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Le viol est le crime dont tout le monde se fout ! Partie III

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Vous l’aurez compris, le constat alarmant hurle l’urgence d’agir. Pas demain, pas dans dix ans, aujourd’hui. Les siècles passés nous ont fait hériter de la culture du viol et ont laissé ce fléau sévir depuis beaucoup trop longtemps. A nous de mettre fin à cette lâcheté qui n’a pas de nom, à ces pratiques mafieuses indignes de notre humanité. Pour toutes ces femmes et ces hommes dont nos silences ont augmenté leurs maux et leurs troubles, nous nous devons, d’une oreille attentive, d’écouter leur récit et leur redonner cette bribe d’humanité que le viol leur a arrachée. Après avoir dessiné les pourtours de la culture du viol, il est temps d’imaginer quelques actions concrètes et faciles à mettre en place pour aider chaque victime à se reconstruire dignement et reprendre le cours de cette vie qui a un jour été brutalement suspendue. 3, 2, 1… Action !

 

Déconstruire toutes les idées reçues autour de la culture du viol

 

Aucune action ne sera pleinement bénéfique et utile si la culture du viol continue de régner en maître. Vous l’aurez compris, cette façon de penser n’est que la résultante d’une domination patriarcale qui a proliféré dans l’esprit de nombreux individus à travers le temps. Cette pensée n’a ni fondement logique, ni logique humaine. Elle ne participe qu’à un humanicide, homicide, féminicide et infanticide : elle tue à grandes vitesses et fait beaucoup trop de victimes.
Même si changer sa façon de penser et adhérer à une chose totalement nouvelle, ne se fait pas en un jour, commencer par ne plus considérer les victimes comme coupables est déjà un premier pas. Il est temps de remettre chaque chose à sa place et d’œuvrer en faveur d’une vraie justice : reconnaître enfin les victimes telles quelle. Il n’y a plus de place à la culpabilisation, ou renvoi de fautes sur les victimes. Une écoute attentive, bienveillante et sans couper la parole est déjà une aide inestimable, l’expression d’une empathie et humanité dont il resterait quelques bribes.

Parler, hurler, dénoncer : reprendre sa voix !

 

Nous avons observé combien être violé·e réduit au silence les victimes et plonge la société dans un silence complice. En brisant cette omerta, on fait reculer la loi du silence, on donne plus de visibilités aux victimes et, ce faisant, on oblige la justice à ouvrir les yeux, les politiques à prendre leur responsabilité.
Parler c’est déjà évoquer ce sujet dans son entourage proche ou lointain pour les informer sur ce qu’est un viol et quelles en sont les répercussions. Une société mieux informée est une société plus à même de se défendre et de se protéger. Le silence a induit à l’impunité des violeurs. La parole doit pouvoir les condamner.
Parler c’est aussi être attentifs à son entourage et ouvrir le dialogue pour lui permettre, en cas de viols ou agressions sexuelles, de pouvoir venir le dénoncer. C’est ouvrir la porte de l’échange verbal pour apaiser le cœur des victimes et s’indigner avec elleux. C’est leur montrer que leur parole n’est plus silenciée mais écoutée.
Parler c’est s’indigner lorsqu’on entend des affaires de viols. C’est gueuler pour mettre la justice et les politiques face à leurs responsabilités. Car gouverner ce n’est pas juste s’asseoir dans un fauteuil, plusieurs heures, à discuter des lois. C’est surtout et avant tout garantir la sécurité et la protection de celleux qui nous ont fait suffisamment confiance en votant pour nous.

 

Protéger les enfants, première cible des violeurs, c’est préserver notre humanité

 

Protéger les enfants est essentiel. Ils sont les premières cibles des violeurs car, du fait de leur jeune âge, ielles ne se rendent pas comptent de ce qui leur arrive et leurs paroles est trop souvent mises en cause par les adultes censé·es les protéger.
Le tabou autour de la sexualité est le passeport d’entrée qu’utilisent les violeurs pour commettre leurs méfaits, a fortiori sur des enfants. Qui plus est, ceux-ci seront sujets à une amnésie traumatique donc leur parole ne pourra être libérée qu’après de nombreuses années. Toutes ces années seront des instants de souffrances. Nous devons tout faire pour les éradiquer. Car, en laissant les enfants être de telles proies, on crée des adultes de demain en souffrance, des adultes cabossés, et c’est une partie de l’humanité qu’on met en danger.
Il est donc essentiel que les adultes libèrent la parole à ce sujet-là, en protégeant les enfants. Car, bien souvent, les violeurs peuvent être des personnes en qui les adultes, parents, protecteurs, avaient confiance. Il faut donc permettre aux enfants de dénoncer ces odieux actes en leur donnant la possibilité de s’exprimer, en leur apprenant que nul n’a le droit de toucher à son corps, sans son accord. Oui, le consentement s’apprend.
De façon simple et concrète, il ne faut plus avoir peur de nommer les parties intimes des enfants. De la même manière qu’on nomme leur bouche, leurs genoux ou leurs oreilles, énoncer les mots “vagin” et “pénis” ne devraient pas être problématique. Trop souvent, ce sont nos complexes d’adulte qu’on projette sur nos enfants. Or, pour ces derniers, ces mots ne sont que du vocabulaire anatomique, sans aucune connotation sexuelle. Comment pourrait-il en être autrement puisque la sexualité n’existe pas encore dans leur conscience ?
Ensuite, il s’agit de dire à nos filles et à nos garçons, que personne n’a le droit de les toucher au niveau du pénis, du vagin ou des fesses et personne n’a le droit non plus de leur montrer ou leur demander de toucher son pénis, son vagin ou ses fesses. En disant ces quelques mots, nous disons à l’enfant qu’il y a une barrière, une limite à ne pas franchir sur soi ou sur autrui. Ainsi, dès lors que cette limite est outrepassée, l’enfant aura conscientisé une certaine transgression, même s’il ne sera pas en mesure de la comprendre. Il pourra alors se référer à l’adulte de confiance pour lui dire qu’autrui a franchi certaines limites. Se faisant, nous diminuons considérablement le risque de développer une mémoire traumatique, une amnésie traumatique et nous pouvons permettre une prise en charge rapide et immédiate des violences sexuelles. Nous offrons la possibilité à l’enfant d’être soigné rapidement pour ne pas développer des psychotraumatismes et risquer une vie terrible de souffrances. Nous donnons cette opportunité aux protecteurs de porter plainte au nom de l’enfant contre le/la transgresseur·se et lui permettre d’être enfermé·e. Nous évitons que les adultes en devenir traumatisé·es ne soient de nouveau silencié·es à cause d’un délai de prescription.
Nous protégeons, tout simplement, nos enfants.

Crédit Photo à la une : affiche de la série Sweet/vicious

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Diffuse la bonne parole

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(Dé)construction

Le viol est le crime dont tout le monde se fout ! Partie II

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On dénombre en France, en 2018, plus de 190 000 victimes de viol[1] ou tentatives de viol par an. Un chiffre bien en deçà de la réalité puisque les victimes de viol sont souvent silencié·es par l’amnésie traumatique dont ielles peuvent être sujet·tes et surtout l’omerta[2] de la société. Il est étonnant de voir que la culture du viol grandit en force et prend une place considérable dans l’esprit des citoyen·nes, induisant un déni total quant à ces réalités. Ce silence est monstrueux et n’a plus le droit d’exister. Car il condamne des centaines de milliers de vies, chaque année, à passer une existence de souffrances et d’abandon, s’ajoutant à la douleur du traumatisme. Nous ne pouvons plus permettre que de telles destructions humaines surgissent encore. Nous ne pouvons plus tolérer que nos proches soient livré·es à elleux-mêmes face à leurs blessures et leurs traumatismes, tentant désespérément de retrouver un souffle de vie. Nous ne pouvons plus fermer les yeux sur des crimes que les sociétés et époques antérieures ont laissé se perpétuer. NOUS N’EN AVONS PLUS LE DROIT. Il est de notre devoir d’agir. Le viol est un infanticide, un féminicide, un homicide et un humainicide. Par le caractère destructeur qu’il représente, il est un danger pour notre humanité. Nous devons le faire reculer, en commençant par briser, exterminer, éradiquer la culture du viol et la multitude de violences qu’elle cristallise.

 

La culture du viol : un drame en 3 actes ou l’expression d’un monde à l’envers

Les lois du silence : quand la société ne dit mot, elle consent.

 

Les psychotraumatismes résultant du viol sont trop méconnus. Pourtant, les connaitre participerait à moins légitimer la culture du viol et à faire preuve de plus d’empathie envers les victimes pour mieux les protéger. Or, le constat actuel est alarmant puisque toutes les sphères privées comme publiques consentent à fermer les yeux sur la réalité des viols en termes de prévalence mais surtout en termes de cassures.

 

L’échec des protecteurs : la famille, les soignants et la justice

La famille est la première société dans laquelle évolue l’individu. Avant d’apprendre à sociabiliser à l’école, puis entre amis, ensuite au travail etc, l’enfant apprend l’existence de droits et devoirs qui lui incombent au sein de sa famille. C’est également cette même famille qui est censé le protéger, le sécuriser, l’aimer, pour lui permettre un développement optimal. Or, quand il y a des failles à ce niveau-là, c’est tout l’équilibre de l’enfant qui risque de voler en éclat et de le fragiliser. On observe, en matière de viol, que cette structure cède à plusieurs niveaux.

Toutes les familles ne sont pas parfaites mais comporter en leur sein un violeur, un prédateur, est d’une horreur sans nom. D’aucuns penseraient à tort que les violeurs surgissent au bord de la route, le soir, une nuit d’orage, avec une musique de fond un peu angoissante, un silence pesant et … ce genre de scénarios ne trouvent échos que dans les films. En effet, dans la réalité, plus des ¾ des victimes connaissent leur agresseur et dans bon nombre de cas, c’est un proche. Cela est d’autant plus vrai lors des viols conjugaux et incestueux. Le traumatisme est d’autant plus lourd que l’adulte ou la personne qui transgresse est un être auquel on a été attaché affectivement. La confusion se fait ardemment dans l’esprit où il devient difficile de concevoir que cet “être qui est censé m’aimer puisse me faire subir une telle ignominie.”

Au-delà de la présence d’un violeur dans la famille, cette entité peut devenir traumatisante lorsqu’elle est aveugle aux crimes qui se passent en son sein et ne protège pas les victimes. Malheureusement, combien de victimes ont eu du mal à parler de leur agression à leurs parents, leurs frères ou sœurs et, quand cette parole a pu être dite, combien n’en furent pas profondément blessé · es en entendant des propos tels “ces choses-là ne se disent pas ? Garde ça pour toi et n’en parle plus. Ça ferait trop de dégâts.” Il y a un non-sens aussi grand qu’en matière de culture du viol. Il est inhumain de renvoyer dans les rosiers quelqu’u · ne qui, le cœur lourd, trouve le courage de venir partager une souffrance. Il est d’autant plus impensable de lui demander d’étouffer son secret, sous peine de bouleverser un quelconque équilibre. Et son équilibre à ellui, la victime, qui s’en préoccupe ? Qui le soigne ? Personne ! Mais on lui fait porter le fardeau d’un secret à contenir en ellui, jusqu’à le · la faire imploser.

 

 

En parlant de soins, parlons maintenant des soignants. Ces êtres chargés de prendre soin des autres mais qui échouent lamentablement en matière de viol. Aucune formation aux psychotraumatismes n’est présente dans les études de médecine, et par extension de psychiatres. Or, ils sont l’entité la plus à même de rencontrer des victimes de viol. C’est d’un paradoxe absolu. C’est comme si on n’apprenait pas aux pompiers à éteindre le feu, juste à intervenir pour sauver des gens. Une composante essentielle de leur métier manquerait. Pour les psychiatres c’est la même chose. Quand on y ajoute toutes les autres professions paramédicales (de la sage-femme, aux infirmiers), on mesure que trop bien l’absence de formations pour tous ces professionnels de la santé qui risquent de rencontrer des victimes de viols et donc d’être maltraitants. Comme s’il n’y avait déjà pas suffisamment de traumatismes et souffrances dans leur vie. Il faut tout de même rappeler, qu’en moyenne, une victime met 13 ans pour trouver un psychothérapeute adéquat. Si on y ajoute les années de thérapie, le processus de guérison peut facilement atteindre les 15 à 20 ans en moyenne. Cette longueur de temps va amener les victimes à être prises en charge par des professionnels non-formés, susceptibles d’être maltraitants et de les soigner / traiter pour d’autres maladies, sans deviner que la source des maux est ailleurs. Interroger la possibilité de violences permettrait de les relier à des symptômes et de les traiter efficacement. Peu nombreux sont ceux qui se donnent cette peine… il m’est arrivé de lire le témoignage d’une femme, violée à 17 ans, qui a mis 36 ans à trouver un thérapeute compétent sur la question des psychotraumatismes. Elle commencera sa reconstruction à 53 ans seulement, elle aura passé peut-être la moitié de sa vie en souffrance, dans l’indifférence et la culpabilisation générale…

 

“Dans ce pays internationalement connu pour être celui des Droits de l’homme – il faut le comprendre sans les femmes – seul 10% des victimes vont porter plainte et, accrochez-vous bien, seul 1% des plaintes va aboutir”

 

La palme d’or de l’indifférence revient quand même à la justice. Oui, oui, cette entité au joli nom qui prétend défendre et protéger tous les citoyens, et dans le pays des Droits de l’Homme. S’il vous plaît. (Applaudissements). Cette entité au joli nom, comme son homologue soignante, ne sera pas du tout formée aux psychotraumatismes. Donc les policier · es, qui sont avant tout des citoyen · es, vont balancer de la culture du viol en veux-tu en voilà et, ce faisant, freiner les victimes dans leur désir de porter plainte. C’est pourquoi, dans ce pays internationalement connu pour être celui des Droits de l’homme – il faut le comprendre sans les femmes – seul 10% des victimes vont porter plainte et, accrochez-vous bien, seul 1% des plaintes va aboutir (choc). Autrement dit :

– 99% des violeurs sont dehors, on les côtoie tous les jours (peut-être notre voisin, boulanger, postier, médecin, caissier, pharmacien, patron, collègue, frère, ex-conjoint, fils, père etc)

– Dans le 1% de plainte qui aboutit, il faut savoir que la justice requalifie ce peu de plaintes pour viol en agressions sexuelles. D’un crime, on passe à un délit, on a désengorgé les Assises car il n’y a pas assez d’argent public pour ce type de tribunal et on ajoute une souffrance supplémentaire aux victimes. On les brise une fois de plus (alors qu’elles étaient déjà émiettées). Pour le dire autrement avec ma métaphore du meurtrier, c’est comme si on requalifiait un meurtre, d’une simple agression à l’arme blanche.
Vous voyez le topo ?!

La première place du podium en matière du pire revient de droit (haha) à la justice qui non seulement n’est pas assez compétente pour accueillir avec bienveillance la parole des victimes, n’a pas les moyens humains et financiers de juger avec justice, mais en plus manque cruellement de formations pour mesurer l’ampleur des dégâts et protéger efficacement toutes les victimes.

Bon, je suis sympa, je vous offre un tuyau amis justiciers ou soignants si vous nous lisez : il y a un Diplôme Université contre les violences faites aux femmes qui est né il y a quelques années à l’Université Paris 8, à Saint-Denis. Je suis sûre qu’avec votre compte personnel de formation, vous pouvez vous y inscrire, sans payer. Waouuh !! La formation dure un an à raison d’un week-end par mois : quel petit sacrifice face au grand bien qu’il peut offrir !

Quant à vous, toutes les victimes ou proches de victimes, je vous invite à vous faire aider par un · e psychologue ou psychiatre spécialisé · e en psychotraumatologie et/ou victimologie (pensez à vérifier les diplômes et la légitimité du soignant qui va vous recevoir). En m’essayant à cette approche, j’ai pu guérir de mes psychotraumatismes en seulement deux ans. Guérir est évidemment possible bien que non sans mal !

Entre silences et aveuglements, le viol est une cause indéfendue

Nous l’avons vu, la culture du viol et le déni social ont largement contribué à faire gangréner le viol en tant que fléau destructeur d’humanité. De plus, cette volonté ardente et historique de silencier les voix des victimes d’agressions sexuelles et de viols tend à invisibiliser leur réalité. En effet, éviter de parler du viol c’est nier son existence comme fait social et politique à dénoncer, mais c’est aussi maintenir sa survenue en termes d’oppressions sexistes. Se taire sur les viols c’est leur laisser toute la place pour exister – comme l’ont fait nos prédécesseurs – et ne pas alerter l’ensemble de l’opinion publique pour qu’elle s’indigne avec nous. Et le constat est là : le viol est un crime de l’invisible. Il détruit les victimes mais ces armes sont d’ordre psychologique, non visibles à l’œil nu. Ces ravages sont des cris dont on étouffe l’écho pour ne pas l’entendre. Toutes ces stratégies sont destinées à minimiser sa réalité. Résultat : le viol souffre d’une absence de visibilités et devient une cause peu connue donc peu défendue. Il est interpellant de voir nos pairs s’agiter pour des causes aux maux visibles tels que la maladie, la pauvreté pour ne citer qu’eux, et être apathiques s’agissant de violences sexuelles et sexistes. Je ne dis pas qu’une cause mériterait plus qu’une autre d’être défendue, loin de là, je dis juste que certaines causes sont voyantes à l’oeil nu tandis que les déchirures provoquées par le viol ne se voient ni ne s’entendent, pour toutes les raisons évoquées plus haut, donc amènent l’inaction. Cette mise en sourdine et en œillères ne serait-elle pas l’illustration d’une volonté d’invisibiliser un combat ô combien urgent à entreprendre ? Aujourd’hui, ici et maintenant.

En outre, cette invisibilisation, n’a-t-elle pas pour origine le renfermement des cœurs de nos semblables ? Il est en effet très étonnant que le viol soit oralement condamné par une partie de nos pairs qui va sans aucun doute considérer cet acte comme quelque chose de mal et douloureux. À l’inverse, ces mêmes personnes vont alimenter la culture du viol. On pourrait penser que nous nous sommes enfermés dans une intellectualisation de nos émotions. Nous avons encore les capacités intellectuelles de nous rendre compte qu’il faille s’indigner, se mettre en colère quand on parle de viols mais, à l’inverse, nos cœurs restent insensibles. Nous entendrons plus facilement dire du viol que “c’est grave” mais cette parole, vide, enlève toute substance à la gravité et l’effroi du traumatisme. Si nos cœurs rageaient effectivement face à cette gravité, il ne nous serait plus si urgent d‘agir car nos prédécesseurs l’auraient fait pour nous. Mais il n’en a rien été, nous devons porter collectivement le fardeau déposé par l’Histoire, afin de soulager chaque victime et lui offrir une chance de se reconstruire. Pour cela, nous ne devons plus prendre en exemple comportemental les politiques qui nous gouvernent, dont les paroles sont animées et les actes toujours en attente. Joignons nos paroles à des actes et construisons le monde juste dans lequel nous voulons évoluer aujourd’hui et demain en nous servant des leçons et erreurs d’hier.

 Notre fabrique des violeurs

Les violeurs sont le produit de nos silences. Ils sont le fruit des politiques qui n’agissent en rien pour amener à plus de condamnations et ne donnent pas les moyens nécessaires à la justice de faire appliquer les lois. Les violeurs existent et leur mal gangrène car l’absence de condamnations pour des millions de vies détruites n’a aucun effet repoussoir. La loi, la menace d’aller en prison, d’être socialement condamné devraient être des outils dissuadant en matière de viols. Dans la mesure où ils ne jouent pas leur rôle, ils inséminent l’idée, dans l’esprit des violeurs, que tout est permis, tout leur est dû, qu’ils peuvent agir sans craintes. Voilà ce que les silences disent. Voici les idées qu’ils véhiculent. Et, tant que l’omerta continuera de proliférer comme elle le fait depuis des siècles, nous continuerons de fabriquer des violeurs. Car, effectivement, nous sommes celleux qui fabriquons les violeurs. À chaque fois que nous nous taisons, nous donnons un permis de violer à chaque criminel. À chaque fois que nous détournons le regard, nous abandonnons une victime de plus. À chaque fois que nous ne condamnons pas un violeur pour ces méfaits, nous lui donnons tacitement le droit d’être une ordure et c’est une part de notre humanité qu’on enterre par notre complicité assassine.

 

Ça ne peut plus durer. Ça a déjà trop duré !

 

 

 

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Diffuse la bonne parole

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(Dé)construction

Le viol est le crime dont tout le monde se fout ! Partie I

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On dénombre en France, en 2018, plus de 190 000 victimes de viol[1] ou tentatives de viol par an. Un chiffre bien en deçà de la réalité puisque les victimes de viol sont souvent silencié·es par l’amnésie traumatique dont elles et ils peuvent être sujet·tes et surtout l’omerta[2] de la société. Il est étonnant de voir que la culture du viol grandit en force et prend une place considérable dans l’esprit des citoyen·nes, induisant un déni total quant à ces réalités. Ce silence est monstrueux et n’a plus le droit d’exister. Car il condamne des centaines de milliers de vies, chaque année, à passer une existence de souffrances et d’abandon, s’ajoutant à la douleur du traumatisme. Nous ne pouvons plus permettre que de telles destructions humaines surgissent encore. Nous ne pouvons plus tolérer que nos proches soient livré·es à elleux-mêmes face à leurs blessures et leurs traumatismes, tentant désespérément de retrouver un souffle de vie. Nous ne pouvons plus fermer les yeux sur des crimes que les sociétés et époques antérieures ont laissé se perpétuer. NOUS N’EN AVONS PLUS LE DROIT. Il est de notre devoir d’agir. Le viol est un infanticide, un féminicide, un homicide et un humainicide. Par le caractère destructeur qu’il représente, il est un danger pour notre humanité. Nous devons le faire reculer, en commençant par briser, exterminer, éradiquer la culture du viol et la multitude de violences qu’elle cristallise.

 

La culture du viol : un drame en 3 actes ou l’expression d’un monde à l’envers

 

La culture du viol est cet outil dont se nourrit notre société pour légitimer un viol. Oui, oui, vous avez bien entendu (ou plutôt lu). Quand un viol a lieu, notre société si avancée scientifiquement, technologiquement, perd toute raison et logique car, au lieu de CONDAMNER tous les violeur·se·s quel qu’elles et qu’ils soient, elle va essayer de leur trouver des excuses. C’est d’une absurdité sans égale ni mesure. On se vante d’avoir des citoyen·nes de plus en plus instruit·es mais la bêtise règne en maître face au viol, une bêtise qui lui a permis de se répandre et gangréner par-delà le temps.

 

1) Culpabiliser les victimes

 

En effet, la pensée majoritaire est de véhiculer des idées et de poser des questions, non seulement les plus culpabilisantes les unes que les autres pour chaque victime mais aussi les plus insensées. Petite rétrospective de ce que l’on peut entendre lorsqu’une personne témoigne avoir subi un viol :

– Comment étiez-vous habillée ?

– Avez-vous provoqué / séduit celui qui vous a violée ?

– Aviez-vous bu de l’alcool ou consommé de la drogue ?

– Aviez-vous entamé une quelconque activité sexuelle avec cette personne avant de crier au viol ?

– Avez-vous dit non ? Un vrai “non” ?

– Quelles sont vos pratiques sexuelles ?

– Combien d’amantes / partenaires / conjoint·es avez-vous eu avant ?

– …

Je m’arrête-là mais le topo est assez clair : quand une personne est violée, la société, la justice, les soignants, tout le monde va s’acharner à prouver que la victime a un peu cherché / mérité / provoqué son viol donc elle n’a eu que ce qu’elle mérite. Or, personne ne mérite d’être violé·e. Personne ne mérite qu’on vienne à remettre en cause son humanité, car violer quelqu’un·e c’est nier son existence, son droit de vivre, son droit d’être.

 

2) Déculpabiliser les violeurs

 

“Nos modes de pensées ont été (mal)façonnés par une éducation aux désavantages des femmes, qui inculque que l’homme est un loup pour la femme. (…) Renvoyer l’homme au rang d’animal est une insulte pour ce dernier”

 

À côté de ça – quitte à sortir des absurdités, autant y aller franc-jeu – cette même société qui culpabilise les victimes, va chercher une myriade d’excuses pour déculpabiliser les violeurs (qui sont majoritairement mais non exclusivement des hommes) en avançant que :

– “mais tu connais les hommes, ils ne se contrôlent pas”

– “en même temps, si tu t’habilles d’une certaine manière, ne t’étonne pas si tu es violée ensuite”

– “les hommes sont comme ça, on n’y peut rien”.

 

D’aucuns ne pourraient affirmer une prétendue “faiblesse” naturelle inhérente à l’homme. Si cette idée reçue – et l’expression est à propos puisqu’une idée reçue est une idée répandue et véhiculée, dont le nombre et le caractère répétitif lui ont conféré un statut valant véracité – est largement véhiculée pour plusieurs raisons.

L’Histoire fut le siège du diktat patriarcal. Durant des siècles, l’idéologie machiste représentée par les hommes a kidnappé l’ensemble des postes décisionnaires et de pouvoir. Ces derniers écrivaient et faisaient appliquer des textes de lois qui ne risqueraient en aucun cas de remettre en cause leurs privilèges. Ils ont donc disséminé dans l’esprit de tous les hommes et toutes les femmes de leur époque, une supposée faiblesse sexuelle des hommes face au corps féminin. Il devenait donc quasi impossible de réfuter cette thèse ni de condamner un viol. Comment une femme victime de viol pourrait-elle aller se plaindre à un représentant de justice mâle, persuadé lui aussi de sa propre faiblesse ?! Si l’apparition de femmes, au cours de l’histoire récente, a permis une évolution de ces prises de pouvoir, il n’en reste pas moins que les idées et mentalités ont été trop bien ancrées dans l’esprit de tout un chacun pour être facilement et rapidement remises en question.

Nos modes de pensées ont été (mal)façonnés par une éducation aux désavantages des femmes, qui inculque que l’homme est un loup pour la femme. L’aberration suprême de la culture du viol est de considérer que l’homme ne peut contrôler ses besoins, envies et pulsions. Or, aussi loin que je me souvienne, ce qui distingue l’homme de l’animal c’est justement ce contrôle-là, ce libre-arbitre, cette résistance. Renvoyer l’homme au rang d’animal est une insulte pour ce dernier – même s’il ne vit que pour assouvir ses besoins – et une manière de déculpabiliser à outrance. Cela reviendrait au même si on faisait preuve d’indulgences envers un meurtrier, sous prétexte qu’il serait “fou”, si tant est que ce mot veuille dire quelque chose. Qui plus est, il est totalement erroné de penser le viol comme “un désir non contrôlé” car le viol est dissociable du désir. Le viol est la résultante d’une volonté de domination et de destruction. Il n’a aucun lien avec la sexualité. Nonobstant, j’aimerais interroger les hommes de notre monde : souhaitez-vous vraiment être perçus, vu, décrits, comme des êtres sauvages, victimes de leurs bourses ? C’est si réducteur, insultant et désolant comme perception.

 

Enfin, il me semble que nous sommes suffisamment éduqué · es, éveillé · es et intelligent · es pour cesser de légitimer encore la culture du viol, qui est d’un non-sens profond. Cela ne répond vraiment à aucune logique humaine de culpabiliser les victimes puis déculpabiliser les violeurs. C’est un cheminement de pensées qui relève de l’aberration seule. Le viol est un crime, au même titre que le meurtre. Pénalement, ces actes sont de même gravité. Pourtant, il ne nous viendrait jamais à l’esprit de dire à une personne qui a été tuée :

– “Quelle idée de sortir de chez toi quand on sait tous les fous/folles qu’il y a dehors”

– “Quelle idée de te mettre sur le chemin de telle personne, tu ne savais pas qu’il/elle pouvait te tuer”

– “Pourquoi l’avoir mis e en colère et nourri celle-ci ?” “Pourquoi ne pas t’être tu · e ? On sait tous que par excès de colère, l’être humain peut tuer.”

– “Mais tu aurais dû savoir que cette personne avait un couteau / flingue ou que sais-je encore ! Tu savais que c’était un meurtrier potentiel !”

 

Toutes ces affirmations sont insensées : de la même manière que les meurtriers n’ont pas leur crime écrit sur leur front, les violeurs non plus. Il est donc difficile d’identifier un violeur avant qu’il ne commette son crime et c’est déjà trop tard pour s’en défendre. Dans la même veine que ces propos nous paraitraient ahurissant à tenir à une victime de meurtre, on n’a pas le droit les tenir face à une victime de viol (la comparaison n’est pas de trop car les victimes de viol se retrouvent dans un état de mort · es-vivant · es, de fantôme, de cadavre, tant leur vie a été pulvérisée par l’agression.) Dans la même veine, une victime qui est traumatisée et saccagée par le viol, quand elle arrive, avec peines et souffrances, à avouer ce crime qui la ronge, on ne peut plus se permettre d’interroger son silence, qu’importe la durée de celui-ci.

 

3) Incriminer le silence

 

Dans la suite (il)logique de la culture du viol, la société qui croit tout savoir, a encore tout un lot de phrases assassines à dire à une victime qui avouerait l’abus qu’elle a subi :  “mais pourquoi t’as pas bougé ?”, “pourquoi t’as pas crié ou réagi ?”, “pourquoi tu n’en parles que maintenant ? Au bout de 20 ans ? Tu veux briser sa vie et sa famille ??!”

 

 

Chacune de ces phrases, dans un premier temps, dénote une absence totale de compassion, d’empathie et d’humanité. Il s’agit très clairement des mauvaises questions à poser et de la plus mauvaise manière de le faire. Toute l’illustration de la culture du viol que je viens de faire nous montre pourquoi une victime pourrait avoir du mal à avouer son agression. Chacune de ces phrases, dénuées d’empathie, est une douleur tranchante supplémentaire pour qui les entend. Ne rien dire c’est se protéger d’entendre de telles bêtises. Autrement dit, la culture du viol silencie les victimes et ce silence est une double souffrance, un autre abandon.

Cependant, une autre raison qui amène au silence est d’ordre psychotraumatique. Il est utile de savoir que le viol est une effraction psychique sans précédent, qui défie l’entendement. Il représente un danger vital pour chaque victime. En effet, le choc est tel qu’il est à l’origine d’une surproduction d’adrénaline et de cortisol, deux hormones qui, en surabondance, peuvent entraîner la mort par arrêt cardiaque. Pour protéger physiologiquement la victime, le cerveau procède à une disjonction (oui, comme un circuit électrique) et coupe la relation entre l’objet de stress et la région cérébrale qui sécrète les hormones. Cela conduit à une sidération de la victime (qui se retrouve dans l’incapacité totale de bouger) et à une dissociation traumatique (sensation de sortir de son corps, de flotter) qui va engendrer une anesthésie émotionnelle (sensation d’un corps coupé de ses émotions). L’ensemble de ces symptômes durent jusqu’à plusieurs dizaines d’années. Enfin, quand la victime est mineure, étant donné qu’elle n’a aucun accès à la sexualité (d’un point de vue psychique, cela est en décalage avec son développement) le traumatisme sera tel que va s’ajouter une amnésie traumatique. Comme son nom l’indique, c’est le fait de refouler le traumatisme. L’amnésie peut aussi mettre plusieurs décennies à être levée.
La culture du viol est donc une gangrène qui sévit depuis beaucoup trop longtemps et fait des ravages considérables. Elle permet la survenue des viols et contribue à les étouffer ensuite. Elle représente un fléau à éradiquer de toute urgence, pour que soient rompues à tous les niveaux les lois du silence.

 

[1]  « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui, par violence, contrainte, menace ou surprise, est un viol. » Article 222.23 du Code pénal.
« De quelque nature qu’il soit » , cela signifie bien que toutes les pénétrations (vaginales, anales ou orales) sont considérées comme étant des viols, qu’elles soient effectuées avec un pénis, un doigt ou n’importe quel autre objet. Source : https://simonae.fr/militantisme/les-indispensables/expliquez-culture-du-viol/

[2] terme emprunté à la mafia, désignant une loi du silence pour taire des crimes largement connus.

Suite Partie 2/3
Suite Partie 3/3

 

Crédit photo à la une : Fédération des femmes du Quebec

 

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