voulait dire « l’auteure ») ne pouvait pas être une femme normale parce qu’elle porte le voile, je vois pas où est le souci ?! Voilà, on peut plus rien dire sans que la police de la bien-pensance nous tombe dessus !

 

Un autre admirateur secret avait vraiment très envie que je lise ce qu’il pensait de mon article « Ma réponse aux 14 arguments les plus courants contre le voile », et a donc envoyé sa critique littéraire à la fois en commentaire Facebook et par mail :

Comment voulez-vous avoir une certaine crédibilité avec vos réponses dont les arguments sont faibles et peu réfléchis, agrémentés d’insultes. (…) Je trouve ces remarques impertinentes et sans aucun intérêt. (…) Vous instaurerez davantage de haine et de dégoût tout comme de l’incompréhension. (…) Respectez la religion judéo-chrétienne qui est celle du pays qui vous a accueillies. J’aurai plus de considération pour vous et votre association lorsque vous apporterez de vrais arguments.

Si j’applique son raisonnement, cela veut dire que même si j’aimerais vraiment tenir compte de son commentaire, je ne peux pas puisque le ton qu’il emploie est trop condescendant – dommage… D’ailleurs, il continue en répondant à un lecteur qui est intervenu : « Il est simplement dommage d’écrire ce brouillon de 14 arguments, de manière si puérile et vide ».

Puis, quand la police de la bien-pensance le rappelle à l’ordre, il s’étonne :

Je ne critique pas l’écrivain mais la façon dont elle s’exprime, et qu’elle essaie de faire passer un message.

Aah ben oui, c’est vrai que je ne me sentais pas du tout visée ou agressée ; d’ailleurs, à la fin, il me souhaitait un joyeux Noël, ça prouve bien qu’il était plein de bons sentiments. En fait il le faisait dans la bienveillance, pour me donner des conseils, et moi je suis vraiment trop susceptible…

Merci pour le coaching, alors, et s’il te plaît, dis-moi si j’ai fait des progrès dans cet article !

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Diffuse la bonne parole

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(Dé)construction

Top 7 des techniques utilisées pour me faire taire, et autant de raisons de ne pas le faire

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Lorsque je partage mon vécu en tant que femme voilée, je suis souvent confrontée à des discours qui visent à délégitimer mes propos – en se concentrant sur la forme au détriment du fond, en me reprochant d’être parano, etc. Voici donc les 7 techniques que j’ai le plus rencontrées, et surtout ce dont j’aimerais que l’on se rappelle lorsqu’on tente de retirer leur valeur à notre parole et nos témoignages, en tant que membres de n’importe quelle minorité. 

 

1. Tu es le.la mieux placé.e pour savoir ce que tu vis

Je te trouve parano, faut pas non plus voir le mal partout …

Alors bizarrement, tu remarqueras que ce sont très rarement des gens dans ta situation qui tiennent ce genre de discours. Non, ce sont des gens qui n’ont aucune idée de ce à quoi ressemble ta vie, et qui minimiseraient un peu moins ce que tu dénonces s’ils se retrouvaient dans ta peau ne serait-ce qu’une journée.

Il se peut aussi que la personne qui te tient ce genre de propos soit dans une situation similaire à la tienne, et en joue pour te « prouver » que tu exagères. Mais elle n’a pas TA vie. Vos expériences peuvent varier du tout au tout selon l’endroit où vous habitez, le contexte dans lequel vous travaillez, les gens que vous côtoyez, etc. C’est TA vie, c’est TOI qui sais, et la personne en face de toi devrait au minimum être capable de reconnaître ta légitimité à décrire ton vécu, ton histoire et ton ressenti.

 

2. C’est justement parce que tu es concerné.e que tu peux le mieux en parler

Tu es trop concerné.e par la situation, tu ne peux pas être objectif.ve.
Ou bien : T’es trop dans l’émotion.

Ah, le mythe de l’objectivité… Certain.e.s pensent que ne pas être dans une situation, c’est être neutre. Non, c’est juste être dans une autre situation. Je ne vois pas qui pourrait se targuer d’être objectif.ve – même si certain.e.s pensent qu’être un homme, blanc, hétérosexuel et aisé, c’est être « neutre ».

Et puis quelle est cette aberration de dire qu’une personne concernée ne serait pas légitime à s’exprimer sur un sujet, alors que c’est elle qui peut en témoigner en premier lieu ? Personnellement, j’accepterai cette méthode lorsqu’on m’invitera sur un plateau télé pour disserter sur ce que vivent les hommes blancs hétérosexuels aisés, sans aucun homme blanc hétérosexuel aisé présent. En d’autres termes : jamais. Pourtant, ça ne choque pas quand il s’agit d’autres catégories de la population.

 

3. Ta manière de t’exprimer n’enlève rien à la légitimité de ton propos et à l’écoute qui doit lui être accordée

Tu es trop agressif.ve, ça dessert ta cause.
Ou encore : Tu devrais apprendre à écrire sans fautes avant de parler. 

La manière dont tu t’exprimes ne devrait pas empêcher ton interlocuteur.trice d’entendre ton propos. Tu as le droit de faire des erreurs, de bégayer, de faire des fautes d’orthographe ou de français, et ça ne doit pas être un moyen de te tourner en ridicule.

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Crédit photo : Bluntcards

Tu pointes aussi un vrai problème et tu as le droit d’être triste, en colère ou déstabilisé.e en le faisant. Mais le sage montre la Lune et l’idiot regarde le doigt…

Sache que si tu cries au feu et que tout ce que la personne en face de toi trouve à dire, c’est que tu pourrais rester calme et crier moins fort, et qu’à cause de ça, elle n’a pas très envie d’aller chercher l’extincteur, ce n’est pas vraiment toi qui as un problème.

 

 4. Tu as le droit de parler en ton nom propre, en ne représentant personne d’autre que toi

Franchement, tu me donnes une mauvaise image de ta communauté.
Ou en interne : T’as pas honte de faire ça alors que tu nous représentes ?!

Personne ne t’a investi.e d’une mission, et tu ne t’es pas non plus investi.e d’une mission juste parce que tu as pris la parole. Tu ne prétends pas représenter qui que ce soit à part toi-même, alors pourquoi voudrait-on te faire porter une responsabilité démesurée ?

Sans compter qu’il semblerait que nous soyons ambassadeurs.drices de certaines de nos identités seulement. Personne ne dira que tel.le criminel.le fait passer tou.te.s les hindou.e.s pour des barbares ; ou que tel ministre montre encore une fois que les hommes sont vraiment incapables de gérer une position de pouvoir.

 

5. Personne ne peut plaire à tout le monde, alors autant être toi-même et aller au bout de tes convictions

Tu devrais arrêter de faire ci, fais plutôt ça. A ta place, je serais plus X et moins Y.

A ce sujet, Aristote disait : « Un seul moyen d’éviter les critiques : ne dis rien, ne fais rien, ne sois rien ». Alors quitte à être critiqué.e, autant l’être pour quelque chose qui te permet de te sentir en accord avec toi-même et fidèle à tes convictions profondes.

De toute façon, qui que tu sois et quoi que tu penses, dises ou fasses, il y aura toujours un pourcentage incompressible de la population qui te sera viscéralement opposé. Même des personnes comme Martin Luther King, Gandhi ou Mère Teresa ont rencontré les plus vives oppositions et la haine. Et toi, tu espèrerais être épargné.e ?

Rappelle-toi aussi de cette citation lorsque tu seras critiqué.e par des gens cachés derrière leur écran. Certain.e.s voudraient te faire croire que tu ne devrais pas agir, sous prétexte que tu fais des erreurs, alors que la perfection n’est pas de ce monde. En attendant, c’est une bonne excuse que ces personnes utilisent pour pouvoir critiquer tout en restant au chaud dans leur canapé. Quand on agit, on n’a pas le temps de partir à la chasse aux défauts et aux erreurs des autres.

 

6. Tu as le droit de dénoncer les injustices que tu affrontes

C’est bon, arrête de te victimiser …

Est-ce toi qui te victimises, ou est-ce la situation qui fait de toi une victime ? Ce n’est pas à toi qu’on doit reprocher le fait que tu sois victime de rejet, de discrimination ou de violence. On ne peut pas non plus te reprocher de dénoncer ce que tu subis, et cela ne veut pas dire que tu te places dans une position victimaire, faible ou passive. C’est une idée malheureusement largement répandue que les personnes fortes sont celles qui ravalent leurs difficultés et continuent en faisant comme si de rien n’était. Alors qu’il faut plus de force et de courage pour faire entendre sa voix afin que les choses changent.

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7. Il n’y a pas besoin de choisir entre plusieurs causes

Tu crois vraiment que c’est ça, la priorité ? Tu crois pas qu’il y a d’autres choses plus importantes ?

Eh bien oui, peut-être que TA priorité, c’est ça. Nous avons tou.te.s des causes qui nous touchent plus ou moins, et nous n’avons pas un nombre limité de luttes dans lesquelles nous pouvons nous engager. En réalité, beaucoup sont interconnectées. Comment peut-on espérer nourrir toute la planète si on ne préserve pas l’environnement et qu’on n’améliore pas les conditions de vie par l’éducation ? Comment peut-on espérer une société inclusive, qui nous accepte tel.le.s que nous sommes, tout en étant indifférent.e.s aux combats d’autres parties de la population, voire en les rejetant nous-mêmes ?

N’écoute pas non plus celles et ceux qui voudraient te faire croire que certaines de tes convictions et de tes causes sont incompatibles. Par exemple, mon petit doigt me dit que tu peux tout-à-fait être musulman.e et féministe à la fois. 😉

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Diffuse la bonne parole

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(Dé)construction

Ma réponse aux 14 arguments les plus courants contre le voile

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Je commence à en avoir un petit peu marre d’user ma salive pour répondre encore et encore aux mêmes arguments contre le hijab. Alors toi qui voudrais entamer un énième débat ou me demander de justifier mes croyances et mes choix personnels, lis ceci, ça nous fera peut-être gagner du temps à tou.te.s les deux.

 

1) Je n’aime pas le voile.

 

Bah okay, d’accord. Autre chose ?

Pour ton information et ta culture personnelle, « respecter » et « approuver » ne sont pas des synonymes. Et il se trouve que je ne te demande pas d’approuver mon hijab, ni d’être d’accord avec, de l’aimer, ou même de le comprendre. Juste de res-pec-ter mon choix de le porter. C’est si difficile que ça à comprendre ? Je peux te la faire en allemand, si ça peut aider.

 

2) Le voile, qu’est-ce que je trouve ça moche…

 

Et moi, je ne vis pas ma vie pour plaire à tout le monde. La base de mon hijab, c’est que je veux plaire à Dieu, être en accord avec moi-même et me détacher de la quête jamais finie d’approbation. Mais merci quand même pour ton intervention, c’était essentiel pour moi de savoir ce que tu en pensais.

Je tiens quand même à dire que moi aussi, il y a des choses que je n’aime pas, mais je n’ai pas développé une obsession au point de chercher tous les sites en lien pour crier au monde entier que ça ne me plaît pas. Par contre, ça m’intéresse de connaître ton secret pour avoir des journées plus longues, parce que personnellement, je n’ai pas le temps d’inonder internet de commentaires ET d’avoir une vie.

 

3) Vous nous imposez votre religion !

 

Mmh, à ce que je sache, si je pratique ma religion et que je ne demande à personne d’en faire autant, je n’impose rien à personne, non… Genre le foulard magique qui transformerait en musulman.e chaque personne qui le regarde. Pitié, aie plus de considération pour tes propres capacités intellectuelles.

D’ailleurs, c’est plutôt toi qui fais preuve de prosélytisme, à vouloir me faire adopter ton point de vue à tout prix. Si la vue te déplaît, regarde ailleurs, au lieu de me dévisager avec des yeux de merlan frit. Evite aussi de taper « invasion islam femmes voilées » sur YouTube : je sais que ça peut surprendre, mais tu risquerais effectivement de tomber sur des femmes voilées.

 

Crédit moosleemargh

Crédit photo : moosleemargh

 

4) Le voile ne fait pas partie de notre culture.

 

Alors tu m’expliqueras pourquoi les sœurs catholiques, la Vierge Marie et certaines femmes juives se couvrent les cheveux, tout comme le faisaient des femmes catholiques il n’y a encore pas si longtemps. Avant, le fait que les femmes soient couvertes était un signe de distinction entre les « civilisées » et les « sauvages ». Maintenant, c’est ce qui différencie les femmes « soumises » des femmes « libérées ». C’est marrant comme on dirait que c’est un peu toujours l’Occident qui dicte les normes…

 

5) Le voile est un signe d’infériorité de la femme.

 

Qui a décrété ça, à part toi et les hommes musulmans mégalos qui croient que le hijab est là pour montrer leur supériorité ? Je sais que tu n’as pas une grande estime pour mes capacités intellectuelles, mais je ne suis pas sotte au point de vouloir consciemment quelque chose qui va à l’encontre de ma dignité.

Ce n’est pas parce que les hommes ne portent pas le hijab qu’il y a un rapport de valeur : différence ne veut pas dire inégalité. Les hommes sikhs couvrent leur tête avec un turban, et pas les femmes – est-ce pour autant que les hommes sikhs sont inférieurs aux femmes ?

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J’ai oublié d’être oppressée / Trop occupée à être géniale
Crédit photo : Faineemae

 

6) Les femmes sont forcées à le porter.

 

Il y a DES femmes qui sont forcées à le porter. Et il y en a d’autres qui le choisissent. Les chercheurs.ses sur la question en France affirment qu’on a fait une généralisation de certains cas de femmes forcées à le porter, et qu’on a présenté comme des exceptions celles qui l’ont choisi, alors que c’est l’inverse : la plupart des femmes en France le portent de leur plein gré. Et il se trouve qu’elles aimeraient bien mener leur vie tranquillement, qu’on respecte leur libre-arbitre et qu’on les laisse un peu RESPIRER. Aider les femmes qui ne veulent pas porter le hijab n’est pas incompatible avec le fait de laisser celles qui l’ont choisi le porter.

De toute façon, si on est des victimes oppressées, il faut nous bichonner et s’en prendre plutôt à nos bourreaux, non ?

 

7) Vous êtes lobotomisées.

 

Je l’avoue, je suis lobotomisée. Par cette société de consommation de masse, où nous achetons, portons, mangeons, écoutons et regardons tou.te.s les mêmes produits, vêtements, repas, chansons, films, publicités et émissions abrutissantes.

Par contre, pour mon hijab, ça m’a demandé une sacrée volonté de passer le cap malgré toutes les pressions pour m’en dissuader. D’ailleurs, beaucoup de femmes qui le portent le font à l’encontre des opinions de leur famille et de leur entourage. Il semblerait que je sois, comme l’immense majorité des concernées, une grande fille, douée de raison et capable de prendre des décisions par et pour moi-même. Appelle BFM, ils seront contents d’avoir le scoop.

 

8) Les femmes qui portent le voile le font par provocation.

 

Maintenant je vais me fâcher toute rouge s’il y a encore quelqu’un qui prétend mieux savoir que moi ce qu’il y a dans ma tête ou pour quelles raisons je porte mon hijab. Il va falloir accepter que je le porte par rapport à Dieu et à moi-même – donc ni pour des gens qui voudraient que je le fasse, ni contre des gens que je voudrais embêter. Ça va vous décevoir de l’apprendre, mais vous n’êtes pas le centre du monde.

empowerment

Crédit photo : Meaghan Brittini

 

9) Ailleurs, des femmes se battent pour l’enlever.

 

Oui, et je les soutiens; de toute façon, un acte accompli sans conviction sincère n’a aucune valeur en islam, donc même de ce point de vue, je ne vois pas l’intérêt de forcer quelqu’un. Mais ce n’est pas une raison pour laquelle je devrais l’enlever, comme si c’était forcément comme ça que je devrais exprimer ma solidarité. Ce n’est pas parce que dans certaines sociétés barbares, les femmes sont obligées de souffrir le martyr en s’épilant, tout ça pour le regard des autres et la satisfaction de leur mâle dominant (qui, lui, n’a pas à subir ce traitement), que je vais te saouler pour que tu arrêtes de t’épiler « par solidarité avec elles ». L’important, c’est que celles qui veulent le faire puissent le faire, et que celles qui ne veulent pas, puissent ne pas le faire. Et pour ça, on a besoin de se serrer les coudes, pas de se tirer dans les pattes.

 

10) Il faut interdire le voile pour que les femmes puissent s’émanciper.

 

Tu m’expliqueras comment je pourrai « m’émanciper » (note que c’est un verbe réflexif, qui ne nécessite aucune intervention extérieure) sans pouvoir aller à l’école, à l’université ou au travail. Super plan, bravo, rien à dire. D’autant plus que si mon père/frère/mari est mon bourreau, j’imagine que le choix sera vite fait dans sa tête entre ma carrière et mon hijab…

 

11) La religion appartient au domaine privé.

 

Ah bon, et depuis quand ? Depuis qu’on amène l’islam dans les débats publics en permanence ? Pour info, il y a quelques petites choses qui vont avec la liberté de conscience, et qui s’appellent la liberté de culte et la liberté d’expression. Ça va être fun, une société qui garantit la liberté de conscience et d’expression à condition que ça reste dans l’opinion dominante ou bien au chaud dans notre tête.

 

12) Quand je voyage dans des pays musulmans, je m’adapte, alors c’est normal que vous vous adaptiez aussi

 

Tu l’as dit toi-même : vous voyagez dans des pays musulmans, où vous êtes étranger.e.s. Moi, je suis citoyenne de ce pays. Et puis tu critiques ces pays, mais tu veux faire la même chose qu’eux, à savoir imposer aux femmes une certaine façon de s’habiller ? Sans oublier que la plupart des pays musulmans n’impose pas le voile, encore moins aux touristes (oui, parce que les pays musulmans ne se limitent pas aux pays du Golfe, Wikipedia est ton ami). De toute façon, j’imagine que tes voyages t’emmènent moins souvent en Iran qu’à Djerba, or ça m’étonnerait que tu aies dû y porter un hijab assorti à ton bikini.

 

13) Ce n’est pas écrit textuellement dans le Coran.

 

Okay, je veux bien discuter d’interprétation religieuse, mais il vaut peut-être mieux qu’on parte avec les mêmes bases. Quand je discute avec quelqu’un qui a une foi différente de la mienne, j’ai l’humilité de reconnaître que cette personne a très probablement plus de connaissances que moi dans ce domaine. Et de mon côté, je me réserve le droit de ne pas donner beaucoup de poids aux arguments « religieux » de quelqu’un qui, loin de présenter les années d’étude et la maîtrise de l’arabe coranique nécessaires pour émettre des avis religieux, n’a même pas des connaissances de BASE. Parmi celles-ci, le fait que les musulmans s’appuient sur deux sources principales, le Coran ET la Sunna (la vie et les paroles rapportées de Muhammad). Si tu ne sais même pas ça, tu peux servir ton exégèse bidon sur les plateaux télé, mais moi je ne vais pas apprendre la physique quantique avec un élève de CM2.

 

14) « Ici on ai en France rantré ché vous !!! » (citation authentique)

 

Tiens, c’est marrant, ça nous fait un point commun : notre pays à tou.te.s les 2, c’est la France. Par contre, j’espère franchement que la ressemblance s’arrête là.

Allez, bisous !

 

 

Crédit photo de couverture : traitspourtraits.tumblr.com

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Portraits

Sadyia Khalique : militante post 11/09 et pré-Trump

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Quelques jours après l’élection tumultueuse de Donald Trump à la présidence des États-Unis, deux membres de Lallab sont allées à la rencontre de Sadyia Khalique, jeune activiste musulmane dans un pays post 11/09 et pré-Trump.

 

Nous avons rencontré Sadyia dans le cadre de son engagement interreligieux pour la justice climatique, il y a un an de cela, lors de la COP21. Elle était alors à la tête du bureau de CAIR (Conseil aux Relations Islamo-Américaines) de la ville de New York. Depuis, une COP22, une élection présidentielle et tant d’autres choses ont bouleversé notre monde.

Regards portés sur les communautés, l’expression politique des minorités ou encore la visibilité religieuse dans l’espace public, nos regards croisés ont exploré nos différences, notre communauté de destin, mais surtout ce que nous pouvons apprendre de nos différentes trajectoires en tant que femmes musulmanes engagées pour l’égalité. Voici les réponses qu’elle a accepté de nous donner.

 

Grandir en tant que musulmane après le 11 Septembre

 

Je suis née au Bangladesh et je suis arrivée à New York à l’âge de trois ans. Donc on peut dire que je suis née physiquement au Bangladesh mais que mon histoire commence à Manhattan, à New York. Ma famille a émigré au début des années 90, soit avant le 11 Septembre. Avant, être musulman.e n’avait jamais été un problème. C’était plus le fait d’être une personne de couleur qui portait préjudice, dans le sens où la couleur de ta peau avait plus d’importance aux yeux des gens que ta foi, dans une société historiquement raciste.

Tou.te.s les New Yorkais.es se souviennent où ils.elles étaient le 11 Septembre. Cela a vraiment marqué un tournant. Ce que le 11 Septembre a déclenché chez nous, musulman.e.s des Etats-Unis, c’est une prise de conscience vis-à-vis de notre rôle, notre place dans la société. Personnellement, c’est en étudiant les droits humains que j’ai réalisé l’impact qu’ont eu les musulman.e.s et l’islam dans l’Histoire. C’est là que ça m’est venu.

 

J’ai décidé de porter le hijab après le 11 Septembre, quand j’étais en troisième. Je me souviens de mes parents qui me disaient « Ne mets pas de hijab ! », « Essaie de te faire discrète, ne montre pas que tu es musulmane », parce qu’ils étaient effrayés par ce qui pourrait m’arriver. Mais je savais au fond de mon cœur que ma foi était un cheminement personnel. En rendant ma foi apparente, c’était comme si j’endossais un rôle de représentante de ma communauté. Porter le hijab m’a donné l’assurance et la confiance dont j’avais besoin.

 

Lallab : Comment t’es-tu retrouvée dans le monde militant musulman ?

Mon cheminement vers les droits civiques est intéressant en ce qu’il n’a pas commencé dans le milieu musulman.

J’ai eu la chance d’aller dans un lycée où on étudiait en profondeur l’esclavage, les mouvements noirs pour les droits civiques, etc, et ça nous donne vraiment les ressources pour comprendre ce que sont les discriminations, la lutte. Etudier l’Histoire est crucial pour comprendre ce que sont les droits civiques, ce qu’ils signifient, et leurs progrès à travers le monde.

Mon premier emploi était dans un organisme public : le centre pour la jeunesse et le développement de la communauté de New York. J’y travaillais pour l’engagement de la jeunesse, et ça me permettait en même temps d’en apprendre plus sur les différentes communautés de New York, leur fonctionnement, et ce qu’est le travail communautaire.

Je travaillais auprès des jeunesses noire et latino, qui faisaient face à des problèmes spécifiques, comme les discriminations. On parlait éducation, inégalités dans la société, et la façon dont tout ça avait un impact sur ces jeunes. Quand j’ai enfin candidaté pour travailler au CAIR (Conseil aux Relations Islamo-Américaines) et que j’ai été embauchée, j’avais déjà développé une passion pour ce travail.
Crédit : Sadyia Khalique

Crédit photo : Sadyia Khalique

 

Travailler avec la jeunesse, c’est ce qui me passionne. J’avais déjà travaillé dans ce domaine auparavant, et j’ai eu le sentiment qu’on ne prêtait pas suffisamment attention aux voix des jeunes et des enfants. Donc en entrant au CAIR, je souhaitais vraiment faire en sorte qu’on s’adresse à eux. Beaucoup de jeunes musulman.e.s peuvent être la cible de moqueries et d’insultes, se font arracher leurs hijabs, dans des écoles. Et les écoles sont censées être des espaces où l’on se sent en sécurité. On a donc profité du mois anti-harcèlement pour lancer une campagne abordant la question de l’islamophobie à travers le prisme du harcèlement.

Nous organisions des ateliers de sensibilisation dans les écoles. Il y avait en moyenne une centaine de jeunes qui venaient à chaque fois. On ouvrait la discussion sur la question du harcèlement, et la façon d’y mettre fin. Je reliais le harcèlement à l’islamophobie, et nous évoquions le ciblage particulier dont nous, en tant que musulman.e.s, étions victimes. Habituellement, personne ne parlait à ces jeunes de ces problèmes. A la fois parce que ça fait peur, et parce que c’est un concept académique difficile à comprendre, pour un.e jeune adolescent.e.

Le but était de donner aux jeunes des outils pour qu’ils puissent comprendre et appréhender l’islamophobie environnante.

C’est devenu le centre de mon militantisme : s’assurer qu’on éduquait nos communautés et leur transmettait de bonnes valeurs.

Je suis revenue au cœur de l’enseignement islamique, le premier verset du Coran : « iqra », « lis ».

C’est la raison pour laquelle j’aime tellement ce travail d’éducation au sein de nos communautés : en enseignant aux gens leurs droits et l’islam, on apprend énormément nous-mêmes. C’est devenu – et le reste aujourd’hui – un double objectif personnel : d’une part, comprendre comment le Prophète (paix et salut de Dieu sur lui) s’est battu contre l’injustice, et s’assurer que nous puissions suivre cet exemple. Et d’autre part, si je dois défendre les musulman.e.s et leur liberté de culte, je dois aussi comprendre pourquoi. Pourquoi est-ce si important ? Pourquoi est-ce que la prière est importante pour nous ? Pourquoi ce qu’on porte – le hijab, la barbe, ou que sais-je – est important pour nous ? Pourquoi c’est important de dénoncer ce qu’on dénonce ?

Je pense que, particulièrement en tant que musulman.e.s états-Unien.ne.s, on a la responsabilité de comprendre que ce qui se passe ici a un impact sur le monde. Les musulman.e.s aux Etats-Unis viennent de partout dans le monde. Si on peut résister à l’intolérance et aux discriminations, on peut, insha Allah, inspirer le reste du monde à faire de même.

 

Parlons politique …

 

Lallab : Au vu des résultats des élections aux Etats-Unis, et au regard de l’année électorale qui nous attend en France, est-ce que tu pourrais nous en dire plus sur la préparation et le travail accompli par les militant.e.s musulman.e.s dans ce processus, au cours des derniers mois/années ?

 

Pendant les élections, un certain nombre de personnalités publiques, dont Trump et d’autres candidat.e.s, ont tenu des propos dégradants sur les musulman.e.s. Alors ce que faisait la communauté musulmane, à travers CAIR entre autre, c’était interpeller ces candidat.e.s, et demander des excuses. Nous avons condamné leurs propos. Je me souviens avoir donné une interview à CNN après un discours de Trump, pour dénoncer ses propos remettant en cause la nationalité américaine des musulman.e.s américain.e.s… Il fait de nous des boucs émissaires sur la base de notre prétendue différence, mais on n’est pas différents. On est aussi l’Amérique.

De nombreuses associations comme CAIR, et des militant.e.s, ont demandé des comptes aux candidats sur les propos qu’ils ont tenu pendant la campagne électorale. Elles ont également mené une campagne auprès de la communauté musulmane pour inciter au vote et à la mobilisation. Et al hamdulillah (la louange est à Dieu), les gens ont répondu à notre appel.
Crédit Sadyia Khalique - CNN

Crédit Sadyia Khalique – CNN

 

Lallab : Et quid d’Hillary Clinton ? La communauté musulmane est largement composée de personnes issues de l’immigration et de Noir.e.s américain.e.s, qui ne voyaient probablement pas d’un bon œil sa candidature au vu à la fois de son positionnement en termes de politique étrangère et sur le système carcéral raciste, entre autre.

 

(…) Je crois que les musulman.e.s étaient plutôt divisé.e.s, sur Hillary. Mais après, il faut prendre en compte qu’elle ne faisait pas de déclarations incendiaires comme Trump. Ce qu’on essayait de faire, c’était surtout nous assurer que les gens votent contre Trump, parce que les gens qui le soutiennent, ses supporters, sont des gens dangereux, à qui sa victoire donne du pouvoir, ou leur en donne l’impression.

Dans un sondage du CAIR, on a réalisé que pendant les élections, après chaque débat politique ou déclaration évoquant l’islam, il y avait un acte de vandalisme sur une mosquée, une agression ou un crime haineux qui se produisait. Après la victoire de Trump, beaucoup de musulmans étaient en état de choc. Certaines personnes étaient en pleurs. Personne ne pensait qu’il gagnerait. Parce que cet homme n’attaquait pas uniquement les musulman.e.s : il attaquait quasiment toutes les minorités. Au final, tout ça aura au moins permis qu’aujourd’hui, les personnes issues de communautés marginalisées, et attaquées par Trump, s’unissent. Et ça, c’est puissant.

Je suis actuellement investie dans une association appelée Muslims Thrive. L’idée est que notre communauté a été tellement blessée par l’espionnage, les crimes de haine, le harcèlement, l’étiquetage, les discriminations … qu’on a besoin de cicatriser, de nous reconstruire. On a besoin de sources et d’espaces pour parler des problèmes qui ont un impact psychologique sur nous. Là, maintenant, on a besoin d’être là les un.e.s pour les autres, pour pouvoir s’aider les un.e.s les autres. Ça ne fait que quelques jours que nous avons eu les résultats des élections. On est encore en train de les digérer, de réfléchir à comment on peut s’organiser autour de ça.

Tu ne peux pas perdre espoir. Tu ne peux pas laisser ça définir notre communauté et notre société. Il est temps de se réveiller et d’agir.

Agir !

 

Lallab : Comment ? C’est quoi, le plan ?

 

Personnellement, je conseille à mes ami.e.s de se concentrer sur leurs communautés d’origine. Une communauté locale par exemple, à l’échelle d’un quartier, d’une ville, mais aussi nos communautés religieuses, familiales, ou au niveau d’une école…

Quand je travaillais au CAIR, beaucoup de mes ami.e.s me disaient : « Tu fais un travail formidable ! ». Et je leur répondais toujours : « Ecoute, j’ai la chance, grâce à Dieu, que ce soit mon métier. Mais tu fais déjà partie de la solution, toi aussi. Tu t’engages en nous soutenant, en aidant sur les réseaux sociaux, en parlant à ta famille, tes collègues … ».

Ensuite, je crois que nous devrions travailler sur nos relations avec les autres communautés de foi, par exemple. Le prophète (paix et salut de Dieu sur lui) avait des ami.e.s de différentes religions : il travaillait avec la communauté juive, la communauté chrétienne, etc, et c’est un exemple dont nous devons nous inspirer.

Enfin, il y a des causes qui rassemblent. Quand je me suis investie dans la lutte pour la justice climatique, j’ai découvert une communauté très portée sur le travail interreligieux. J’ai pu rencontrer de nombreuses personnes à travers le monde, du Bangladesh à la France, impliquées sur cette question. C’est typiquement un problème qui nous concerne tou.te.s.

 

Nous, en tant que femmes, sommes dans une position de pouvoir. Chaque femme devrait se concentrer sur ses points forts. Chacune d’entre nous emprunte des chemins différents. Mais chacun d’entre eux s’inscrit dans un chemin commun plus grand encore.

On ne devrait jamais discréditer les actions de ces personnes qui font ce qu’elles font à leur échelle, juste parce qu’elles ne le crient pas haut et fort. J’ai parfois l’impression qu’on se focalise tellement sur les militant.e.s qu’on oublie celles et ceux qui militent au sein de nos propres foyers. Si tu sais donner de l’amour, t’occuper d’une famille ou de jeunes enfants, tu es déjà en train d’éduquer toute une génération à venir, leur apprendre à ne pas discriminer, s’aimer les uns les autres, et éprouver de l’empathie.

 

Lallab : Un dernier conseil pour nous encourager, en cette année électorale ?

 

Je crois qu’il n’y a qu’une seule chose sur laquelle je voudrais insister : concentrez-vous sur l’amour. Concentrez-vous sur ce que vous aimez, sur la beauté, sur ce qui vous fait plaisir. Parce ça vous donnera espoir. Et quand vous avez espoir en ce que vous faites, ce en quoi vous croyez, en vos capacités, ça vous aide à changer le monde.

Notre religion nous enseigne une chose : c’est que l’amour de Dieu est plus puissant que tout. Et Dieu nous protège en permanence. Dieu est là pour nous, Il nous guide. Et toutes les épreuves sur notre chemin ne sont que des opportunités de nous rapprocher de Lui.

 

Article co-écrit par A. K. et Inès S. contributrices chez #Lallab

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(Dé)construction

Féministes, énervées et fières de l’être !

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Je n’étais pas énervée, mais tu m’énerves à dire que je suis énervée. Et puis, quand bien même je serais énervée, tu m’énerves à dire que je ne dois pas m’énerver quand tu dis que je suis une femme énervée juste parce que ça t’énerve que je sois énervée. 
Difficile de garder son calme devant un individu qui fait sans vergogne du tone policing. A ce moment-là, on a envie de tout faire sauf d’allumer un cierge et de chanter la paix… Pour appréhender ce type de manipulations, il faut d’abord commencer par les reconnaître. Explications.

 

Le tone policing sous-entend que le discours des militantes féministes aurait plus de succès si elles s’exprimaient de manière moins agressive. Il s’attarde sur la forme du propos pour réduire au silence sa teneur même. Les féministes (à plus forte raison les féministes intersectionnelles, puisqu’elles militent contre plusieurs oppressions corrélées) seraient susceptibles sur les bords et en profondeur, et cette susceptibilité se manifesterait souvent par de l’agressivité. C’est un des stéréotypes les plus souvent associés aux féministes, même par ceux et celles qui affirment reconnaître la véracité de leurs propos. Une femme qui parle fort, c’est vulgaire ; d’ailleurs, elle a ses règles, non ?

Est-il nécessaire de souligner que notre colère est inhérente à ce message, qu’elle est justifiée par les multiples discriminations dont les femmes, les personnes racisées et autres minorités sont victimes ? Ce tone policing n’est pas seulement une question de ton, il fait partie intégrante de la politique de respectabilité.

 

Mrs Dreydful, féministe intersectionnelle noire, abordait la politique de respectabilité de cette manière :

Le concept de politique de respectabilité peut être aussi valable pour d’autres oppressions, bien sûr, puisqu’il s’agit de rentrer dans un certain moule qu’impose la société pour ceux qui sont “autres”, et que correspondre à ce moule serait en corrélation avec la discrimination subie. Cependant, il s’agit aussi d’un concept ayant d’abord émergé au sein du féminisme noir.

Selon cette fameuse politique de respectabilité, vous pouvez demander l’égalité, mais faites-le de manière calme, et si possible avec le sourire. Si vous refusez, vous prenez le risque d’entendre : « la féministe est une hystérique aigrie », et les antiracistes « en rajoutent car la République est indivisible », « ne soyez pas féministes mais humanistes », ou « Angry Black Woman » pour les afroféministes…

Il s’agit d’annihiler toute écoute d’un message et de le rendre invisible. Quant à la colère des opprimé.e.s, elle n’est jamais légitime, toujours hors limite : on appelle toujours à une maîtrise de soi.

Crédit Suzie Mason : https://www.behance.net/waffleandb7f36
Crédit photo : Crédit Suzie Mason

 

Quand la personnalité a bon dos !

 

En matière de techniques de décrédibilisation des victimes, il faut dire que certain.e.s font preuve d’une très grande inventivité…

Dans la lignée du tone policing et du victim-blaming (ce phénomène de culpabilisation de la victime d’oppression, de violence ou de viol, ainsi que de remise en question incessante de sa parole), d’autres techniques tout aussi pernicieuses sont utilisées par les pourfendeurs du militantisme et de l’activisme. Cette fois, il ne s’agit pas de souligner une supposée agressivité qui nuirait à la diffusion du message, mais d’invoquer un ou des traits de personnalité peu avantageux que détiendrait la personne d’en face et qui seraient, à eux seuls, responsables d’une distorsion de la réalité.

Les oppressions liées au sexe, à la race ou au genre ne seraient qu’un amas d’affabulations émanant d’une personne instable et en manque de confiance. Une trop grande susceptibilité ! Voilà, c’est ça ! Féministes et activistes, arrêtez tout ! Cette personne a trouvé la cause de tous les maux de cette société, et ce n’est rien d’autre que… VOUS !

Ce serait donc notre sensibilité particulière de personnes « sur la défensive et émotionnellement fragiles » qui nous amènerait à prendre les oppressions trop à cœur. Cette méthode consiste à mettre à distance la teneur même du propos pour se concentrer sur les sentiments de l’individu qui les énonce.

Grosso merdo, votre détracteur vous dit : « Je suis dans une réalité objective, alors que toi, tu es dans une réalité subjective façonnée par ton vécu et déformée par ton affect ».

OMG… Les violences physiques et symboliques faites aux femmes, le racisme, le classisme, la transphobie, l’homophobie, etc… Et in fine, les exclusions n’existent pas, ou du moins, elles existent, mais dans des proportions significativement moins importantes que celles qu’on imagine. Merci bien pour cet éclairage.

 

L’art de se voiler la face

 

Au détour d’une conversation houleuse avec une personne manifestement loin de toutes ces considérations, j’ai entendu cette phrase pleine de mauvaise foi :

Non non, je ne dis pas que les oppressions n’existent pas, mais je me demande bien ce qui te motive, les raisons qui font que tu en es là aujourd’hui

En plus d’être intrusive, cette question délégitime et tient inexorablement à distance les raisons de votre engagement. Traduction: « Ohlala, oui, c’est affreux ce que tu as vécu. Je comprends. Mais ceci te concerne et est corrélé à ton vécu ». Comme si nous ne vivions pas dans la même réalité. Faussement compatissante, cette réaction vise autant à vous faire culpabiliser qu’à faire taire vos revendications. C’est aussi la preuve criante de la politique de l’autruche que pratique à outrance la plupart de nos interlocuteurs. « Hors de ma vue cette dure réalité ! »

Le stéréotype de la femme qui n’est pas censée avoir de revendications sans qu’on lui fasse un procès en personnalité est coriace. Mais tenons bon. Notre combat n’a rien à voir avec nos supposés « complexes » et nos traits de caractère. Comme le sein dénudé de la femme dans Le Tartuffe de Molière, les discriminations dévoilées sont alors des objets par lesquels « les âmes sont blessées, et cela fait venir de coupables pensées ». N’est-ce pas le trait caractéristique du comportement des hypocrites ?
N’oubliez pas que votre combat n’est pas là pour déculpabiliser les oppresseurs.

 

Crédit photo : Tumblr
Crédit photo : fuckyeahsubversivekawaii

 

Image à la une : db Photography | Demi-Brooke

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Les 10 personnages récurrents de ma vie de femme voilée

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Avec mon foulard sur la tête, je me suis rendu compte que beaucoup de gens gravitaient autour de moi : ils parlent de moi, se soucient de moi, veulent m’aider à mener ma vie – bref, que du bonheur. D’autant plus que (presque) tous ces gens font tout ça pour moi, bien évidemment. Voici les portraits-types des quelques personnages qui reviennent régulièrement dans ma vie, que je les y aie invités ou non…

 

1) La féministe qui ne voit pas le paradoxe dans le fait de dicter à une autre femme ce qu’elle doit faire

Mais non, c’est pour ton bien. Je suis juste tellement heureuse d’avoir trouvé la vérité absolue que je veux partager ce bonheur avec toi. Je ne vais pas te laisser tomber. En fait, je ne vais pas non plus te laisser respirer.


Le féminisme de la troisième vague : le choix de faire le « bon » choix. 

 

« Je pense que les femmes devraient avoir le droit de choisir ce qu’elles font de leur corps !

Enfin… Sauf si elles choisissent de faire de la chirurgie esthétique, de raser leurs poils pubiens, d’être mère au foyer, de ne pas allaiter, d’être travailleuse du sexe ou mannequin, de porter le voile, ou de faire toute autre chose que j’ai décrétée oppressante pour les femmes.

Certaines femmes ne savent tout simplement pas ce qui est bon pour elles ! »

 

2) Le.la Maghrébin.e qui veut être plus royaliste que le roi et qui pense que me rejeter l’intégrera mieux dans la société

 

… Sauf que même si tu es considéré.e comme un.e gentil.le Maghrébin.e, tu seras toujours un.e Maghrébin.e – c’est la triste réalité et j’en ai fait l’expérience pendant toutes les années où je ne portais pas le foulard. Sans compter que si vous vous débarrassez de nous, c’est toi qui seras le plus différent.e et donc à la marge, coco, alors, réfléchis bien à ce que tu défends comme projet de société.

 

3) Le beauf de base qui pense que les mots « musulman.e » et « arabe » sont interchangeables

 

Au passage, les Arabes représentent seulement 20% des musulman.e.s de la planète, et le plus grand pays musulman du monde est l’Indonésie. Désolée si cette découverte vous fait un point commun avec le beauf de base… Oups 😉

 

 

4) La personne qui veut interdire mon foulard pour me protéger et me libérer

 

… Mais qui, bizarrement, me traite généralement en coupable et est beaucoup plus prompte à s’en prendre à moi qu’à mon prétendu oppresseur. En même temps, c’est vrai qu’ils font peur, ces mecs arabes, alors mieux vaut ne pas prendre de risques…

 

5) Une de mes préféré.e.s : la femme qui me voue un mélange de fascination et de répulsion

 

C’est celle qui me regarde du coin de l’œil quand je fais les magasins et qui détourne les yeux dès que nos regards se croisent, mais qui a encore la mâchoire à moitié décrochée. Le moindre truc que je fais comme elle lui semble incroyable – y compris faire du shopping, apparemment.

Elle aime bien les histoires du genre « Jamais sans ma fille » et doit s’imaginer que je vis dans un HLM transformé en harem, où je fais la danse du ventre et cuisine du couscous toute la journée pour mes 20 gosses. Elle pense me faire peur en parlant de suppression des minima sociaux, alors que mes cotisations salariales paient son arrêt maladie, la retraite de son oncle et le chômage de sa voisine.

 

6) Le politicien qui a bloqué toutes les propositions de loi punissant plus sévèrement le harcèlement sexuel, couvre ses confrères accusés d’agression sexuelle, ferme les yeux sur les violences conjugales et les 75 000 viols commis chaque année en France, fait des blagues graveleuses aux journalistes, siffle sa collègue parlementaire parce qu’elle est en robe, préfère payer des amendes plutôt que de respecter la parité dans son parti, ne fait rien pour l’application de la loi sur l’égalité des salaires… mais qui se passionne tout d’un coup pour les droits des femmes et l’égalité des sexes.

 

Parce que vous le valez bien.

5-vous-le-valez-bien

 

7) La personne encore un peu enfermée dans ses représentations néo-coloniales et qui voit en moi une victime de plus à sauver

 

– Euh… Non mais j’ai cédé à rien du tout, c’est moi qui ai voulu le porter, ce foulard !

Eh oui, parce que parfois, j’ai l’impression de penser ou vouloir quelque chose, mais heureusement, il y a toujours quelqu’un pour me dire ce qu’il y a VRAIMENT dans ma tête. Merci, Maître.

 

8) Le pseudo-intellectuel qui connaît mieux l’islam que les musulman.e.s

 

Aaaah, en fait il n’y a qu’une seule bonne interprétation de l’islam, et il se trouve que c’est toi qui en détiens la clé ? Et donc, les femmes n’ont pas besoin de porter le hijab ? Mince, tout ce temps où je me suis embêtée pour rien ! Merci pour l’info, en tout cas, il vaut mieux tard que jamais.

 

9) La personne qui se veut ouverte mais qui pense que mon identité est un fardeau dont il faut me débarrasser

 

« C’est vraiment dégueulasse, cette discrimination envers les musulman.e.s. Alors que vous avez juste besoin d’un peu de temps pour vous intégrer et vous libérer de vos traditions. Même toi, tu verras, tu arriveras à enlever ton voile. Allez, tu peux me le dire, je suis de ton côté, moi : c’est ton père ou ton frère qui te l’impose ? »

 

10) Mes coreligionnaires qui pensent que je suis censée être devenue une sainte du jour au lendemain

 

Mmh oui, effectivement, je suis humaine, j’ai des défauts, des faiblesses et des contradictions. Autre chose ?

 

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3 conseils pour assumer son féminisme

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Non, vous n’avez pas à avoir honte d’être féministes

 

 

On aura souvent entendu que le féminisme fait peur ou qu’au contraire, il attire, comme un aimant. Que nenni ! Il est à mon sens moins craint que récupéré. Il est plus dévoyé qu’admiré. Difficile de rester droites dans ses bottes face à tant de pression. Voici donc 3 conseils pour assumer votre féminisme

 

1) Restez vous-même.

 

Ah bon ? Tu ne veux pas essayer le jeu des T-shirts mouillés ou parler en public de ta sexualité forcément décomplexée ? Shame on yooouuuu !

Etre féministe ne signifie pas forcément être à l’aise dans un environnement masculin et vous ne devez pas avoir honte de ne pas toujours vous sentir à votre place. Assumez-vous, certes, mais gare à l’homme qui vous fera passer pour une femme inapte, perpétuellement mal à l’aise en vous balançant des phrases du type : « bah alors, lâche-toi, t’es féministe ou t’es pas féministe ? » lorsque vous refusez, par exemple, de parler de certains sujets ou que vous signifiez votre embarras d’être dans un espace entièrement investi par la gent masculine. Dites-vous qu’il s’agit davantage d’une injonction qui vous est faite de vous conformer à une image biaisée et masculine du féminisme, que de vous pousser à aller au bout de votre engagement. Cet homme, à moins d’être en fait Madame Irma, ne sait pas mieux que vous où commencent et où s’arrêtent vos convictions féministes !

 

2) Ne vous censurez pas.

 

Waf waf : « Attention chienne méchante ».

Qui n’a jamais entendu que les féministes sont « susceptibles », qu’elles n’ont de cesse d’être « scandalisées » ou de « chipoter ». Le terme psychophobe « hystérique » est très fréquemment utilisé et comme les autres, il n’a pas d’autre but que de décrédibiliser le propos des concerné.e.s. Et cette stratégie fallacieuse ne date pas d’hier. En 1975, dans son ouvrage Ainsi soit-elle, Benoîte Groult citait Jean Cau, qui affirmait : « Les féministes, vous êtes des moches, vous êtes des mal-baisées, des pas baisables » .

Jugez vous-même cette sympathique phrase de Jean Lartéguy : « Bréhaignes stériles et affamées, affreuses, vioques, mal baisées, profs de philo à la retraite ».

Je suis sûre que tu es charmé.e par ces mots doux et tu veux le 06 de Jean ? Dommage, il est mort.

Pour défendre Jean-Michel Maire contre les accusations d’agression sexuelle et notamment de favoriser le slutshaming et la culture du viol, Cyril Hanouna et sa clique de TPMP ont trouvé les coupables idéaux : les journalistes et les féministes. (Pas de chance, je suis les deux. Je vais donc de ce pas m’auto-flageller.) Non seulement, elles.ils n’auraient pas d’humour, mais en plus, elles.ils manipuleraient l’opinion et créeraient des polémiques inutiles.

Ces phrases pleines de mépris émanent de la bouche des hommes, mais aussi étonnant que cela puisse paraître, nombreuses sont les femmes qui ont « succombé » à la mauvaise réputation du féminisme et ont intériorisé la misogynie. Insidieusement, on pousse les femmes à se distancier d’un féminisme « infréquentable » et donc à se taire.

L’argument anti-féministe qui consiste à accuser l’autre d’agressivité dès lors que l’on n’est pas d’accord avec ses idées, n’a qu’un seul objectif : vous discréditer !

Mais soyez fortes !

En outre, encore trop de personnes confondent féminisme et sexisme anti-hommes. Bouh les hommes ! Comme si l’objectif de ces femmes était de leur couper les cacahuètes et de les exposer en trophée… euh, non merci. 

Le Tumblr « Women Against Feminism » est une des expressions de cette croyance.

I don’t need feminism because : it’s hurting men and it’s not helping women
Je n’ai pas besoin du féminisme car : ça blesse les hommes et ça n’aide pas les femmes

 

Les féministes se battent pour l’égalité des sexes et défendent aussi bien les droits des femmes que ceux des hommes …

Vidéo sur « l’épouvantail féministe » dans les films hollywoodiens :

 

3) Vous pouvez ne pas être d’accord avec d’autres féministes et rester féministe.

 

L’objectif des féministes est le changement des mentalités : l’abolition du patriarcat, c’est-à-dire un changement de société. Notre but n’est pas d’avoir une « image acceptable » et il n’est pas de nous enliser dans notre zone de confort, mais au contraire de pousser à ouvrir les yeux sur la réalité du patriarcat.

La première erreur est de croire que le féminisme est un bloc homogène en occultant tous les autres courants. « Je n’étais pas d’accord avec ces féministes, alors je pense que je ne suis pas féministe… » ou « je n’apprécie pas la démarche des Femen alors je pense que toutes les féministes ont la même ». Le féminisme doit rester une cause solide que vous défendez. Et cette cause ne doit pas être tributaire des actes des autres, peu importe ce que vous en pensez.

La seconde erreur, et pas des moindres, est de croire que l’image d’une femme engage celle de toutes les autres.

Exemple flagrant : celui de Nabilla, pointée du doigt et accusée de mettre à mal des années de luttes féministes à cause de l’ « image » qu’elle donnerait des femmes. On a du mal à imaginer que le même reproche soit fait aux hommes : « Olala mais quel goujat, regardez quelle image il donne des hommes ! »

Alors croyons en nous ! Il s’agit de la première étape pour couper l’herbe sous le pied de nos détracteurs.

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« Harceler les femmes n’est pas une preuve de ta virilité »

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Mademoiselle, c’est un conseil : tu es trop belle et trop sexy mais c’est dommage, tu te prends trop au sérieux. Fais un sourire quand tu marches dans la rue !

Nous sommes vendredi 20 mai 2016, en plein cœur de Bordeaux. Il est environ 16 heures et mon sang ne fait qu’un tour. Cet homme d’une quarantaine d’années n’est pas à son premier coup d’essai. La suffisance de ce bellâtre aux cheveux gras est à la hauteur de ma stupéfaction. Comment peut-on se lever du tabouret sur lequel on est confortablement assis, traverser la rue et bloquer le passage à une jeune femme pour lui donner un « conseil » vindicatif sur la manière dont elle doit se comporter dans l’espace public ?

Si cet homme n’a pas de respect, pourquoi n’a-t-il pas au moins la flemme ?

Je ne suis pourtant pas au bout de mes surprises. Pour le bougre, il s’agissait d’une démonstration. Une horde de jeunes hommes avec qui il scrutait la rue a assisté à la scène, à la fois hagards et contemplatifs. Sommé de rester à sa place et de ne pas m’indiquer la manière de me comporter, l’animal s’est ensuite offusqué tout en feignant le dégoût.

Oh mais tu cries en plus, je déteste les femmes qui crient ! 

Quel dommage ! j’avais pourtant tout misé sur mes chances avec cet homme. Je vais donc devoir me remettre de cette rupture avec ce machin gesticulant qui regrette de ne pas pouvoir m’agresser dans le silence. Ma vie est foutue.

Remarques gênantes et intrusives, insultes, sifflements … Tous les jours, les femmes, quel que soit leur âge ou leur physique, subissent le harcèlement de rue. Il y a 4 ans, la réalisatrice belge Sofie Peeters a mis en exergue ce phénomène avec Femmes de la rue, un documentaire sur le sexisme ordinaire à Bruxelles.

Selon le géographe Yves Raibaud, le harcèlement de rue est « une pratique systémique qui participe à faire de la ville un espace essentiellement masculin. » Oui le harcèlement est exercé par un même acteur : le mâle hétérosexuel.

 

Petit mémo à destination des harceleurs

 

Difficile de stopper toute velléité masculine de mettre les femmes au premier plan de ses priorités malsaines dans l’espace public. Alors à toi, homme qui investit la rue, voici un petit mémo en 6 points qui te montrera que non, aucune femme n’a envie que tu commentes sa tenue, sa démarche ou la forme de ses fesses lorsqu’elle se promène.

 

1. D’une part, parce qu’elle ne te connaît pas. Et d’autre part, parce qu’elle ne t’a pas demandé ton avis.

 

Demande-toi ce que tu infliges à cette femme lorsque tu pénètres son espace de tranquillité pour répondre à une question qu’elle ne t’a pas posée. Entends-tu des voix ?

 

2. Non, une femme n’a pas envie que tu commentes son apparence car, tout simplement, et aussi étonnant que cela puisse te sembler, elle n’a pas envie de te plaire.

 

Kesako ? Je répète : la femme que tu harcèles à ce moment précis ne s’est pas levée le matin en espérant satisfaire tes yeux et ton bonheur. A vrai dire, tu n’existes pas et elle ne vit pas pour toi, l’agresseur.

 

3. Non, tes remarques sur son apparence ne la valorisent pas.

 

Justement parce que par ces mots salaces tu participes à l’injonction permanente que subissent les femmes, à savoir : être désirables. Elle ne veut pas que tu la désires. Elle n’est pas ton objet sexuel.

 

4. Non, la rue ne t’appartient pas.

 

La rue est un espace public et donc un espace ouvert à tous.tes. As-tu passé un test réservé aux hommes afin de pouvoir y circuler sans encombres ? Pas aux dernières nouvelles. Alors rappelle-toi que tu n’as pas à indiquer à une femme comment elle doit y circuler ni lui imposer ton comportement intrusif.

 

 5. Non, tu n’obtiendras pas de faveurs sexuelles de la part d’une femme en l’insultant ou en la sifflant parce que tu penses qu’elle adore.

 

Sois réaliste, une femme n’est pas qu’un corps, elle réfléchit et ne va pas te remercier pour ton comportement abject. Qui es-tu pour croire le contraire ?

 

6. Non, tu n’es pas le premier homme qui l’agresse même si c’est la première fois que tu la vois.

 

Et oui, rappelle-toi que tu n’es pas le centre du monde et qu’agresser plusieurs femmes une fois chacune fait bel et bien de toi un harceleur.

 

Alors messieurs, laissez l’espace public être un espace de transit, de voyage et de partage. Un espace que vous devez aussi nous laisser arpenter en paix.

 

Crédit Photo : Pour sensibiliser les hommes au harcèlement de rue, Tatyana Fazlalizadeh, une artiste originaire de Brooklyn, a eu l’idée de placarder sur les murs des grandes villes américaines et Européennes d’immenses portraits de femmes, sous lesquels sont inscrits des messages à l’intention des harceleurs.

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